I. Contexte de l'enquête
Le repérage
Ce dossier concerne les cabanes de la commune de Barret-de-Lioure (canton de Nyons et Baronnies, Parc naturel régional des Baronnies provençales, département de la Drôme). Le terme "cabane" correspond aux petits édifices en pierre sèche, destinés à servir de remise, d'étable et/ou de logis ponctuel et saisonnier.
Les conditions de l'enquête
Le repérage des cabanes sur la commune de Barret-de-Lioure a été effectué au cours des mois d'avril et mai 2016. Ces constructions n'étant pratiquement jamais mentionnées par les plans cadastraux, le recensement s'est fait à partir de la carte IGN au 1/25 000e, à partir des vues aériennes disponibles pour cette commune, et à partir d'informations orales.
Le repérage a été effectué à l'aide d'une grille de description morphologique propre aux cabanes et décrivant :
- l'implantation et les abords du bâtiment (pierriers, enclos),
- les matériaux principaux et secondaires et leur mise en œuvre,
- la forme du toit, la nature du couvrement, et de la couverture,
- le nombre d'étages visibles,
- la description des élévations et des baies,
- les aménagements intérieurs
- les inscriptions historiques : dates portées, inscriptions…
Cette grille de repérage a donné lieu à l'alimentation d'une base de données destinée à faire un traitement statistique et cartographique.
33 cabanes ont été repérées ; 8 d'entre elles ont été sélectionnées (24 % du corpus).
Il faut préciser ici qu'une vingtaine de cabanes supplémentaires, supposées ou identifiées sur les clichés aériens, non pas été visitées et repérées par manque de temps. Elles se situent principalement dans les quartiers du Farnet et de Pramesclat.
La qualité de conservation architecturale du corpus communal est mauvaise puisque plus des trois-quart des édicules repérés sont mentionnés comme « ruinés ». Les cabanes « préservées » sont celles qui ont été sélectionnées pour étude.
II. Caractères morphologiques
Localisation et contexte historique
Localisation
Les cabanes repérées sont toutes isolées, et elles sont dispersées sur l'ensemble du territoire communal.
Vue de situation d'une cabane, quartier de Croix Blanche. Vue de situation d'une cabane, quartier de l'Adret de Lachau.
Cependant, quelques quartiers sont plus concernés. Ainsi, le secteur de la Montagne d'Albion concentre plus de la moitié du corpus. Le secteur de Combe Grenier – la Crau – Adret de Lachau regroupe un quart des cabanes. Le reste est situé dans la vallée de l'Anary. Hormis les cabanes du quartier de Banastier, qui appartiennent à l'ensemble de la Montagne d'Albion, une seule autre cabane a été repérée sur le bassin versant de la Méouge, à Massugeaye.
Les cabanes sont presque toutes situées à proximité immédiates de parcelles anciennement mentionnées comme « terre labourable ». Elles correspondent donc à des constructions bâties par des cultivateurs, pour servir lors des travaux agricoles. Elles ont ensuite été réutilisée par les bergers, lorsque ces secteurs agricoles ont été abandonnés au profit du pâturage extensif.
Vue d'ensemble d'une grande cabane à trois pièces, quartier du Farnet. Vue de situation d'une grande cabane à trois pièces, quartier du Seuil.
Contexte historique
Aucune cabane ne possède une date portée.
Une cabane, située au Génisseau, pourrait correspondre à une guérite de la « ligne du Jabron », barrière sanitaire mise en place lors de l'épidémie de peste de 1720 (cf dossier IA26000493) ; c'est la seule a être couverte par une voûte clavée.
Cabane au quartier du Génisseau.
Les autres cabanes ne semblent pas antérieures à la fin du 18e siècle pour les plus anciennes, et datent surtout du 19e siècle.
A partir de la fin du 19e siècle, certaines cabanes ont été remployées, voir remaniées, par des bergers. Ce changement d'affectation correspond à une période de déprise agricole, où les terres agricoles les plus éloignées sont uniquement utilisées comme zone de pâturage extensif.
Implantation et composition d'ensemble
Implantation
55 % des cabanes sont implantées perpendiculairement au sens de la pente, et 40 % sont parallèles au sens de la pente. Seules deux cabanes sont installées en terrain plat.
Près d'un tiers des cabanes sont incluses dans un pierrier, ou à son extrémité. 40 % sont situées à proximité d'un ou plusieurs pierriers. Plusieurs cabanes sont incluses dans un mur de soutènement.
Cabane installée dans un pierrier, quartier de Fontanille. Cabane incluse dans un mur de soutènement, quartier de Font Nouvelle.
Espaces libres
La présence d'un enclos a été notée pour seulement 12 % du corpus. Dans ce cas, l'enclos est attenant, et il est de forme rectangulaire.
Enclos devant une cabane, quartier du Col des Sires.
Matériaux et mise en œuvre
Maçonnerie
Toutes les cabanes sont construites en maçonnerie de pierre sèche, avec des moellons ou des lauzes calcaires. Quatre cabanes possèdent des angles arrondis. Dans les autres cas, les chaînes d'angle sont en moellons ou en lauzes.
