Historique

L'histoire de la relique de saint Laurent est éclairée à partir du 16e siècle par les procès-verbaux de visites pastorales. La relique n'est pas mentionné dans celui de la visite de 1599, mais le vocable de l'église, qui lui est peut-être lié, atteste déjà de sa présence.

La visite pastorale de 1641 (AD Hautes-Alpes, G 784) donne un récit de l'arrivée de la relique à Barret, "laissée dans ledit lieu par un Espagnol, lequel venant de Rome et la portant en Espagne, détenu de maladie y mourut et laissa ladite relique, qu'on fit après enchâsser comme elle est", "par la tradition de père à fils depuis si longue suite d’année qu’il n’y a mémoire d'homme au contraire". La relique est "un os de la longueur proportionnée à la moitié d'un bras humain", conservée dans "un reliquaire de cuivre surdoré, fait en forme de demi bras aboutissant à une main" placé sur le maître-autel. La relique n'ayant pas d'authentique, les témoins présents ("prieur, curé, consuls et autres") mettent en avant les miracles accomplis par la relique, sur "plusieurs personnes tant de leur paroisses que autres des paroisses circonvoisines qui ont fait recours à Dieu en leurs nécessités pour maladies par intercession et prière de saint Laurent et par la vénération de ladite relique ont reçu miraculeusement des guérisons". De ce fait, le représentant de l'évêque "a remis ladite relique dans son reliquaire et, laissant les âmes dans cette bonne foi et croyance par la tradition, a toléré que lesdits reliquaire et relique demeurent et soient conservés sur ledit autel comme ci-devant".

Cependant lors de la visite suivante, le 29 décembre 1685 (AD Hautes-Alpes, G 786), l'ordonnance suivante est prononcée : "A l'égard d'une relique que nous avons trouvée dans ladite église, d'une des parties du bras, que les paroissiens nous ont assurée être de saint Laurent martyr, enjoignons auxdits paroissiens et autres qu’il appartiendra de nous exhiber les titres qui justifieront la vérité de ladite relique ; à faute de quoi faire dans six mois, ladite relique sera enterrée dans l'église". Cependant, lors de la visite du 23 septembre 1740 (AD Hautes-Alpes, G 788), si les reliques n'ont toujours pas d'authentique, le bras-reliquaire est toujours présent, et un buste apparaît à ses côtés, dans la chapelle de saint Laurent : "il y a un buste et un bras doré à plein, garnis à ce qu’on dit des reliques de saint Laurent". L'absence d'authentique ne fait plus l'objet de recommandation.

Il est difficile d'expliquer pourquoi un second reliquaire apparaît dans ce texte à côté du bras-reliquaire cité depuis un siècle, la relique étant d'après la description constituée d'un seul os impossible à diviser sans action volontaire. Peut-être le bras-reliquaire, qui pouvait être un objet du 14e ou 15e siècle, a-t-il été considéré comme démodé et remplacé par le buste-reliquaire plus dans le goût de l'époque (la logette est assez grande pour contenir un "demi bras"). Le désir de changer de reliquaire pouvait provenir de la volonté de voir la relique, si le bras-reliquaire ancien n'était pas pourvu d'une ouverture vitrée comme c'est le cas pour le buste. La relique a pu aussi être découpée afin qu'un fragment soit placé dans un nouveau reliquaire donné par un commanditaire désireux de faire acte de piété.

Le bras-reliquaire a disparu, mais un buste-reliquaire est toujours présent dans l'église (il fait partie des objets récupérés après l'effondrement de l'église et replacés dans le nouvel édifice). Il est datable du 18e siècle, et peut correspondre à celui mentionné en 1740. Son état de conservation montre la réalisation d'au moins un repeint. La logette a relique, tapissée d'un tissu façonné de type lampas blanc et rouge, est vide. La relique est encore mentionnée par l'abbé Joseph Conil lors de la visite du 21 juin 1824 (AD Drôme, 16J : 42 / 2A), toujours sans authentique, mais a disparu lors de l'inventaire de 1926 (AD Drôme, 16J : 42 / 2D) ; des témoins se souviennent pourtant des processions du buste-reliquaire (sans relique ?) au milieu du 20e siècle.

Description

Le reliquaire représente un buste à peu près à taillé réelle, coupé sous les épaules pour être fixé sur un socle en piédouche de plan carré, dont la partie médiane renflée est percée d'une ouverture ovale vitrée permettant de voir la relique. Le saint est représenté nu-tête, vêtu d'une dalmatique dont les cordons pendent sur sa poitrine. Sa tête est tournée vers la droite et légèrement inclinée vers le bas, avec la bouche entr'ouverte. Le revers n'a pas été vu.

L'ensemble est en bois, formé de plusieurs éléments (les épaules sont rapportées sur le tronc, le socle est en plusieurs parties) avec des assemblages chevillés. Le socle est les vêtements sont dorés à la feuille, les chairs et les cheveux sont peints au naturel. Le dessous du socle est percé de trous qui semblent destinés à recevoir des tenons, peut-être pour fixer le buste sur un brancard de procession.

La polychromie et la dorure montrent de nombreux soulèvements et lacunes, avec des fissures aux jointures des assemblages. Une mèche de cheveux manque, l'oeuvre présente des trous d'envol et sa solidité générale est compromise.