Par pétition du 1er novembre 1892, Tony Aroud (maître d'hôtel, demeurant place Grenette à Grenoble) et Emile Brunet (comptable, demeurant 14 rue d'Alsace-Lorraine à Grenoble) sollicitent auprès de la commune de la Bâthie l'achat de parcelles, de droits de riveraineté et de passages sur le ruisseau d'Arbine en vue de construire une usine sur la rive droite du cours d'eau. Des accords sont trouvés et plusieurs promesses de vente sont signées. Par délibération du 6 novembre 1892, le conseil municipal accepte l'offre à certaines conditions.
Le 3 juin 1894, Aroud et Brunet signent une promesse de vente avec Anselme Bonneton et Compagnie (directeur des Ardoisières de Cevins, entrepreneur de travaux publics à Grenoble) pour lui céder leurs droits. Par acte passé chez Maître Beauquis le 27 décembre 1894, Anselme Bonneton achète à la commune de la Bâthie une grande parcelle en rive droite du cours d'eau d'Arbine et les droits qu'elle possède sur ce dernier (FR.AD073, 6E15535). Il achète aussi plusieurs parcelles de terrain situées de part et d'autre du cours d'eau à des particuliers (FR.AD073, 4Q752). Anselme Bonneton cède ensuite ses droits à Alexandre Besançon. Le 24 novembre 1894, ce dernier demande l'autorisation d'établir une usine à "moteur hydraulique" pour la fabrication du carborundum. Dans le même temps, la société Robert et Compagnie qui souhaite installer une usine de pâte à papier sur la rive opposée (rive gauche, IA73003892) effectue la même démarche. Le 30 novembre 1894, les deux sociétés déposent une demande commune auprès du service des Ponts et Chaussées afin d'obtenir l'autorisation de construire une prise d'eau sur le ruisseau d'Arbine pour alimenter une centrale électrique. Cette demande suscite l'opposition de certains habitants d'Arbine qui craignent la rupture de la conduite forcée et s'inquiètent pour la salubrité des eaux. Quatre propriétaires de moulins situés en aval sont également contre le projet (IA73003890, IA73003891, IA73003893, IA73003894). Pour rassurer les habitants, une enquête est menée par le service des Ponts et chaussées qui précise dans un rapport du 14 novembre 1896 : "L'usine de carborundum ne fait pas de lavage de produits ; pour les quelques cas très rares de lavage de matières, elle a aménagé un puits absorbant couvert situé à 30 m en dehors de la berge du torrent [...]" (FR.AD073, 49SPC2). L'autorisation de dérivation est accordée par arrêté préfectoral du 22 décembre 1896. En 1898, A.Besançon demande l'autorisation de fabriquer du carbure de calcium dans son usine parallèlement à la production de carborundum (FR.AD073, 49SPC4).
L'électricité nécessaire est produite à proximité immédiate, par la centrale de l'usine Robert et Cie située sur la rive gauche du ruisseau d'Arbine (IA73003892). L'usine de carborundum dispose également d'un branchement direct sur la conduite pour récupérer de l'eau.
En 1902 l'usine est exploitée par la Compagnie Internationale de Carborundum (ou Carborandum), puis par la Société anonyme des usines de Carborundum et d'Electrite réunies (Verinigte Carborudum Und Elekrit Werke aktien Gessellschaft), une société autrichienne dont le siège se trouve à Vienne (FR.AD073, 4Q855 et FR.AD073, 4Q917).
Par un bail daté du 18 février 1911, le directeur de l'usine René Bouvier (fils du constructeur-mécanicien Albert Bouvier de Grenoble), loue à la Société P. Robert et Cie l'intégralité de la force produite par la centrale et les bâtiments de l'usine de la rive gauche (FR.AD073, 4Q855). Les deux usines forment désormais un seul complexe industriel.
En 1914, sur réquisition du procureur de la République, l'usine d'Arbine qui appartient à des Autrichiens est saisie par l’État. Le 18 mai 1922, elle est vendue à la Société d'électrochimie, d'électrométallurgie et des aciéries électriques d'Ugine représentée par Henri Gall. La vente comprend les procédés industriels concernant les produits bruts fabriqués à la Bâthie et la faculté d'utiliser le terme "carborundum" (marque déposée) pour lequel la Société autrichienne avait conclu des accords avec le Carborundum Compagny Niaga Falls (FR.AD073, 4Q917).
Actuellement l'usine d'Arbine est toujours en activité. Elle est exploitée par la Société ALTEO qui produit du corindon.