Dossier d’œuvre architecture IA69001026 | Réalisé par
  • inventaire topographique, Inventaire de la Ville de Lyon
maison Les Mûres
Œuvre monographiée
Copyright
  • © Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel
  • © Ville de Lyon

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Lyon Urgences
  • Commune Lyon 9e
  • Adresse 61 rue des Docks , 48 rue Joannès-Carret
  • Cadastre 1999 AM 18
  • Dénominations
    maison
  • Appellations
    Les Mûres
  • Parties constituantes non étudiées
    jardin, grotte artificielle, dépendance, lavoir, fontaine
Les Mûres, une maison de campagne dans un quartier industriel

Si vos pas vous mènent dans le quartier de l'Industrie, autrefois sur la commune de Saint-Rambert et aujourd'hui dans le 9e arrondissement de Lyon, ou si vous prenez parfois le train qui passe à Vaise sur la ligne Chalons-Lyon inaugurée en 1854, vous aurez sûrement remarqué une maison aux fenêtres murées depuis quelques mois, mais dont les hauts murs n'arrivent pas à faire oublier le charme qui s'en dégage. Rendez vous au 48 de la rue Joannès-Carret et oubliez la voie de chemin de fer, le passage impitoyable des voitures qui sortent en trombe de Lyon et du dernier aménagement du périphérique : un rang de mûriers donne de l'ombre au chemin de Vaques qui mène de Vaise au bourg de Saint-Rambert-l'Ile-Barbe. Descendez jusqu'à la Saône où une allée de mûriers longe la rivière en lieu et place du quai Paul-Sédaillan. Là se trouve le port des Mûriers, attesté sur le cadastre "napoléonien" levé en 1825.

Quelques pièces d'archives nous permettent d'imaginer les lieux au milieu du XIXe siècle : "Le halage ordinaire ne suit pas habituellement la rive droite de la Saône mais il existe là un très grand mouvement résultant du voisinage de la ville de Lyon, de la gare de Vaise et du commerce de bois". Le port sert en effet d'entrepôt aux marchands de bois de Lyon qui y font stationner leurs radeaux en attendant la route. Un certain "Claude Louis Maîtrejean, résidant aux Mûriers, est autorisé par la Compagnie du Pont de l'Ile Barbe à passer les voyageurs en bateau au port des Mûriers, lieu où autrefois il existait un bac". Il désire donc "placer sur le chemin de contre halage une guérite portative qui aurait pour destination de mettre à couvert la personne chargée du transport des passagers d'une rive à l'autre". Quelques années plus tard, "les frères Pinet, constructeurs de bateaux, demandent l'autorisation d'utiliser pour la réparation des bateaux la rive droite de la Saône au droit de leur chantier au port dit des Muriers".

Mais c'est en 1830 qu'André Marieton, ancien négociant demeurant à Lyon, place Saint-Pierre puis 42 quai de Retz (actuellement quai Jean-Moulin) achète au baron Rambaud, ancien maire de Lyon, "une terre appelée la terre des Mûriers laquelle est confinée à l'orient par la rivière de Saône, à l'occident par le chemin de Saint-Rambert l'Ile-Barbe. Le terrain sur lequel sont plantés les mûriers ainsi que les mûriers eux-mêmes sont expressément compris dans la dite vente". L'on comprend alors que le nom de la maison Les Mûres n'est pas seulement l'évocation poétique d'un site bucolique, mais constitue une référence directe au lieu-dit, à la terre où elle fut construite, et aux arbres qu'elle porte. En cela, ce nom peut être considéré comme une émanation, une extension matérielle du titre de propriété. Ce nom est attesté par des archives en 1865 et 1870.

Entre 1830 et 1847, probablement en 1846, André Marieton élève sur cette terre une maison, lui adjoint des dépendances, y aménage des jardins qui s'étendent jusqu'au chemin de halage longeant la Saône, la rue des Docks n'existant pas encore. L'entrée principale se fait donc par le chemin de Vaques, aujourd'hui rue Joannès-Carret.

