Dossier d’œuvre architecture IA63002687 | Réalisé par
Laurent Christophe (Rédacteur)
Laurent Christophe

Historien de l'architecture. Prestataire pour le service régional de l'Inventaire Auvergne, puis Auvergne-Rhône-Alpes, en 2014-2015 puis 2021-

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  • opération ponctuelle, Patrimoine XXe siècle
La succursale de la Banque de France à Clermont-Ferrand
Œuvre monographiée
Auteur
Copyright
  • © Région Auvergne-Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Auvergne-Rhône-Alpes
  • Commune Clermont-Ferrand
  • Adresse 15 cours Sablon , 17 cours Sablon
  • Cadastre 2021 HT 1 Références cadastrales complètes : HT1, HT2, HT14

Résumé chronologique

1841 : ouverture d’une succursale de la Banque de France à Clermont-Ferrand, dans un immeuble existant situé 24 rue Blaise-Pascal

1867-1868 : construction d’une succursale de la Banque de France à l’angle du cours Sablon et de l’avenue de Morny (actuelle avenue Carnot) ; architecte Agis-Léon Ledru (1816-1885)

1912 : construction d’une extension de la succursale avenue Carnot ; architecte Barthélémy Sauzet (1859-1920)

1971-1976 : destruction des bâtiments existants et construction d’une nouvelle succursale ; Atelier d’études architecturales Lagneau-Weil-Dimitrijevic

Historique

Dans sa séance du 3 mars 1841, la Chambre de commerce de Clermont-Ferrand appela de ses vœux la création d’un comptoir d’escompte de la Banque de France dans la capitale auvergnate. Soutenue par le Conseil général et le préfet du Puy-de-Dôme, l’initiative s’inséra dans un plan de développement de la Banque de France en province. Le 21 août 1841, la création du comptoir clermontois fut autorisée par une ordonnance royale. Le 21 décembre suivant, l’établissement ouvrit dans des locaux loués au n° 24 de la rue Blaise-Pascal, au cœur du centre ancien[1].

Après des débuts difficiles, l’établissement prospéra sous le Second Empire. Le 18 novembre 1866, la Banque de France fit l’acquisition d’un terrain afin d’y bâtir un nouvel hôtel pour sa succursale[2]. Il s’agissait d’un jardin qui avait été jusqu’en 1790 une partie du couvent des capucins[3]. Il était situé un peu à l’est du centre ville, à l’angle du cours Sablon et de l’avenue de Morny (actuelle avenue Carnot, fig. 1 à 4).

L’emplacement choisi, correspondant aujourd’hui au n° 15 cours Sablon, présentait bien des avantages. Le cours Sablon, créé au début du XIXe siècle selon une direction nord-sud, était une large voie agrémentée d’alignements d’arbres. La bourgeoisie clermontoise le fréquentait depuis sa création comme lieu de promenade. Peu à peu, à partir des années 1840, des demeures cossues furent construites sur ses abords. Croisant le cours Sablon à angle droit, l’avenue de Morny avait été percée à partir de 1853. Elle permettait d’accéder vers l’ouest au cœur de Clermont, vers l’est à la gare ferroviaire. Au carrefour des deux voies se trouvait depuis 1854 la fontaine d’Amboise (œuvre datant de 1515 et plusieurs fois déplacée[4]). Le site offrait un autre « avantage », celui d’être proche de plusieurs casernes : le quartier Gribeauval (en bas de l’avenue de Morny, à l’emplacement actuel de la « faculté Carnot » et du lycée Blaise-Pascal), la caserne d’Estaing (actuelle École supérieure de commerce boulevard Trudaine), la caserne de gendarmerie (aujourd’hui une annexe du Conseil départemental du Puy-de-Dôme, 2 cours Sablon). La nouvelle succursale n’allait donc pas manquer de protection contre les éventuels cambriolages ou mouvements sociaux !

