Dès l'origine du projet de construction d'un nouveau lycée, le Conseil municipal décide de placer la chapelle sur un îlot séparé. L'emplacement est choisi le 2 décembre 1882 : il s'agit de l´îlot n° 20 du plan d'alignement, d'une superficie de 5 à 600 mètres carrés, situé à l´angle nord-ouest du prolongement de la rue Lesdiguières et du boulevard 97, futur boulevard Gambetta. Le terrain, cédé à la Ville par l’Etat, faisait partie des anciennes fortifications de Grenoble, déclassées suivant acte du 25 mars 1885 (AD Isère, 21 T 380).
Emile Vaudremer présente les plans et l´avant-projet le 24 février 1883, puis les plans définitifs le 29 mars 1883. Respectant le vœu de la municipalité de dissocier espace religieux et espace public d'enseignement, il a élaboré deux plans distincts, un pour le lycée, un autre pour la chapelle (AC Grenoble, 2 Fi 294).
La date précise de construction n´est pas connue. Elle semble avoir été édifiée après l´ouverture du lycée en 1887, et a été financée, prix du terrain compris, pour moitié par l'Etat et pour moitié par la Ville (Arch. mun. Grenoble : extrait du registre des délibérations du Conseil municipal, séance du 9 juillet 1909, 4 M 73). Les travaux ne sont complètement achevés qu´en 1898, avec la fermeture du mur de clôture (AC Grenoble, 4 M 73, carton 13, n°4).
Malcommode d´accès, car située du côté opposé à l'entrée principale du lycée sur le cours Lafontaine, la chapelle n´a servi qu´une quinzaine d´années. L'extension du quartier de Bonne et la pression immobilière ont très vite raison du bâtiment ; elle disparaît d'autant plus facilement que sa valeur architecturale est alors jugée médiocre en regard des nouvelles constructions qui l'entourent : " De belles constructions modernes se sont érigées dans le voisinage de la chapelle, et celle ci est maintenant un obstacle à l’achèvement de ce quartier. Ni l’art ni l’esthétique ne sont d’ailleurs intéressés à la conservation de cet édifice, car c’est un monument sans caractère dont la pauvreté architecturale est encore mieux accusée par les habitations élégantes qui l’entourent " (AC Grenoble, 4 M 73 : extrait du registres des délibérations du Conseil municipal, séance du 9 juillet 1909). Mais c´est surtout un argument économique qui a pesé en faveur de sa démolition : le produit de la vente devait permettre de financer d'importants travaux de réfection des toitures du lycée et de l'Université, pour lesquels l'État refusait à la Ville toute subvention.
La désaffectation de la chapelle devait initialement être compensée par l'aménagement d'une salle pour le service religieux à l'intérieur de l'établissement scolaire (AC Grenoble, 4 M 73). Dans un premier temps, il est envisagé de l'implanter au 1er étage du bâtiment des réfectoires (aile ouest de la Cour des cuisines), dans un dortoir inutilisé en raison de la baisse des effectifs de l'internat. Le 1er juin 1908, une lettre de l'administration du lycée adressée à l'architecte de la Ville précise la nature des aménagements à réaliser. Une partie du mobilier doit être remployée : les tableaux, l'autel et sa garniture, l'harmonium. Une autre est à créer : la chaire, la barrière de communion, des chaises et prie-Dieu fixes. Un devis accompagné d'un plan est joint à ce courrier (AC Grenoble, 4 M 73).
Le projet trop coûteux, n'est pas validé. Aussi l'administration envisage-t-elle dans un second temps d'installer la salle de culte de plain-pied, dans le préau des Grands, en annexant une salle d'escrime pour y placer la sacristie. Mais cette nouvelle proposition n'aboutit pas non plus, en raison d'une situation budgétaire très contrainte. Par ailleurs, le ministère de l'Instruction publique juge le projet, qui va empiéter sur les espaces existants, d'autant plus inutile que depuis la loi de séparation de 1905 les plans des nouveaux collèges et lycées ne comprennent plus de chapelle (Lettre du ministre de l'Instruction publique au recteur de l'académie, 11 mai 1909 ; AD Isère, 21 T 380)
Le destin de la chapelle est scellé en 1909. Le 9 juillet, le Conseil municipal décide l´aliénation du terrain et la partition en deux lots de la parcelle sur laquelle s´élève la chapelle (parcelle n°686 de la Section II ; voir ill. IVR84202139800323NUCA). Cette partition doit permettre d'en tirer un meilleur prix lors de son adjudication, l'ensemble devant être mis aux enchères au prix de 70 francs le mètre carré pour le lot en façade sur le boulevard Gambetta, 55 pour le lot en façade sur la rue Aubert-Dubayet (AC Grenoble, 4 M 73 : extrait du registres des délibérations du Conseil municipal, séance du 9 juillet 1909). Le 10 août, le Ministère de l'Instruction publique décide sa désaffectation, le 8 septembre, un plan de lotissement est réalisé pour le compte de la Ville, le 15 octobre enfin, le recteur de l´Académie remet les clefs de la chapelle à la Ville. La vente du terrain, réalisée quelques mois plus tard, est adjugée au profit de M. Guigné pour le lot 1, de MM. Hennequin et Barbier pour le lot 2. Elle rapporte 121 241 francs, soit le double de l'estimation initiale (60 000 francs) (AC Grenoble, 4 M 73 : procès-verbal d'adjudication, vente enregistrée par Maître Maguet, notaire à Grenoble, le 5 mars 1910). Le ministère impose également que l'édifice soit démoli (AC Grenoble, 4 M 73 : extrait du registres des délibérations du Conseil municipal, séance du 10 décembre 1909). Le cahier des charges impose en outre aux adjudicataires (AC Grenoble, 4 M 73) de réaliser des "constructions convenables" dans un délai de dix ans à compter de la date d'acquisition.
Chercheuse au service de l'Inventaire général du patrimoine culturel d'Auvergne-Rhône-Alpes (2006-...)