Historique
L'origine de ce moulin remonte sans doute au moins à la première moitié du 17e siècle.
D'après G. Picron (2016), un descriptif de 1658 mentionne deux moulins à Barret-de-Lioure, qu'il faut peut-être comprendre comme un moulin à deux meules, très probablement implanté à l'endroit actuel. La présence de ces « deux moulins » est confirmée par un inventaire de 1688 mentionné par A. Lacroix (1901), et ce texte précise que « les habitants étoient obligés d'aller [y] moudre tous leurs grains et non ailleurs ».
A. Lacroix précise qu'au début du 18e siècle, ce moulin est la propriété de la famille Dupuy Montbrun. Il est alors alimenté par une dérivation du « Tourlouret » (actuel Anary). Dans l'état des sections du cadastre de 1788, il est décrit comme un « moulin à deux engins à moudre le blé », et il est accompagné d'un « valat moulinier, relarguier, jardin (avec une ecluse) ». Lors de la vente des biens des émigrés en 1793-1794, le moulin fait partie des possessions de David de Sade, héritier de Mme de Sade, elle-même héritière des Dupuy Montbrun (A. Lacroix, 1901 ; G. Picron, 2006, 2016).
Ce moulin est figuré sur la carte de Cassini.
Sur le plan cadastral de 1813, trois bâtiment sont représentés : l'actuel moulin, un autre moulin situé en contrebas (aujourd'hui rasé et dont ne subsiste que le soubassement) et le bâtiment à usage vinicole (dépendance disjointe au sud-ouest). L'ensemble est mentionné comme « maison cour et moulin » à l'état des sections cadastrales de 1824, et appartient à « Armand Jean, cultivateur à Barret », lequel possède également plusieurs propriétés (parcelles 297 à 303 : « terre labourable », « vigne », « pré ») à proximité. La parcelle 302 est mentionnée comme « écluse », elle correspond au bassin de rétention avec son canal de dérivation qui prend sa source au niveau de la confluence entre l'Anary (appelé « Toulourain » sur le plan cadastral) et le Ravin du Petit Riou. Les parcelles 304 et 306 sont mentionnées comme « canal ».
Localisation sur le plan cadastral de 1813.
En 1826, la matrice cadastrale mentionne une « destruction » partielle de la maison et d'un moulin (celui d'aval). A cette époque, le propriétaire est toujours Armand Jean. La date portée de 1828, qui figure sur l'encadrement de la porte d'entrée du bâtiment actuel, indique la date d'une reconstruction partielle et d'une extension de la maison, bien que ces travaux n'apparaissent pas dans la matrice cadastrale. En 1836, la matrice cadastrale mentionne une « réduction » du moulin. A cette époque, le propriétaire a changé et il s'agit de Espieux Hypolithe, adjoint au maire.
Les archives communales de la première moitié du 19e siècle mentionnent que le meunier est alors également « maître de pressoir » (G. Picron, 2006).
La lecture des élévations montre plusieurs étapes de constructions et de reprises.
La partie la plus ancienne est au cœur du bâtiment, et elle intègre la chambre de la roue. L'origine de sa construction pourrait remonter à la première moitié du 17e siècle. Il est possible que le moulin aval, aujourd'hui rasé, soit de cette même époque. Cette disposition pourrait expliquer la mention des « deux moulins » dans les inventaires du 17e siècle.
Une seconde construction a ensuite été ajoutée à l'angle sud-est du moulin amont initial. Cet ajout correspond à l'ancien fournil, et il pourrait dater de la fin du 17e siècle ou du début du 18e siècle. La construction de la partie basse de la dépendance disjointe au sud-ouest pourrait également remonter à cette période.
Ensuite, au cours de la seconde moitié du 18e siècle, le bâtiment initial (moulin amont) a été largement agrandi, vers l'ouest (cuisine actuelle) et vers le nord (étable sous voûte). Cette extension est caractérisée par la présence d'encadrements de fenêtre en arc segmentaire, avec appuis moulurés à décor de gouttes. Dans la dépendance sud-est, le four à pain et son soubassement voûté ont probablement été également ajoutés à cette même période. La dépendance disjointe au sud-ouest a été surélevée lors de cette même campagne de travaux.