Agis-Léon Ledru, par sa fonction d’architecte départemental du Puy-de-Dôme, eut la charge de concevoir le nouvel établissement bancaire. Le chantier fut rapidement mené après l’obtention de l’autorisation de construire (24 août 1867). En août 1868, le gros-œuvre était achevé, mais des travaux de finition se déroulèrent semble-il jusqu’en 1871[5]. Implanté un peu en retrait du cours Sablon, derrière un mur de clôture percé d’un portail à porte cochère, le bâtiment possédait un sous-sol, un rez-de-chaussée, deux étages carrés et un étage de comble. Avec ses élévations symétriques, son toit brisé couvert d’ardoises et l’emploi abondant de la pierre de taille, il s’apparentait à un hôtel particulier sobrement monumental (fig. 5 à 14).

En 1912, l’accroissement de l’activité de la succursale conduisit à la construction d’une extension à l’arrière du bâtiment conçu par Ledru[6]. Cette extension fut dessinée par l’architecte départemental Barthélémy Sauzet. Elle comportait un sous-sol semi-enterré et un rez-de-chaussée surélevé entourant une cour intérieure. Avec son toit-terrasse dissimulé par un bandeau d’attique, elle formait un volume bas et horizontal qui demeurait soumis à la construction existante (fig. 8 et 9, 11 et 14).

« À la fin des années 1960, un réaménagement complet des installations [s’imposa], d’autant que la vétusté et la division des locaux administratifs rendaient fort incommodes les conditions d’exploitation. Surtout, l’immeuble qui avait été conçu pour abriter une trentaine d’agents en rassemblait alors plus du double »[7].

Cette volonté de redéploiement des services conduisit à envisager la destruction des locaux existants afin de pouvoir édifier à leur place une nouvelle succursale. Pour accroître la surface foncière disponible, la banque de France acheta les terrains et immeubles mitoyens situés à l’est de la parcelle lui appartenant (n° 24 bis avenue Carnot). De même, elle inclut dans l’opération les immeubles qu’elle possédait et occupait partiellement aux n° 17 et 21 cours Sablon (au sud de l’hôtel bancaire existant).

L’agence parisienne ATEA (Atelier d’études architecturales), dirigée par Guy Lagneau et Michel Weil, reçut la commande d’un ensemble mixte, avec des locaux administratifs, des salles de coffres-forts, des logements de fonction, des logements locatifs, un parking semi-souterrain (fig. 15 à 21). Le permis de construire du nouveau bâtiment fut accordé le 8 octobre 1971[8]. Afin que l’activité de la banque ne soit pas interrompue par les travaux, l’on décida de conduire le chantier en sept phases consécutives. Ainsi, certains locaux purent être occupés avant l’achèvement de tout l’édifice. La première phase débuta le 3 octobre 1972 par la démolition des bâtiments du 24 avenue Carnot. Le bâtiment d’origine et son extension furent détruits vers 1977. La mise en service complète de la nouvelle succursale eut lieu le 22 octobre 1979 [9].

Notes

[1] L’Ami de la Charte (journal périodique), n° 104, 22e année, mercredi 21 décembre 1841. Anonyme, 150e anniversaire, 1841-1991, Banque de France, succursale de Clermont-Ferrand, brochure, 1991, 17 pages.

[2] Acquisition, devant le notaire clermontois Fabre, du terrain qui appartenait à César Tabariez, capitaine à la retraite, chevalier de la Légion d’honneur, et à son épouse.

[3] Les capucins s’installèrent sur ce site en 1609. Lors de la Révolution française, le couvent fut vendu le 17 mars 1791 comme Bien national de 1re catégorie. Le jardin acquis par la Banque de France servit également de cimetière de 1784 à 1814.

[4] Elle fut à nouveau démontée en 1962 pour rejoindre son emplacement actuel, la place de la Poterne, où elle se trouve isolée dans un espace ouvert bien trop vaste pour elle. À l’origine, elle ornait la place Derrière Clermont, presque en face du portail sud de la cathédrale.

[5] Archives municipales de Clermont-Ferrand, série O, arrêtés d’alignement, boîte XXI, arrêté n° 10 610 présenté le 10 août 1867 par M. Verron, directeur de la succursale de la Banque de France, accordé le 24 août 1867. Procès-verbal de récolement attestant du respect des règles d’urbanisme par la construction daté du 17 août 1868. Aucun dessin ou plan n’est conservé avec l’arrêté. Un courrier postérieur (1875) mentionne « M. Ledru, architecte de la Banque de France ». Dans la nécrologie d’Agis-Léon Ledru publiée par la revue XXXXX (p. 451-452), il est indiqué qu’il fut notamment l’architecte de « l’hôtel de la Banque de France à Clermont, celui d’Aubusson, celui d’Aurillac ». Dans le dossier pour sa nomination au rang de Chevalier de la Légion d’honneur, il est indiqué qu’Agis-Léon Ledru a été notamment architecte de « trois hôtels de succursale de la Banque de France » (Archives nationales, LH/1543/46, base Léonore, notice n° L1543046).

