• enquête thématique régionale, Stations de sports d'hiver
Station de sports d'hiver Arc 2000 - Les Combes
Œuvre repérée
Copyright
  • © Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Les Arcs - Bourg-Saint-Maurice
  • Commune Bourg-Saint-Maurice
  • Lieu-dit Arc 2000
  • Dénominations
    station de sports d'hiver
  • Appellations
    Arc 2000 - Les Combes
  • Parties constituantes non étudiées
    hôtel de voyageurs, galerie marchande, centre de loisirs

Le projet des Arcs 2000

Ce devait être la première station des Arcs réalisée, mais Roger Godino préfère différer la mise en oeuvre du site d´Arc 2000, en l´absence d´une maîtrise de l´échelle du programme. Le premier projet étudié par l´équipe de l´AAM en octobre 1962 pour Roger Godino a pour cadre le site des chalets de l´Arc, sur lequel est prévue une station de 6000 lits environ établi suivant des principes d´aménagement qui seront repris et approfondis lors de la mise en oeuvre du premier site à Arc 1600. Le site de 2000 fait l´objet d´une seconde investigation lorsque Roger Godino, afin de mieux mesurer la dimension du site et des programmes possibles, organise en 1969 une consultation auprès de trois équipes d´architectes qui répondent chacune de manière très différente. L´architecte Bernard de la Tour d´Auvergne associé à Borja Huidobro, propose une implantation à l´amont du lac des Combes, en pied de versant dans un site exposé aux avalanches et en bordure du domaine skiable. La station est rassemblée dans une construction unique, une tour à très forte densité, dont le plan reprend le logo de la station. Jean Prouvé, associé aux architectes Reiko Ayama, Binotto, Bédier et à l´équipe de l´AAM, étudie une station composée d´éléments modulaires simples et répétitifs, disposés en contrebas de la butte du Varet, à la Daille, au milieu des pins arolles. Chaque module est organisé sur un plan circulaire, dans « le but de retrouver une vie communautaire dans un même volume », construits par panneaux plastique sur une structure métallique, comprenant 18 studios disposés autour d´un espace collectif central. La construction de chaque « Corolle » est pensée pour répondre à deux questions soulevées par le choix du site : Comment construire rapidement à une altitude où le temps de chantier est limité avec une technique fiable ? Comment éviter de bouleverser le terrain au couvert fragile à cette altitude, et comment sauvegarder le paysage ? Raisonnement donné par Jean Prouvé : « ...à 2000 m on ne dispose que de quatre mois pour l´édification. Ne devrait-on pas éviter les grands bouleversements de terrain ? La proposition tente de résoudre le problème. L´acier, le bois pour la structure, alors que les matières plastiques pour l´enveloppe doivent procurer l´isolement thermique qui s´impose... » (Jean PROUVÉ. Une architecture pour l´industrie. Zurich : Artémis, 1971). Le décollement du sol doit faciliter l´accès à chaque résidence, en profitant d´un courant tourbillonnant du vent, limitant les dépôts de neige, effet observé autour de chaque rocher isolé en altitude. Séduit par le projet, Roger Godino renonce cependant à sa mise en oeuvre redoutant que le projet ne soit adapté qu´à une clientèle trop ciblée (type UCPA ou jeunes sportifs en collectivités) alors que la station est destinée à une clientèle sportive mais beaucoup plus large. L´équipe des architectes urbanistes de l´AAM avec Charlotte Perriand proposèrent un projet linéaire, ancré en partie supérieure à la butte du Varet laissée libre de toute construction, mais se déployant dans la pente le long de la croupe en direction du site des Dailles, choisi comme site d´accès à la station. Le plan est ouvert et plus « organique » composé de constructions type «immeubles lourds », reprenant des