Le bâtiment principal (moulin amont) a ensuite été agrandi vers l'ouest, avec la création des deux vestibules et l'aménagement d'une nouvelle porte d'entrée, datée par une date portée de 1828. Cette partie est caractérisée par des encadrements de fenêtre en arc segmentaire, avec appuis moulurés mais non décorés.
En 1892 une délibération municipale concernant le pont sur l'Anary fait mention « du nouveau moulin » (G. Picron, 2007), suggérant que l'ensemble a été récemment remanié ou partiellement reconstruit, à moins que cette mention ne concerne que de nouvelles installations de meunerie. C'est possiblement à cette époque que la dépendance sud-est à été reprise, puis surélevée, avec la création de la chambre et du pigeonnier. Dans la dépendance sud-est, le four à pain a sans doute été détruit à cette époque ; on note une date gravée de 1897, dans un scellement du pignon sud de cette partie.
Enfin, le hangar semble avoir été ajouté au début du 20e siècle. On note une date gravée dans un scellement situé sous ce hangar, datée de 1911. Une autre date de cette même année est gravée dans un scellement situé sur l'élévation orientale de la dépendance disjointe au sud-ouest.
La tradition orale rapporte que le moulin a définitivement cessé son activité en 1953.
Description
Ce moulin est situé en contrebas de la R.D. 542, en rive droite de l'Anary, à approximativement 1,5 kilomètre à l'ouest du village de Barret-de-Lioure et à une altitude d'environ 725 mètres. Il est composé d'un bâtiment principal, auquel ont été accolées des dépendances, et d'un bâtiment disjoint. Le canal de dérivation et le bassin de retenue ne sont plus en eau.
Vue de situation prise de l'est.
Vue d'ensemble prise du nord.
Bâtiment principal et extension sud-est. Vue d'ensemble prise du sud.
Dépendance sud-ouest. Vue d'ensemble prise du nord-est.
Les bâtiments sont construits en maçonnerie de moellons calcaires, avec la présence de quelques blocs en brèche calcaire. Les chaînes d'angles sont en pierre de taille calcaire ou en gros moellons équarris, et les élévations conservent un enduit lisse ou rustique. Plusieurs fenêtres possèdent un encadrement en pierre de taille calcaire, en arc segmentaire, avec appui mouluré et, pour certaines, décoré d'un filet et de gouttes.
Bâtiment principal. Elévation sud, deuxième niveau. Fenêtre centrale, détail de l'appui.
Bâtiment principal. Pignon sud, deuxième niveau. Fenêtre est, détail de l'appui mouluré.
Les toits sont à longs pans, et couverts en tuile creuse. Les avant-toits et saillies de rive des pignons sont constitués de deux rangs de génoise sur le bâtiment principal, et d'un seul rang sur la dépendance disjointe au sud-ouest.
Le bâtiment principal comporte trois étages de soubassement et un rez-de-chaussée surélevé. Le premier étage de soubassement concerne uniquement la chambre de la roue, qui est couverte par une voûte en berceau plein-cintre. La roue horizontale est à l'état de vestige, sa structure est en bois, avec des ailettes et un cerclage métallique ; l'axe de force est encore en place, ainsi que la barre de guide. La conduite forcée débouche du mur oriental, elle est en bois.
Bâtiment principal. Pignon sud, angle est. Ouverture de la chambre de la roue.
Bâtiment principal. Premier étage de soubassement, chambre de la roue. Vue de volume prise du nord.
Le deuxième étage de soubassement concerne uniquement la moitié sud du bâtiment principal. La partie orientale de cet étage accueille la salle des meules, couverte par un plancher. Le sol est dallé, avec un caniveau qui traverse la pièce en diagonale. La meule à huile est encore en place, au-dessus de la roue ; sa cuve est en bois avec cerclage métallique, et elle est assise sur un relief maçonné de plan circulaire. La partie occidentale abrite une étable, séparée par un muret maçonné ; elle est couverte par une voûte en berceau segmentaire.
Bâtiment principal. Deuxième étage de soubassement, meunerie. Angle sud-est, moulin à huile.
Bâtiment principal. Deuxième étage de soubassement, étable. Vue de volume prise du sud.
