Dossier d’œuvre architecture IA73003664 | Réalisé par
  • enquête thématique départementale, Patrimoine hydraulique des Pays de Savoie
Usines électrochimiques de production de carbure de calcium, d'électrodes, de cyanamide de calcium et de graphite de Notre-Dame-de-Briançon
Œuvre recensée
Copyright
  • © Collection particulière M.-A. Podevin

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Pays de Savoie - Moûtiers
  • Hydrographies Torrent de l'Eau Rousse ; bassin-versant Isère moyenne
  • Commune La Léchère
  • Lieu-dit Notre-Dame-de-Briançon
  • Cadastre 2014 AD 87, 93, 94, 95, 96, 132, 137, 138, 149, 156, 178, 180, 182, 199

Le site industriel de Notre-Dame-de-Briançon se compose de plusieurs unités de production dont les bâtiments installés de part et d'autre de l'Isère forment un ensemble complexe. A l'origine, il existait trois usines distinctes.

Usine de carbure de calcium et d'électrodes (rive gauche)

Historique

Le 1er août 1896, les sieurs Jean Paul Gromier, G.Planche et Cie demandent l'autorisation d'établir une usine de fabrication de carbure de calcium alimentée par une centrale hydroélectrique utilisant le torrent de l'Eau Rousse (IA73003662). Au cours de l'enquête publique la plupart des communes concernées sont favorables à la construction de l'usine (Aigueblanche, Villargerel, Bellecombe, Bonneval, Feissons, Pussy, Notre-Dame-de-Briançon). Seuls trois agriculteurs de Saint-Oyen s'opposent au projet (FR.AD073, M918). Par arrêté préfectoral du 31 juillet 1897, la Société Planche et Cie est autorisée à construire l'usine mais elle cède finalement ses droits à la Société des Carbures Métalliques (fondée le 23 mars 1896, capital : 3 200 000 de francs, siège social : 50 boulevard Haussmann à Paris). Cette société est propriétaire des brevets du chimiste Louis Michel Bullier pour la fabrication du carbure de calcium à l'échelle industrielle.

L'usine est construite en 1897. Elle est dirigée par M.Lambert. Le premier conseil d'administration est présidé par Henri Gall et compte Louis Michel Bullier et Henri Moissan. A partir de 1899, la Société des Carbures Métalliques fabrique aussi des électrodes. L'usine dispose désormais d'une partie fabrication de carbure de calcium et d’une partie fabrication d’électrodes.

En 1900, le conseil municipal de la commune de Notre-Dame-de-Briançon se plaint des désagréments causés par les gaz et poussières de l'usine de carbure (FR.AD073, M918).

En 1919, la Société des Carbures Métalliques fusionne avec la Société d’Électro-Chimie. L’usine de fabrication de carbure est intégrée directement à la Société d’Électro-Chimie tandis que la production d’électrodes est louée à une filiale créée à cette occasion en 1920, la Société des Électrodes de Savoie (SES).

En 1932, la SES s'allie à la Société américaine Acheson pour créer la Compagnie industrielle Savoie-Acheson (CISA) chargée de la fabrication des électrodes de graphites.

En 1952, la Société des Électrodes et Réfractaires de Savoie (SERS) est créée pour gérer cette production à Notre-Dame-de-Briançon et dans une autre usine à Vénissieux.

En 1958, une partie du complexe industriel est toujours occupée par la Société d’Électrochimie, d'électrométallurgie et des Aciéries d'Ugine qui produit du carbure de calcium. L'autre partie est occupée par la Compagnie industrielle Savoie-Acheson (filiale à 60% du groupe Union Carbide et à 40% de la SECEMAEU) qui fabrique des électrodes de graphite.

L'usine de Notre-Dame-de-Briançon cesse de produire du carbure de calcium en 1961 (L.Chabert, Revue de géographie alpine, 1972).