[6] Archives municipales de Clermont-Ferrand, série O, boîte n° 201-14A à 270-14A, autorisation de construire n° 224-14A, demandée le 2 août 1912, accordée le 12 août 1912.

[7] Anonyme, 150e anniversaire, 1841-1991, Banque de France, succursale de Clermont-Ferrand, brochure, 1991, 17 pages.

[8] Archives municipales de Clermont-Ferrand, 2001 W 296, permis de construire n° 9274 accordé le 8 octobre 1971.

[9] Anonyme, 150e anniversaire, 1841-1991, Banque de France, succursale de Clermont-Ferrand, brochure, 1991, 17 pages.

  • Période(s)
    • Principale : 3e quart 20e siècle , daté par source
  • Dates
    • 1971, daté par source
    • 1976, daté par source
  • Auteur(s)
    • Auteur :
      Lagneau Guy
      Lagneau Guy

      Guy Lagneau (Paris, 4e, 22 septembre 1915 - Paris, 6e, 16 décembre 1996) étudie l’architecture à l’École nationale supérieure des Beaux-arts de Paris à partir de 1932. Il est diplômé architecte le 15 novembre 1938.

      Actif en France et à l’étranger jusqu’en 1985, Guy Lagneau fonde en 1952, avec Michel Weil (1914-2001) et Jean Dimitrijevic (1926-2010), l’atelier LWD, nommé par la suite ATEA (Atelier d’études architecturales), lequel sera complété par la Société d’études techniques d’aménagements planifiés (SETAP).

      D'après des sources restant à vérifier, outre la succursale de la Banque de France à Clermont-Ferrand, l’atelier ATEA a conçu dans les années 1975-1985 les succursales de Sens (Yonne), de Créteil et de Vincennes (Val-de-Marne), ainsi que le Centre administratif de la Banque de France à Noisiel (Seine-et-Marne).

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      architecte attribution par source
    • Auteur :
      Weil Michel
      Weil Michel

      Michel Weil (Paris, 9e, 30 ou 31 août 1914 - 21 juillet 2001) a étudié l’architecture à l’École nationale supérieure des Beaux-arts de Paris à partir de 1934. Il a obtenu le diplôme d'architecte DPLG le 18 novembre 1941.

      Michel Weil a fondé en 1952, avec Guy Lagneau (1915-1996) et Jean Dimitrijevic (1926-2010), l’atelier LWD, nommé par la suite ATEA (Atelier d’études architecturales), lequel sera complété par la Société d’études techniques d’aménagements planifiés (SETAP).

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    • Auteur :
      Dimitrijecvic Jean
      Dimitrijecvic Jean

      Jean Dimitrijevic (Paris, 10 juillet 1926 - 14 février 2010) a étudié l’architecture à l’École nationale supérieure des Beaux-arts de Paris à partir de 1947. Il a obtenu le diplôme d'architecte DPLG le 6 mars 1957.

      Jean Dimitrijevic a fondé en 1952, avec Guy Lagneau (1915-1996) et Michel Weil (1914-2001), l’atelier LWD, nommé par la suite ATEA (Atelier d’études architecturales), lequel sera complété par la Société d’études techniques d’aménagements planifiés (SETAP).

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L’insertion de la nouvelle succursale dans le site

Le dossier descriptif rédigé par l’agence ATEA pour l’obtention du permis de construire comportait une justification du parti urbain et architectural adopté. « Les bâtiments qui entourent le carrefour [Sablon-Carnot] sont d’une qualité architecturale très variée au point de vue gabarit ; un immeuble nettement plus élevé occupe l’angle opposé à la Banque, 13 cours Sablon. Les architectes se sont efforcés de tenir compte de la composition existante. Ils ont conçu en face de l’immeuble dominant 13 cours Sablon, un espace libre aménagé et planté qui laisse un prospect [1] plus important et assure un accès plus généreux devant la banque qui est le bâtiment le plus bas du futur ensemble. La continuité d’alignement sur le cours Sablon et l’avenue Carnot a été interrompue tout en assurant une transition par la constructions de deux bloc contigus aux immeubles voisins et dont les façades s’ouvrent sur deux côtés. Le bâtiment « banque » est ainsi libéré des contraintes des constructions existantes et peut devenir un élément important de la composition générale du carrefour » [2].