Un premier bouleversement vient troubler la quiétude des lieux : la ligne de chemin de fer Chalons-Lyon est tracée et l'exécution immédiate des remblais et déblais du chemin de fer entraînent en 1848 et 1849 une longue série de jugements d'expropriation pour cause d'utilité publique. Si certains de ses voisins doivent reconsidérer totalement leur propriété, il ne s'agit pour André Marieton que de reculer le mur de clôture et démolir une partie de sa grange. Il est autorisé à reconstruire en 1849 l'extrémité de cette dernière suivant le même alignement que le mur de clôture à condition qu'elle ne soit pas couverte de chaume. La configuration actuelle des lieux rue Joannès-Carret remonte à cette période.

Des plaintes récurrentes concernant la palissade qui clôt la propriété à l'est alimentent registres des arrêtés du préfet du Rhône et permis de construire en 1848, 1857, 1861, 1865, 1872 et 1873 en raison des servitudes imposées par le chemin de halage et d'incursions intempestives dans le jardin. La proximité du port des Mûriers n'y est sans doute pas étrangère.

Les jardins semblent s'embellir puisqu'en 1861, M. Marieton (est-ce encore André ou déjà Vincent, agent de change demeurant 24 rue Impériale ?) demande l'autorisation de remplacer par une "balustrade à claire-voie une clôture en planches placée sur le mur de soutènement de la terrasse établie au devant de la propriété".

La maison, probablement réaménagée par Vincent en 1863, et les murs de clôture sont régulièrement entretenus dans les années 1860 mais le quartier de l'Industrie, qui se développe à proximité, va porter un coup fatal aux jardins : la rue des Docks est percée un peu avant 1875 par l'architecte Arguillère et les teinturiers Gillet et Compagnie ; elle est en parfait état de viabilité en 1882, et rompt définitivement l'accès direct à la rivière. "La chaussée est traversée en tous sens par des voies ferrées formant des lignes droites ou courbes de raccordement et par des plaques tournantes. Cet état de chose donne à cette rue un caractère essentiellement industriel. Cette rue est la plus populeuse et la plus fréquentée de tout le quartier". Le morcellement du clos Marieton est alors vite consommé. Un nouveau mur de clôture isole la maison de la rue des Docks.

Sa façade principale sobrement ordonnancée sur cinq travées, les quatre pièces "nobles" qui s'ouvraient jusque-là sur les jardins et la Saône, et le petit belvédère surmontant la grotte de jardin donnent désormais sur la rue des Docks. La symétrie de la composition est soulignée par un perron formé d'une volée double à montées convergentes qui conduit à l'entrée protégée d'une marquise, tandis que la travée centrale est marquée d'un fronton au premier étage. Un enduit clair et lisse se détache sur un enduit ocre et rugueux pour simuler chaînes d'angle, bandeaux, corniches. Les dépendances (remise et petit logement ?) sont en pisé de mâchefer et le mur de clôture en pisé de terre, pisé de mâchefer et petit moellons de grès. Un lavoir à deux bacs en béton a peut-être remplacé un lavoir plus ancien. Un petit bassin semi-circulaire en pierre recevait l'eau d'une fontaine.

Si la maison se caractérise tant extérieurement qu'intérieurement par son homogénéité, l'intérêt principal des lieux réside désormais dans le jardin drastiquement repensé par le percement de la rue des Docks. Le plan de la ville de Lyon semble faire état en 1847 d'un jardin régulier, mais le dernier quart du XIXe siècle opte pour un jardin paysager. Lierre, grotte de jardin, allées de buis, rosiers donnent consistance et profondeur à un espace restreint, dont le destin fut en peau de chagrin. La maison et son jardin constituent ainsi l'un des rares témoignages, sinon le seul, de ce que pouvait être ce quartier avant son industrialisation et avant le profond remaniement dont il est l'objet depuis quelques années. La Saône ne baigne plus depuis longtemps les jardins du clos Marieton, et les péniches d'Infogrames remplacent désormais les radeaux chargés de bois du petit port des Mûriers.

Véronique Belle, mars 2002

  • Période(s)
    • Principale : 2e quart 19e siècle
    • Principale : 3e quart 19e siècle

En ce qui concerne la maison, un enduit clair et lisse se détache sur un enduit ocre et rugueux pour simuler chaînes d'angle, bandeaux, corniches ; la corniche sous le toit est en bois. Les dépendances (remise et petit logement ?) sont en pisé de mâchefer ; le mur de clôture est en pisé de terre, pisé de mâchefer et petits moellons de grès.

