1. HISTORIQUE
Premier pont suspendu Baudin, 1933
Le 16 mars 1927, un ingénieur rapporte que le pont suspendu construit en 1828 est arrivé à "l´extrême limite d´usure de tous ses organes". Un projet de réfection est dressé, début 1927, par le Service central d´études techniques comportant la régidification des deux travées, la modification des culées et l'accroissement de la largeur du pont pour permettre le croisement de deux véhicules (AD Isère, 1S 4/10/2).
Le Ministre des Travaux publics subordonne la mise à exécution des travaux à la participation des deux départements de l´Ardèche et de l´Isère, chacun pour 1/4, soit 510 000 francs par département (idem : Rapport de l´agent voyer cantonal sur le projet de restauration du pont, 31 mars 1927).
Le département de la Drôme ne veut pas participer aux frais (AD Isère, 1S 4/10/2).
La reconstruction de l'ouvrage est finalement mise au concours en 1931.
Le concours "prévoyait un pont suspendu à poutre de rigidité, avec une travée centrale de 175 à 190 m. Le tablier devait comporter une chaussée de 6 m et deux trottoirs de 0,75 m.
Après une étude assez longue, la Société des Etablissements B. Baudin, de Châteauneuf-sur-Loire, fut chargée de l´exécution du projet [voir AD Isère, 1S 4/10/2]. Les principes qui guidèrent la conception de l´ouvrage furent les suivants : recherche d´un pont lourd, peu déformable ; au point de vue architectural, la plus grande sobriété, en ne masquant jamais une pièce ou une ligne statiquement essentielle" (CHADENSON, p. 585-586).
L'ingénieur en chef du département de l´Isère, Simon, assure la direction du chantier de reconstruction, sous le contrôle de Favier, ingénieur des Ponts et Chaussées. Le montage du nouvel ouvrage est opéré sous la direction de Mauchaussat, pour le compte de l'entreprise Baudin (idem, p. 589).
Afin d´assurer le maintien de la circulation routière pendant les travaux de reconstruction, l'ancien tablier, renforcé, est soulevé pour permettre la construction du nouveau tablier en sous-oeuvre et maintenir la navigation sur le Rhône.
Parallèlement, un nouveau système de suspension destiné à supporter le poids de l'ancien ouvrage, est prévu. Un portique en métal est établit sur chaque rive afin de permettre le lancement d'une suspension provisoire, constituée de chaque côté d'un câble suspenseur à un hauban de tête, sur ces portiques et sur la pile centrale de l'ancien pont (idem, p. 589 ; voir aussi MARREY, p. 260).
Les pylônes définitifs sont entièrement projetés en acier au chrome-cuivre, un métal très résistant et peu oxydable, tout juste recommandé par une circulaire ministérielle de février 1932, et encore très peu utilisé pour la construction des ponts en France. Ce métal fut préféré à l´acier ordinaire à rivets, type Ponts et Chaussées (idem, p. 587).
Les éléments constitutifs des pylônes métalliques, pesant jusqu'à 13 tonnes, sont montés à l´aide d´un échafaudage métallique et retenus par des haubans (idem, p. 589).
Le couronnement de l'arche de la pile centrale de l'ancien pont est ensuite détruit afin de permettre le passage des nouveaux câbles porteurs et le lancement de la suspension définitive.
Le nouveau tablier (poutres de rigidité, entretoises et longerons), accroché sous la nouvelle suspension, au moyen des éléments de suspentes futurs, est mis en place par ripage, à l'aide de tirants de relèvement.
La dalle en béton armée et le revêtement de la chaussée terminent l'exécution du nouveau pont dont les épreuves sont passées avec succès les 16 et 17 octobre 1933 (idem).
Le 25 juillet 1934, est passée une soumission pour terminer la démolition de l'ancienne pile (AD Isère, 1S 4/10/2 : Rapport de l'ingénieur en chef, 13 décembre 1934).
Deuxième pont suspendu Baudin, 1951
L'ouvrage de 1933 est malheureusement détruit le 1er septembre 1944 par l'armée allemande en retraite. Un bac à traille est remis en usage en attendant sa réfection (site internet Art et histoire, notice du pont de Sablons, 1933-1944 et notice du pont 1951).
Démarrés en 1948-49, les travaux de reconstruction sont dirigés par les mêmes Etablissements Baudin, sur les fondations de l'ouvrage précédent. Le pont est ouvert à la circulation le 16 février 1951 (BOUVY, p. 79 ; MONTENS, p. 126 et site internet Art et histoire, idem).