Les caractéristiques physiques du site (fig. 22 à 26) n’avaient pas échappé aux architectes de l’agence ATEA. Elles comprenaient la grande largeur du cours Sablon, la présence d’arbres d’alignement, l’intersection des deux voies formant un vaste dégagement, la vue plongeante en arrivant par l’ouest (par l’avenue Carnot), le relief du site (en pente vers l’est et le sud). Les immeubles placés au carrefour étaient effectivement de formes très variées, mais aussi d’époques de construction différentes. Aujourd’hui encore, au nord-ouest du carrefour se trouve l’ancienne gendarmerie (fig. 23, 1821-1823, Louis-Charles-François Ledru architecte), au sud-ouest la Caisse d’épargne (fig. 24, 1905-1907, Emmanuel Poncelet architecte) et l’immeuble d’habitation n° 8 cours Sablon (1933, Ernest Pincot architecte). En face, au sud-est, l’immeuble d’habitation du n° 19 cours Sablon (fig. 25, 1911-1913, Guillaume Maschat architecte) possède un passage couvert qui débouche dans une cour intérieure où des vestiges du couvent des capucins sont encore visibles. Enfin, à l’angle nord-est du carrefour et le long de l’avenue Carnot (n° 5 à 9 bis) s’élève un immeuble de logements (fig. 26, 1953-1955, Julien Arnaud architecte). Il est composé d’un corps de bâtiment « en barre » et d’une tour de neuf étages qui effectivement domine le carrefour. C’est à cette tour (n° 13 cours Sablon) que fait référence la notice descriptive rédigée par ATEA.

Le parti architectural et urbain imaginé par l’agence ATEA pour la succursale est l’un des points forts de cette réalisation (fig. 22 à 26). Plutôt que de dresser un volume haut pour tenter de rivaliser avec la tour de logement, les architectes ont choisi d’apporter à celle-ci un contrepoint. En face de la tour, le volume bas abritant l’essentiel des locaux administratifs de la banque marque l’angle tout en préservant une vaste ouverture vers le ciel. Le rapport entre les deux volumes est contrasté mais harmonieux. Le parti d’un volume haut pour abriter tous les locaux de la banque, une sorte de tour répondant à celle existante, aurait sans aucun doute créé un « effet de porte » de part et d’autre de l’avenue Carnot. Il aurait renforcé jusqu’à l’excès l’effet d’écrasement que procurent souvent les immeubles de grande hauteur, effet accentué s’ils sont en outre très proches les uns des autres.

L’autre avantage de la composition dessinée par les architectes d’ATEA est le raccordement à l’existant. À l’est et au sud du corps de bâtiment dévolu aux activités administratives s’élèvent deux corps de bâtiments abritant principalement des logements. Comme l’indique la notice descriptive précitée, ces deux « blocs » sont contigus aux immeubles voisins dont ils reprennent le gabarit (fig. 28 et 32). Ainsi, par sa composition d’ensemble, la succursale de la Banque de France s’avère animée, suffisamment visible pour affirmer sa présence, mais aussi respectueuse des alignements urbains, des perspectives, des bâtiments voisins. En résumé, son insertion dans le site est particulièrement intelligente et réussie.