dispositions que l´équipe étudie alors pour le site du Charvet à Arc 1800. Le logement des personnels est prévu à Pré-Saint-Esprit à 1830 m d´altitude, considéré dès l´origine du projet comme la « base arrière » du chantier. Aucune proposition n´est retenue à l´issue de cette consultation. Seule la route d´accès est construite en 1970, poursuivie jusqu´à la butte du Varet s´imposant comme lieu d´implantation de la station d´Arc 2000, au détriment du site de la Daille, 100 m plus bas, repéré lors des études préalables à la station comme un lieu privilégié. Les études reprennent en 1974, confiées par Roger Godino à Bernard Taillefer qui a en charge l´architecture au sein du bureau d´études Cogem intégré à la SMA. Bernard Taillefer est chargé de composer un ensemble de 5000 lits, en fixant l´aménagement de la station autour de la butte du Varet. Il prend argument de la lecture du « Désert des Tartares », roman de Dino Buzzati mettant en scène la vie collective de militaires isolés dans un fort au sommet d´une montagne, pour imaginer la station comme un « fort qui doit se fermer à la tempête et vivre joyeusement ou s´ouvrir au gai soleil...». Bernard Taillefer fabrique une immense maquette en bois à l´échelle du 1/200 (5 mm pour 1 mètre) sur laquelle il place des constructions taillées dans de la « plastiline » (sorte de pâte à modeler), technique de travail lui permettant d´élaborer son projet et de le négocier avec le promoteur Roger Godino. Le projet s´affirme comme la construction d´un paysage nouveau que Bernard Taillefer décrivait très simplement : « la butte regardait le nord... j´ai fait tout racler... du bon matériaux pour la route d´accès... j´ai orienté la butte au sud... l´idée de faire une grande butte avec les parkings dessous... le fort 2000, le donjon, la place du donjon, la place haute, la place basse, la place du ski, l´intérieur, le calme, à l´abri... on sait où ça finit, on sait où ça commence, comme un fort, le site est toujours aimable par beau temps, mais par mauvais temps... ». « Fort les Arcs » est donc composé d´un ensemble de bâtiments mitoyens formant un immeuble continu qui entoure la butte du Varet. Le « chemin de ronde » est limité au pourtour de la butte, sans lien direct avec le domaine skiable. Tous les bâtiments sont reliés entre eux et chacun est conçu comme l´un des contreforts du château, ancré au sol 30 à 40 mètres plus bas, avec ascenseurs publics raccordant le bas et le haut de la butte. La typologie est comparable aux deux autres stations : « immeubles lourds » implantés perpendiculairement ou parallèlement à la pente suivant leurs positions sur le parcours dans les parties nord, est et sud ; immeubles en gradins adossés à la pente ouest, inspirés du Versant Sud à Arc 1600. Sur la butte, le centre de la composition est le lieu d´animation et de vocation commerciale, la place haute dite la « place du donjon », dont la partie plein air est limitée en raison de l´altitude. Elle se prolonge par de vastes espaces clos, orientés au sud, installés sur les parties supérieures des résidences tout en formant une ouverture vers le domaine skiable. Au « pied du fort », une seconde galerie commerciale ouvre sur le front de neige. Les automobiles sont stationnées pour partie en aval de la station dans un élargissement de la route, et pour partie dans des parkings fermés édifiés au pied de la butte, en bordure du lac glaciaire des Combes. Gaston Regairaz imagine de remonter le niveau du lac de 5,00 m environ, permettant la réalisation d´un « anneau » d´eau l´été, de glace l´hiver, d´une circonférence de 400 m environ dimensionné pour des compétitions, proposant ainsi un nouvel équilibre paysager. Faute de garantie du point de vue géologique, le projet ne sera qu´une idée.