Le 21 décembre 1972, un des câbles de suspension de la nappe amont se rompt par corrosion. Le pont est interdit le même jour à la circulation des poids lourds puis, dès le lendemain, à celle de tous les véhicules (BOUVY, p. 79).
Le 9 juin 1973, la circulation est rétablie dans les deux sens grâce à deux ponts provisoires (ponts Bailey), dont la construction est entreprise le 16 mars 1973 (idem, p. 79-80).
La réparation du pont est lancée par appel d'offres. Le projet de réfection prévoit de changer la totalité de la suspension, en conservant cependant le tablier de l´ouvrage, étant en excellent état ; il se propose de "définir un nouvel ouvrage moins sujet à la corrosion, plus aisé à entretenir, à surveiller, et à réparer". Deux offres sont soumises par les entreprises Arnodin et Baudin-Chateauneuf en juin 1974. C'est celle de l´entreprise Arnodin qui est retenue, avec qui un marché est conclu en avril 1975. Les travaux de mise en place de la nouvelle suspension, constituée de huit câbles continus paraboliques et deux câbles complémentaires de retenue sur chaque rive, sont officiellement débutés le 11 avril (idem, p. 80-81).
Le transfert des charges de l´ancienne suspension à la nouvelle s´est fait par le biais d´une suspension provisoire prenant appui sur les nouveaux câbles porteurs (idem, p. 84).
Les câbles sont montés au cours de l´été 1975 (idem, p. 85).
A partir de 1997, est engagée la mise en peinture de l'ouvrage qui lui donne son aspect actuel polychrome bleu-jaune-noir (site internet Art et histoire, notice du pont de Sablons, 1951).
Il passe actuellement sur le pont 11.500 véhicules par jour en moyenne (idem).
En 1974, le trafic moyen journalier est de 5.200 véhicules, chiffre pouvant atteindre 10 000 véhicules les jours de pointe (BOUVY, p. 79).
2. DESCRIPTION
Premier pont suspendu Baudin, 1933
Le premier pont suspendu Baudin comprend une travée centrale de 185 m et deux travées latérales de 16 m environ. L'ouvrage, fondé sur caisson unique (en rive gauche, la fondation se trouve exactement sous les appuis de l´ancien pont Seguin de 1828), se singularise par son emploi généralisé d´acier au chrome-cuivre pour ces éléments constitutifs.
Les deux pylônes, de 30 m de haut, en forme de portiques, rappellent ceux édifiés en 1928 pour le pont de Cologne, sur le Rhin.
La suspension est constituée de huit câbles en acier ordinaire, avec deux câbles supplémentaires en retenue. Elle se particularise par l'emploi d'un collier en acier moulé en deux pièces au point d´attache des suspentes, permettant de rendre les câbles solidaires tout en autorisant leur remplacement.
Le tablier est du type courant à poutre de rigidité, ossature métallique et dalles en béton armé. L'ossature comporte vingt-neuf entretoises supportant cinq files de longerons. Les dalles armées forment à peu près l´âme d´une poutre à double T dont les membrures seraient les parapets, disposition offrant une très grande rigidité latérale.
Le tablier porte deux trottoirs également en béton armé, avec bordure en granit.
(Notes descriptives extr. de : CHADENSON, p. 585-589).
Deuxième pont suspendu Baudin, 1951
L´ouvrage reconstruit en 1949, de même type que le précédent, comprend une travée centrale de 185 m de portée et deux travées latérales de 14,5 m, s´évasant pour se raccorder à la berge.
Les deux pylônes de 25 m de haut, sont articulés à leur base et reliés en tête et en pied par une poutre-caisson.
Le tablier, constitué de deux poutres de rigidité en treillis Warren et dalle en béton armé, porte une chaussée de 6,70 m et deux trottoirs de 1,50 m en encorbellement.
La suspension est constituée de seize câbles continus d´un ancrage à l´autre, divisés en deux nappes, avec deux câbles complémentaires en retenue. Ces câbles sont réunis aux suspentes par un collier
Les câbles sont ancrés dans des chambres situées sous le niveau de la chaussée à l'aide de tirants.
(Notes extr. de : BOUVY, p. 79 : Description de l´ouvrage reconstruit en 1949).
Ingénieur des Ponts et Chaussées dans le 2e quart du 20e siècle.