Contrairement à nombre d´usines alpines installées au coeur des vallées et souvent isolées, l´usine des Forges et Fonderies de Cran (ou de Crans) est implantée à proximité d´un grand centre urbain : Annecy. C´est là un trait d´originalité qui explique d´une part son ancienneté et la nature de sa fabrication. Le site produit d´abord du fer blanc car l´aluminium demandait une très forte consommation en énergie. Avant l´essor de la houille blanche l´industrie haut-savoyarde reste très dépendante des ressources naturelles et se confinent aux débouchés intérieurs. La mise en place de la voie ferrée après 1875 et la construction d´un réseau routier donne un coup de fouet au développement industriel. Avec l´annexion française, les industries les plus importantes parviennent à adapter leur outil de production et leurs activités au réseau hexagonal.
Les origines de l'usine remontent au XVIIIe siècle. Durant 200 ans, l'usine a connu bien des évolutions techniques. En 1817, l´entreprise est reprise par l´industriel Frèrejean qui assure le développement du site. Cet industriel lyonnais lui donne le nom de Manufacture Royale de la Tôle et du Fer-blanc établie au hameau de Cran (ou de Crans). En 1819, l´usine est reconnue comme Manufacture Royale par le pouvoir central de Turin. En 1826, l´usine adopte le puddlage pour affinage de la fonte et démarre les premiers laminoirs pour la fabrication des tôles. En 1838, un haut fourneau est mis en service. A partir de 1863, la société prend le nom de Société Frèrejean, Roux et Cie. Le site de Cran-Gevrier fonctionne alors avec les forges de Pont-Évêque (Isère) qui se spécialisent dans le cuivre.
A partir de 1864, Claude Aimé-Henri siège au conseil de surveillance de la société Henry Merle, devenue A.-R. Pechiney et Cie en 1877. Son fils, Alphonse-Emile-Henri, ingénieur civil des Mines, préside alors les Forges et Fonderies de Cran de 1907 à 1937 ; il succède ainsi à son père au sein de Péchiney et supervise toutes les filiales du groupe. C´est en 1907, que la diversification du site commence avec notamment l´arrivée de nouveau processus de production comme l´électrométallurgie qui voie l´essor de la production aluminium. Conscients de la concurrence exercée dans les bassins stéphanois et lillois, les administrateurs décident de spécialiser la production du site dans l´aluminium qui connaît les prémices d´un développement considérable dans la région des Alpes. L´implantation de turbines à la fin du XIXe siècle intervient en remplacement des roues à aubes. Le site des forges est alors équipé d´une série de turbines alimentant les différents ateliers. Le rattachement à la France marque la fin du monopole de l´usine dans la production de fer, elle doit composer avec une concurrence plus importante. L´entreprise modifie ses principes de production pour devenir compétitive. Les gisements de fer sont abandonnés et les hauts fourneaux cessent leur activité en 1894. L´entreprise se spécialise alors dans le laminage et l´emboutissage pour les produits finis. En 1917, les installations hydrauliques de l´époque comportent 10 turbines développant 580 ch. En 1918, une statistique des services de l´industrie atteste d´un équipement de 10 turbines et d´une roue à aubes d´une puissance de 550 ch.
En 1977, l´usine se nomme Péchiney Rhénalu et son activité consiste à transformer des demis papiers aluminium et des composites pour les secteurs de l´industrie, du transport et du bâtiment. Après un rachat du groupe Pechiney en 2003 par le groupe canadien Alcan, l´usine continue son activité pour devenir entre 2004 et 2005 une entité juridique filiale de Novelis. Depuis 2006, la Compagnie Alpine d´Aluminium produit des disques, des laminées courant en aluminium et des bandes d´aluminium laqué.