L’architecture de la nouvelle succursale

La succursale s’élève sur une parcelle globalement rectangulaire, en pente vers l’est[3]. Son plan au sol est de forme en « L » (fig. 15 à 21). Une cour intérieure occupe une petite partie de la parcelle, dans l’angle sud-est. Au-dessus d’un sous-sol partiel, un étage de soubassement abrite notamment les salles des coffres, les serres[4] et un parking semi-souterrain accessible par une large entrée située avenue Carnot. Au niveau du rez-de-chaussée surélevé naissent trois corps de bâtiment, séparés les uns des autres par une terrasse commune et des terrasses privatives. Le premier corps, à l’angle du cours Sablon et de l’avenue Carnot, est de plan presque carré. Ses deux niveaux (rez-de-chaussée et étage-carré) sont dévolus au hall d’accueil du public et aux locaux administratifs. Un large perron lui donne accès depuis le cours Sablon (n° 15). Le deuxième corps de bâtiment se trouve au sud du premier. De plan rectangulaire, il comprend un rez-de-chaussée et quatre étages-carrés. Il est occupé principalement par trois logements de fonction, pour le gardien, le caissier et le directeur de la succursale, auxquels s’ajoutent deux chambres de service et un « studio de passage » (sic). Une entrée piétonne le dessert (n° 17 cours Sablon). Le troisième corps de bâtiment, à l’est du premier, possède aussi une entrée piétonne indépendante (n° 24 avenue Carnot). Ses quatre étages-carrés sont divisés en six appartements destinés à des employés de la succursale [5].

Les corps de bâtiment présentent une volumétrie parallélépipédique (fig. 22). Leur couverture par des toits-terrasses et l’absence de corniches accentuent leur sobriété géométrique. Le gros-œuvre est une ossature en béton armé composée de piliers, poutres et dalles, complétée par des murs de soutènement et porteurs également en béton armé. Trois autres matériaux principaux s’affirment sur les façades : pour le revêtement des parois de fines dalles de marbre blanc veiné de gris et des tôles d’aluminium gris clair, pour la fermeture des baies le verre fumé[6] (dont couleur brune s’accorde avec celle des volets roulants et des huisseries métalliques).

La composition des élévations relève d’un savant jeu de pleins et de vides, de rapports de volumes et de proportions, de plans et de lignes, d’avancées et de renfoncements, de contrastes entre le clair et le sombre, de pénétration du dedans et du dehors (fig. 22 à 32).

L’étage de soubassement forme une sorte de piédestal sur lequel s’élèvent les autres volumes de l’édifice. Du côté du cours Sablon et de l’avenue Carnot, il est souligné horizontalement par une mince baie d’aération qui ouvre entre un revêtement en marbre (au-dessous) et un revêtement en aluminium (au-dessus). Des mêmes côtés, il est partiellement couvert par des jardinières et de grands bacs à fleurs. Ainsi, au-dessus de ce piédestal, le rez-de-chaussée du premier corps de bâtiment se trouve en retrait par rapport à l’espace public. Ce retrait contribue à l’ouverture spatiale du carrefour mais aussi à la protection de la banque. Il permet aussi une certaine interpénétration des limites de la succursale et de l’espace public.

En façades ouest, nord et est du premier corps de bâtiment, une fenêtre-bandeau éclaire le rez-de-chaussée presque sans interruption (car les poteaux de l’ossature sont reportés à l’intérieur du corps de bâtiment). Au-dessus, l’étage est un peu en encorbellement par rapport au rez-de-chaussée. Une longue fenêtre bandeau le perce également au nord et à l’ouest. Mais celle-ci ouvre entre deux larges bandeaux d’aluminium qui redonnent de la présence au volume de l’étage. La composition produit donc un effet de pleins (l’étage de soubassement et l’étage-carré) et de creux (le rez-de-chaussée). Elle introduit aussi une inversion partielle de la perception du rôle assumé par les parties qui portent et celles qui sont portées (le volume d’aspect plus lourd de l’étage semble reposer sur le volume du rez-de-chaussée essentiellement fermé par du verre censé être fragile).

L’animation créée par les pleins, les vides, les avancées et les renfoncements, est complétée par un dialogue entre des lignes et des pans. Ainsi, en façade principale (ouest) du corps de bâtiment principal, les lignes horizontales des baies de l’étage sont interrompues par un pan de mur revêtu de marbre et sur lequel se détache l’inscription « Banque de France ». De même, à droite de l’entrée principale, se trouve un autre pan de mur revêtu de marbre qui contraste avec la fenêtre-bandeau.