  • Murs
    • enduit
  • Toits
    tuile plate mécanique
  • Étages
    sous-sol, rez-de-chaussée surélevé, 1 étage carré
  • Élévations extérieures
    élévation ordonnancée, jardin de niveau
  • Couvertures
    • toit à deux pans
    • croupe
  • Escaliers
    • escalier dans-oeuvre : escalier tournant à retours avec jour en charpente, suspendu
  • État de conservation
    bon état, menacé
  • Statut de la propriété
    propriété publique
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Éléments remarquables
    jardin d'agrément

Propriété privée puis propriété de la COURLY, qui dépose un permis de démolir en juin 2001 En août 2001, les cheminées sont volées.

Documents d'archives

  • AC Lyon. 5 WP 63. Registre présentant les augmentations et diminutions survenues dans les contenances et les revenus portés sur les matrices cadastrales, 1846, 1872

    AC Lyon : 5WP63
  • AC Lyon. 5 WP 187. Le Sr Marietton. Réclamation contre un procès-verbal dressé contre lui par Mr L'adjoint, 18 mai 1847

    AC Lyon : 5WP187
  • AC Lyon. 5 WP 187. Lettre de M. Mariéton à monsieur Roulet, adjoint de la mairie de Saint-Rambert l'Ile Barbe, 3 juin 1848

    AC Lyon : 5WP187
  • AC Lyon. 5 WP 199. Jugement d'expropriation pour cause d'utilité publique, 13 décembre 1848

    AC Lyon : 5WP199
  • AC Lyon. 5 WP 199. Arrêté du préfet du département du Rhône, 15 décembre 1849

    AC Lyon
  • AC Lyon. 5 WP 187. Extrait du registre des arrêtés du préfet du département du Rhône. Pétition d'alignement de Louis Girard, 12 novembre 1853

    AC Lyon
  • AC Lyon. 5 WP 189. Lettre de Jean Béal au maire de Saint-Rambert-l'Ile-Barbe, 9 décembre 1854

    AC Lyon
  • AC Lyon. 5 WP 189. Extrait des registres des arrêtés du préfet du département du Rhône, 22 juillet 1857, 23 novembre 1857, 24 mai 1861

    AC Lyon
  • AC Lyon. 5 WP 189. Lettre de Claude Louis Maîtrejean au maire de Saint-Rambert-l'Ile-Barbe, 4 avril 1861

    AC Lyon
  • AC Lyon. 5 WP 184. Petite voirie, permis de construire, 1809-1890, 1863, 1866, 1870, 1873

    AC Lyon
  • AC Lyon. 5 WP 189. Lettre d'Em. Sabran au maire de Saint-Rambert-l'Ile-Barbe, 7 août 1865

    AC Lyon
  • AC Lyon. 5 WP 189. Préfecture du Rhône. Administration. Travaux publics et voirie. Demande des S.S. Pinet, frères, 19 avril 1866

    AC Lyon
  • AC Lyon. 922 WP 37. Ville de Lyon. Voirie urbaine. Prolongement de la rue des Docks à Vaise. Projet de cession à la Ville de Lyon par M. Arguillière, 13 mai 1875

    AC Lyon
  • AC Lyon. 922 WP 37. Rue des Docks. La Compagnie lyonnaise des magasins généraux et de la gare de Vaise au maire de Lyon, 29 août 1882

    AC Lyon : 922WP37

Documents figurés

  • Saint-Rambert. Section E dite de Vacques/M. Civier, 1825 (AC Lyon)

    AC Lyon
  • Plan topographique de la ville de Lyon et de ses environs / Eugène Rembielinski, ingénieur géographe et graveur, et L. Dignoscyo, ingénieur géographe, 1847 (AC Lyon : 2 S 574)

    AC Lyon : 2S574
  • Plan topographique de la ville de Lyon et de ses environs / Laurent Dignoscyo et Claude Dignoscyo, dressé en 1861 et publié en 1863 (AC Lyon : 5 Ph 35279)

    AC Lyon : 5Ph35279
  • Plan du quartier de Vaise et de l'Industrie/ [vers 1877] (AC Lyon : 5 WP 189)

    AC Lyon : 5WP189
  • Plan topographique de la ville de Lyon/ Dignoscyo père et fils, 1863 révisé en 1883-1884 (Arch. mun. Lyon : 1 S 3 /1)

    AC Lyon : 1 S 3/1
Date(s) d'enquête : 2001; Date(s) de rédaction : 2001
© Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel
© Ville de Lyon
Articulation des dossiers