Maçonnerie d'une cabane, quartier de Fontanille. Pignon d'une cabane, quartier de Banastier. Maçonnerie de la grande cabane du Seuil.
Ouvertures
Les portes des cabanes possèdent généralement une forme rectangulaire, avec une embrasure droite. Cependant, une ouverture ébrasée a été notée pour 15 % du corpus, qui correspond dans presque tous les cas à une forme de porte trapézoïdale. Dans un seul cas (Massugeaye, ), la porte est en arc de moellons clavés. Les linteaux conservés sont en moellons ou en lauzes, plus rarement en bois.
Porte d'une cabane, quartier de Croix Blanche. Porte de la grande cabane du Seuil. Linteaux de la porte d'une cabane, quartier de Banastier.
Porte d'une cabane, quartier de Font Nouvelle.Arcs clavées de la porte d'une cabane, quartier de Massugeaye.
Voûtes et couvrements
Dans près de la moitié des cas, les cabanes sont, ou étaient, couvertes par une charpente simple à pannes.
Pour un tiers du corpus, le couvrement est réalisé par une coupole en encorbellement. Deux cas de coupole clavée ont été repérés, ainsi qu'un cas de voûte clavée en berceau segmentaire.
Encorbellement de la coupole d'une cabane, quartier de Croix Blanche. Coupole encorbellée, cabane au quartier de Massugeaye.
Aménagements intérieurs
Lorsqu'il a été possible d'observer le sol d'origine, celui-ci est toujours en terre.
La présence d'une niche, aménagée dans un mur, a été relevée pour 15 % du corpus. Dans le cas de trois grandes cabanes à plusieurs pièces, la présence de cloisons en pierre sèche a été observée. Dans deux cabanes, une cheminée est existante.
On note que des graffitis ont été repérés dans seulement trois cabanes.
Cheminée dans une cabane, quartier du Col des Sires. Réduit dans le mur d'une cabane, quartier de Banastier.
Structure
91 % des cabanes possèdent un unique étage de soubassement. Une seule cabane possède un étage de comble supplémentaire.
Deux cabanes sont installées en rez-de-chaussée.
63 % des cabanes possèdent un plan de masse extérieure de forme rectangulaire. Dans 90 % des cas, le plan intérieur est alors rectangulaire. Cependant, dans un cas, il est carré, et dans un autre cas, il est ovale.
15 % des cabanes possèdent un plan de masse extérieure de forme ovale. Dans 60 % des cas, le plan intérieur est alors ovale. Cependant, dans un cas, il est carré, et dans un autre cas, il est circulaire.
9 % des cabanes possèdent un plan de masse extérieure de forme circulaire. Dans tous les cas, le plan intérieur est alors circulaire.
Enfin, deux cabanes possèdent un plan de masse extérieure de forme carrée, avec un plan intérieur de même forme.
Vue de volume d'une cabane, quartier du Col des Sires. Vue de volume d'une cabane, quartier du Col de Lérol. Vue de volume d'une cabane, quartier de Font Nouvelle.
Toit et couverture
Forme du toit
A cause de la ruine trop avancée de certaines cabanes, la forme du toit n'a pu être renseignée que pour 80 % du corpus.
Le toit est à longs pans pour 41 % du corpus restant, et il est en dôme pour 37 %. 11 % possèdent un toit à un pan, et également 11 % possèdent un toit plat.
Couverture
Pour 60 % des cabanes, la couverture est, ou était, en lauze calcaire. Pour 40 % des cabanes, la couverture est, ou était, en chaume (ce matériaux étant périssable, sa présence a pu être supposée en l'absence de débris de tout autre matériaux de couverture). Dans plusieurs cas, l'association de la lauze et du chaume a pu être supposée.
On note l'emploi de la tuile creuse pour seulement 15 % du corpus, et ces cas sont tous situés dans la vallée de l'Anary. Ponctuellement, la couverture est en tôle ; il s'agit alors d'une réfection assez récente.
Vue de volume d'une cabane, quartier de Banastier. Vue de volume d'une cabane, quartier de la Doude. Arrachement de la coupole en encorbellement d'une cabane, quartier du Farnet.
III. Typologie
En raison du mauvais état de conservation des cabanes, aucune typologie stricte n'a pu être mise en place.
Par ailleurs, il est important de signaler que les cabanes en pierre sèche sont très nombreuses sur les communes situées au sud de Barret-de-lioure (Ferrassières, Les Omergues, Le Revest-du-Bion, etc.), où elles sont d'ailleurs conservées en meilleur état. Les cabanes de Barret-de-Lioure appartiennent ainsi à un ensemble qui semble couvrir l'ensemble du plateau d'Albion et de la Montagne de Lure, et elles sont ici à l'extrémité septentrionale de leur zone de diffusion.
Une typologie de ces cabanes ne pourra être établie qu'après étude des exemplaires mieux conservés présents sur les communes du Vaucluse et des Alpes-de-Haute-Provence.