Les élévations des corps de bâtiment méridional et oriental reprennent des éléments de composition similaires. Par exemple, les façades ouest de ces deux corps comportent essentiellement des fenêtres-bandeaux alternant avec des bandeaux horizontaux revêtus d’aluminium. Les façades nord sont animées par des travées de baies et par des pans de murs aveugles parés de dalles de marbre. Comme pour l’entrée principale du public, les entrées secondaires s’inscrivent dans des renfoncements. La façade ouest du corps de bâtiment sud présente, au quatrième et dernier étage, une terrasse demi-couverte. Là encore, le dispositif imaginé par l’agence ATEA crée du relief, du contraste et de la transparence.

D’un style résolument contemporain, l’architecture de la succursale ne délaisse pas pour autant la question de la représentation. L’emplacement de choix que l’édifice occupe dans l’espace urbain, la composition très élaborée de son ensemble, de ses parties et de ses détails, la qualité des matériaux (spécialement le marbre abondamment employé et parfaitement mis en œuvre) confèrent à l’établissement une expression digne du statut de la Banque de France. La succursale, par sa qualité, renvoie aux deux autres édifices remarquables que cette institution possède dans la région clermontoise : l’imprimerie située à Chamalières et la papeterie implantée à Longues (commune de Vic-le-Comte) [7].

Notes

[1] Prospect (anglais « perspective ») : en urbanisme, règle organisant les volumes de la ville, se fondant sur des considérations comme les ouvertures visuelles ou les apports de lumière dans la rue ; distance minimale à respecter entre deux bâtiments, mais aussi règle définissant les hauteurs des bâtiments (recouvre en ce cas la notion de gabarit).

[2] Archives municipales de Clermont-Ferrand, 2001 W 296, permis de construire n° 9274 accordé le 8 octobre 1971, notice descriptive datée de juin 1971, comportant en couverture le nom de Guy Lagneau.

[3] Description d’après les plans conservés aux archives municipales de Clermont-Ferrand (2001 W 296), datés de juin 1971, et d’un permis de construire modificatif accordé le 31 mai 1977 (deuxième sous-sol à usage d’archives).

[4] Salles fortes pour le stockage des réserves de pièces de monnaie métallique.

[5] La surface des appartements varie fortement suivant le statut social des occupants. L’appartement du directeur se développe sur deux niveaux aux 3e et 4e étages du corps de bâtiment sud. Les quatre plus grands appartements possèdent de quatre à cinq chambres, sans doute pour accueillir des familles nombreuses.

[6] Il s’agit de « verre Parsol bronze », d’après la note descriptive jointe au permis de construire (Archives municipales de Clermont-Ferrand, 2001 W 296)

[7] Bâtis à partir de 1916 et mis en service en 1920-1921, ces deux établissements sont toujours en activité. L’imprimerie de Chamalières (attribuée à l’architecte Raoul Gignoux) relève de la typologie des « châteaux de l’industrie », la papeterie s’inscrit dans le courant rationaliste « régionalisant » des années 1910-1920. À ce jour, aucune étude historique et architecturale ne leur a été consacrée.

  • Murs
    • béton pan de béton armé
  • Plans
    plan régulier en L
  • Étages
    4 étages carrés
  • Couvrements
    • dalle de béton
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • Couvertures
    • terrasse
  • Typologies
    architecture administrative
  • État de conservation
    bon état
  • Précision dimensions

    Dimensions générales : 47,20 m du nord au sud, 63,80 m d’est en ouest (au sol, hors tout), 18,68 m de hauteur maximale (environ). Superficie du terrain : 2 638 m2 ; superficie des planchers hors œuvre : 1 168 m2

  • Statut de la propriété
    propriété d'une personne morale
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler

Etude SRI : architecture XXe - Modernisation et mutations de l’Auvergne, 1945-1985 : dix réalisations architecturales et urbaines emblématiques - Étude pour le Service Patrimoines et Inventaire de la Région Auvergne-Rhône-Alpes - Christophe Laurent, historien du Patrimoine, 3 mars 2021 (suivi scientifique Nadine Halitim-Dubois chercheure Inventaire général)

Annexes

  • Références documentaires
Date(s) d'enquête : 2021; Date(s) de rédaction : 2022
© Région Auvergne-Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel
Laurent Christophe
Laurent Christophe

Historien de l'architecture. Prestataire pour le service régional de l'Inventaire Auvergne, puis Auvergne-Rhône-Alpes, en 2014-2015 puis 2021-

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