Le troisième étage de soubassement concerne la totalité du bâtiment principal. Il est séparé en deux parties, nord et sud, chacune accessible par un vestibule aménagé côté ouest ; ces vestibules communiquent entre eux. La partie sud accueille la cuisine et une chambre. Le sol de la cuisine est en dalles calcaires soigneusement assemblées. Une cheminée est adossée au mur sud, elle possède un manteau en maçonnerie, mouluré. Un placard-niche est aménagé dans le mur nord, il abrite une pile d'évier façonnée au mortier avec un parement en carreaux de terre cuite. Un escalier tournant est installé dans l'angle sud-ouest ; les marches sont en bois, sur une structure maçonnée avec contre-marches en mortier. La partie nord de ce troisième étage de soubassement abrite une grande étable, couverte par une voûte en berceau segmentaire.
Bâtiment principal. Troisième étage de soubassement, cuisine. Mur sud, cheminée.
Bâtiment principal. Troisième étage de soubassement, cuisine. Sol en dalles calcaires.
Le rez-de-chaussée surélevé est réservé aux fonctions agricoles, hormis la pièce au-dessus de la cuisine et accessible par l'escalier intérieur, qui a pu servir de chambre. Les autres pièces abritent fenil et séchoirs. Un grand coffre à grain maçonné occupait un angle. Le sol est une chape de mortier sur quartons.
Une dépendance est accolée à l'angle sud-est du bâtiment principal. Elle comporte deux étages de soubassement, un rez-de-chaussée surélevé et un étage de comble.
Le premier étage de soubassement, qui ne concerne que la moitié sud de ce bâtiment, accueille une pièce couverte par une voûte en berceau segmentaire ; le sol est constitué de la roche en place.
Le second étage de soubassement occupe l'ensemble de ce bâtiment. Il abritait un four à pain et son fournil. Le four à pain a été détruit anciennement, et ne subsiste plus qu'une partie de l'encadrement de la bouche, en pierre de taille de brèche calcaire, en arc segmentaire. Le fournil est couvert par une voûte en berceau plein-cintre.
Le rez-de-chaussée surélevé ne concerne que la partie nord de ce bâtiment. Il accueille une chambre, accessible depuis le bâtiment principal, dont le sol est en carreaux de terre cuite.
L'étage de comble, situé au-dessus de cette chambre, accueillait un pigeonnier.
Partie sud-est. Vue d'ensemble prise du sud-ouest.
Partie sud-est. Elévation ouest, partie nord. Surélévation.
Un hangar est accolé à l'élévation est du bâtiment principal, au niveau du rez-de-chaussée surélevé ; il possède un mur côté est, dominant la retenue d'eau du canal de dérivation.
Hangar. Vue d'ensemble prise du nord.
Hangar. Elévation est.
Une dépendance disjointe est installée au sud-ouest du bâtiment principal, de l'autre côté de la cour. Elle comporte un étage de soubassement, un rez-de-chaussée surélevé et un étage de comble.
L'étage de soubassement est un cellier, couvert par une voûte d'arêtes à deux travées. Une grande cuve à bouillir, probablement en bois cerclé, était installée dans la partie sud dont le sol est surcreusé ; une autre cuve était sans doute également présente dans l'angle nord-est. Plusieurs petites trappes, murées ou non, sont aménagées dans la voûte. Le mur nord de cette pièce s'appuie sur la roche en place, et l'on y remarque une arcade en plein-cintre, murée. A l'angle nord-ouest, on note le départ d'une galerie souterraine, creusée dans le rocher, qui longe ensuite le bâtiment par son côté ouest. Son utilité pourrait être de rafraîchir et d'humidifier l'atmosphère de ce cellier.
Le rez-de-chaussée est occupé par un logis, dont le sol est constitué d'une chape de mortier coulée sur l'extrados de la voûte du cellier. Une cheminée est à demi-engagée dans le mur ouest.
L'étage de comble est réservé à un séchoir, dont le sol est une chape de mortier sur plancher.
Dépendance sud-ouest. Pignon sud.
Dépendance sud-ouest. Vue d'ensemble prise du nord.
Dépendance sud-ouest. Etage de soubassement, cellier. Travée sud, vue de volume prise du nord.
Dépendance sud-ouest. Rez-de-chaussée surélevé, logement. Mur ouest, cheminée.
Un puits est creusé devant le pignon ouest du bâtiment principal. Son cuvelage, en pierre sèche, est de plan circulaire. Affleurant au niveau du sol, il ne possède plus de structure aérienne.