Le dossier d´autorisation de la ZAC est mis en forme par l´AAM (Gaston Regairaz) qui reprend les éléments de composition de Bernard Taillefer. Les problèmes de sécurité sont résolus par la présence d´engins à chenille sur place. Les autorisations sont délivrées en 1978 pour une capacité de 5000 lits touristiques environ. La mise en oeuvre butte sur la difficulté du découpage en tranches de réalisations car l´espace de la station est très concentré. Le premier chantier s´ouvre avec la résidence du Varet (mise en service du Club Méditerranée à noël 1979 et noël 1980, Bernard Taillefer avec Charlotte Perriand), gigantesque construction abritant près de 1000 lits touristiques, implantée à l´écart de la butte mais reliée par un passage en pont formant porte d´entrée de la station. Les logements des personnels sont étudiés en 1979 par l´équipe de l´A.A.M. à Pré-Saint-Esprit, projet resté sans suite. Puis l´aménagement de la butte proprement dite s´échelonne sur huit ans jusqu´en 1986. La première réalisation de la résidence de l´Aiguille Rouge (mise en service à noël 1982, 620 lits, Bernard Taillefer avec Charlotte Perriand) est édifiée sur le rebord nord-est, ouverte directement sur le domaine skiable et les pentes de l´Aiguille. Le projet est l´occasion d´une recherche technique associant Jean Prouvé, Charlotte Perriand et Gaston Regairaz. Ils souhaitent des solutions adaptées aux panneaux des façades exposés à des conditions climatiques extrêmes (avec écart thermique très important entre le jour et la nuit), imaginant des « panneaux coques » fabriqués en résine de polyester (technique déjà expérimentée sur le refuge des Évettes en Maurienne en 1971 avec Guy Rey-Millet et Jean Prouvé), proposant ainsi une esthétique différente de celle adoptée à Arc 1600 et à Arc 1800. Ces solutions techniques resteront sans suite et l´architecture de l´Aiguille Rouge sera déclinée à partir des principes de façades déjà adoptés à Arc 1800 et à Arc 2000 pour le Varet. Néanmoins Charlotte Perriand propose pour cet hôtel une déclinaison nouvelle de la cellule des Arcs en concevant une « chambre double » qui offre la possibilité de jumeler deux chambres par un sas d´entrée commun ouvert sur le couloir de la coursive. « J´ai conçu un nouveau modèle de studio qui serait exploité l´été en résidence hôtelière et l´hiver en hôtel. Sa transformation s´opérait par le bloc-cuisine. La table de cuisson et le lave-vaisselle seraient fermés l´hiver pour ne laisser apparaître que les éléments du bar. Il était jumelé à un second studio, relié par un sas d´entrée commun, souplesse qui permettait une extension pour un groupe d´amis ou une famille nombreuse » (Charlotte PERRIAND. Une vie de création, p. 378). Les chantiers se poursuivent avec la construction en trois années (1984/1986, plus de 2000 lits) de la partie linéaire centrale de la station : Arc 1 et Arc 2, Bel Aval, Aiguille du Grand Fond, Lanchettes, Fond Blanc, hôtel Eldorador Mélèzes, Résidence Opac. En 1988, deux constructions placées aux extrémités ouest du plan de masse (centre Occaj et Club Aquarius, 1500 lits) sont achevées. Le traitement élancé des toitures tracées en « tremplins de saut de ski », permet d´affirmer les gabarits élevés des différents immeubles, tout en raccordant ces grands volumes au sol, rejoignant là une attitude expressive déjà développée à Arc 1800. Aux tournants des années 1988/1989, les chantiers cessent en raison de la crise ouverte de l´immobilier de loisirs en montagne, Roger Godino devant quitter ses responsabilités dans la conduite de la S.M.A. et de la station. La station reste dans un état inachevé, offrant à la vue de multiples marques d´abandon, d´autant plus perceptibles que la composition est dense. Au sud, la galerie commerciale composée comme une place couverte n´est qu´en partie réalisée, sans pouvoir offrir le raccordement circulaire de la place haute. À l´ouest les compléments résidentiels prévus en contrebas de l´Occaj ne seront pas construits alors que l´ascenseur de liaison est prêt. À l´entrée, les parkings souterrains prévus en contrebas, surmontés de logements pour permanents, prévus pour être raccordés à la place haute par des ascenseurs, ne seront jamais réalisés. À l´ouest le projet d´un « temple d´amour » que Bernard Taillefer a imaginé avec Robert Blanc, sur la butte même du Varet à 2140 m d´altitude, belvédère sur la vallée de 2000 et sur le massif du Mont-Blanc, ne verra jamais le jour. Les abords du lac des Combes ne sont pas traités ; le « jardin », sorte de place intérieure orientée à l´est, abritée du vent du nord, avec un petit téléski pour les enfants reste à l´état de projet.

