Le bâtiment des cuisines a été construit dans la deuxième moitié du 17e siècle sur des structures préexistantes, qui étaient probablement des aménagements de jardin (deux bassins, une fontaine évoquant la fontaine aménagée sur les terrasses de l'hôtel de Gadagne). Le cahier de toisage, non daté, qui se rapporte à la construction des bâtiments conventuels de l'aile nord (1650) et de l'aile des cuisines, fait référence au "mur qui retient les terres au devant des fontaines... au devant de la cuisine ja fondé" et au "mur de la cuisine à rehausser sur les pilastres des arcades des fontaines aussi de bise ja fondé". La construction du corps de logis accueillant les cuisines et dépendances était apparemment prévue dans le projet général du couvent dès 1650, mais semble avoir été ajournée jusqu'en 1663, où elle fait l'objet d'un acte spécifique (prix fait du 11 juin 1663 reconduisant les clauses et conditions du prix fait de 1650). Les maîtres maçons Sébastien Baillond et Estienne Symon dit Terman sont chargés de l'aménagement d'"un corps de logis pour servir de cuisine, chauffoir, infirmerie et autres logis à prendre depuis le degré joignant leur cuisine et réfectoire jusqu’au bout du corps de logis tenant du costé du couchant", dont les fondations étaient déjà jetées, et de la construction de latrines à l'extrémité du bâtiment. L'acte mentionne le "grand démolissement qu'il y a à faire dans le susdit corps de logis" sans donner d'indications permettant de préciser la nature des bâtiments démolis. En 1664, les deux planchers sont établis par Michel Paquin ou Saquin, charpentier (prix fait du 27 novembre 1664). Sous l'Ancien régime, le bâtiment comprenait en sous-sol, les fontaines ; au rez-de-chaussée la cuisine, la dépense et la "voûte du charbonnier" ; au premier étage un vaste chauffoir et les latrines du premier dortoir ; au deuxième étage l'infirmerie, subdivisée en deux à trois chambres, une pièce appelée la classe et une petite chapelle, ainsi que les latrines de l'infirmerie, puis sous les combles des greniers.
Dans la deuxième moitié du 19e siècle, lorsque les carmes déchaussés restaurent leur couvent, les moines se réservent cette aile de dimensions modestes et dotées de toutes les commodités utilitaires, et affectent les grands dortoirs de l'aile nord au noviciat. Une chapelle secondaire ou oratoire est aménagée au deuxième étage de l'aile des cuisines, à l'emplacement de l'infirmerie : en 1862, elle est décorée de trois peintures monumentales de Paul Borel (peintures à fresque ou à la détrempe représentant L'Adoration des Mages, L’Adoration des Bergers et La Mort de saint Joseph, connues par des reproductions dans JB. Martin, p. 168-169). Après l'expulsion de la congrégation en 1882, les quelques religieux restés sur place comme gardiens du bâtiment se retirent dans l'aile des cuisines qu'ils dotent d'une porte d'entrée séparée sur le chemin de Montauban, alors que le reste du couvent est loué à une institution scolaire. En 1890, il leur est reproché d'autoriser des femmes du voisinage à assister à la messe dominicale dans leur chapelle. En 1907, l'aile des cuisines ne fait pas partie des bâtiments aménagés en priorité en dépôt d'archives, et connaît peu de modifications hormis la rénovation des façades et toitures. Le bâtiment des latrines semble avoir été démoli dans la première phase de travaux. En août 1909, l'aménagement des magasins dans cette aile est ajourné pour raisons financières. Seules les deux pièces du rez-de-chaussée sont immédiatement utilisées comme dépôts de papiers inutiles (repiquage et badigeon des murs intérieurs, établissement d'un sol en ciment). Les étages sont progressivement colonisés par l'installation de magasins : le premier étage avant 1935, puis en 1935 le deuxième étage à l'exception de la chapelle dont les peintures sont alors toujours en place (AD Rhône, 4 N 383), et enfin les combles. La date de disparition des peintures n'est pas connue. Le rez-de-chaussée de l'aile des cuisines, conservant les éléments patrimoniaux les plus remarquables du couvent, est remis en valeur à partir de 1977 et utilisé comme salle d'expositions et de conférences. La fontaine du réfectoire y est déplacée en réemploi à une date inconnue.
Conservatrice du patrimoine, chercheure au Service de l'Inventaire (2014- ).