Les évolutions

Pour achever la station d´Arc 2000, plusieurs tentatives de projets sont ébauchées, tournées vers la valorisation des terrains placés à l´ouest en direction de la Daille. Au milieu des années 1980, la S.A.S (Société d´Aménagement de la Savoie) reprend l´aménagement de la station d´Arc 2000 dans le cadre de l´ouverture du capital de la S.M.A. Bernard Taillefer imagine alors un nouveau projet composé d´une grande opération résidentielle ancrée sur le côté ouest de la butte, composée d´immeubles en gradins (du type Versant Sud ou les Terrasses du Golf), quatre ailes adossées à la pente, surmontant un parking enterré, ouverts sur des terrasses et des places hautes. Ce projet referme le flanc ouest du fort. Projet resté sans suite. La « désintégration » de la structure intégrée de la station, liée à la crise de l´immobilier de loisirs en montagne, engagée à partir de 1987, a entraîné l´arrêt brutal des opérations immobilières à la station d´Arc 2000, laissant le projet inachevé.

La reprise des programmes vient une dizaine d´années plus tard. D´abord sous la forme de quelques « immeubles chalets » édifiés sur le flanc ouest de la station. Puis les programmes se poursuivent au-delà, encore plus bas, à l´altitude de 1950 mètres, au contact du bois de la Daille. La société canadienne Intrawest, l´un des premiers groupes internationaux de l´immobilier de loisirs, acquiert auprès de la SMA les derniers terrains de la ZAC d´Arc 2000, pour réaliser là un ensemble immobilier de 3500 lits touristiques, Arc 1950, conçu comme la reconstitution d´un village dont l´ouverture a lieu à noël 2003.

J.-F. LYON-CAEN/C. SALOMON-PELEN

La station d'Arc 2000, située au cour de la vallée de l'Arc, devait être la première station des Arcs réalisée, mais R. Godino préfère maîtriser d'abord Arc 1600, site plus bas et plus facile d'accès. Malgré une consultation de concepteurs organisée dès 1969 par R. Godino, le projet n'est lancé qu'en 1974 avec l'étude du plan de masse confiée à B. Taillefer qui imagine la station comme un "fort" construit autour de la butte du Varet. La station est composée d'un ensemble de bâtiments mitoyens formant un immeuble continu qui entoure la butte. Le "chemin de ronde" est limité au pourtour de la butte, sans lien direct avec le domaine skiable. Tous les bâtiments sont reliés entre eux et chacun est conçu comme l'un des contreforts du château, ancré au sol 30 à 40 mètres plus bas, avec ascenseurs publics raccordant le bas et le haut de la butte. Sur le sommet de la butte, la place haute dite la "place du Donjon" est le centre de la composition et le lieu d'animation et de vocation commerciale. Au "pied du fort", une autre galerie commerciale ouvre directement sur le front de neige. Les automobiles ne pénètrent pas dans la station. Elles sont stationnées pour partie en aval de la station dans un élargissement de la route, et pour partie dans des parkings fermés édifiés au pied de la butte, en bordure du lac glaciaire des Combes. La station fait l'objet d'une procédure de ZAC (étude AAM, G. Regairaz) délivrée en 1978 pour une capacité de 5000 lits touristiques. L'ouverture de la station a lieu pour Noël 1979 avec la mise en service du Club Méditerranée (immeuble le Varet, Ch. Perriand et B. Taillefer concepteurs) et les programmes immobiliers tous conçus par B. Taillefer en lien avec Ch. Perriand, se développent jusqu'en 1987. La désintégration de la station suspend toute nouvelle réalisation, laissant la station dans un état d'inachèvement. En 2000 la station comprend 6 600 lits, accueillant une clientèle qualifiée de "sportive". La fin des années 1990 voit le redémarrage du site par la réalisation d'immeubles chalets en contrebas du site et la construction d'un nouvel ensemble, Arc 1950, conçu comme une imitation de village.

Date(s) d'enquête : 2000; Date(s) de rédaction : 2002
© Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel
© Ecole d'architecture de Grenoble