Actuellement, une partie du site est exploitée par la Société Graftech France qui produit du graphite, l'autre partie est occupée par la Société Carbone Savoie (filiale de Rio Tinto) spécialisée dans la fabrication des cathodes en carbone et en graphite.

Fonctionnement de l'usine et productions

En 1897, la chaux nécessaire à la production du carbure de calcium est fabriquée à l'usine à partir de calcaire provenant des environs d'Aix-les-Bains (Le Courrier des Alpes, 24 juillet 1897). La Société des Carbures Métalliques possède aussi une carrière de calcaire près d'Aigueblanche. L'anthracite provient d'Angleterre.

L'usine dispose d'une puissance électrique de 13000 chevaux : 3000 chevaux sont fournis par la centrale de l'Eau Rousse, située en plein cœur de l'usine (IA73003662) et 10000 chevaux proviennent de la centrale de la Rageat située à 10 kilomètres (mise en service en 1899). Une partie de l'eau arrivant par la conduite forcée de l'Eau Rousse actionne aussi trois turbines Pelton (constructeur : atelier du Vevey) produisant de la force mécanique pour les besoins de l'usine.

A l'origine, l'usine de Notre-Dame-de-Briançon pouvait produire 25 tonnes de carbure de calcium par jour. Il était vendu en France et à l'étranger, notamment en Allemagne, en Amérique, en Belgique, en Italie, à Madagascar, etc. En 1958, elle produisait annuellement 15000 tonnes de carbure de calcium, 150 tonnes de bidons à carbure et 175000 mètres-cubes d'acétylène dissous (FR.AD073, 109F24).

Concernant la fabrication d'électrodes, l'usine en produisait moins de 1000 tonnes par an à ses débuts. En 1908, la fabrication dépassait les 2000 tonnes et en 1914 les 4000 tonnes par an (FR.AD073, 109F24). En 1937, l'usine produit 8000 tonnes et en 1958, 16000 tonnes.

A l'origine, l'usine employait 200 ouvriers : 15 pour la centrale électrique, 40 à l'usine d'électrodes, 10 pour la chaux, 20 aux ateliers de réparation et 115 à l'usine de carbure. En 1976, l'usine employait toujours 457 personnes dont la plupart étaient originaires de la région (FR.AD073, 109F24).

Usine de cyanamide de calcium (rive droite)

Au début du XXe siècle, la Société Française des produits azotés (Capital : 1 000 000 de Francs, Siège Social : 2 rue Blanche à Paris), filiale de la Société des carbures métalliques, décide d'installer en France une usine de production de cyanamide de calcium (procédé Frank et Caro) comme celle qui existe en Italie à Piano d'Orte, prés de Pescara depuis 1905. Le cyanamide de calcium est un nouvel engrais composé de carbure de calcium et d'azote. Il se décompose au contact de l'eau pour former de l'ammoniac.

Le 12 avril 1906, la Société Française des produits azotés demande l'autorisation de construire l'usine de cyanamide de calcium en rive droite de l'Isère, juste en face de l'usine de carbure de calcium afin de se fournir directement en matière première (FR.AD073, M918). Elle loue également à l'usine de carbure de calcium, l’énergie électrique provenant des centrales de l'Eau Rousse (IA73003662) et de la Rageat. Lors de sa construction, la production de l'usine est de 10 tonnes de cyanamide par jour (J. Escard, La fabrication électrochimique de l'acide nitrique, 1909).

En 1909, la Société Française des produits azotés fusionne avec la Société Suisse des produits azotés pour devenir la Société des produits azotés (capital porté à 2 200 000 francs).

En 1918, l'usine est toujours en activité.

L'usine de Notre-Dame-de-Briançon était la première et la plus importante usine de fabrication de cyanamide de France. Il existait une autre usine à Bozel dirigée par la Société l'Azote.

Usine de graphite (rive droite)

En 1899, la Société Le Carbone qui fabrique du graphite industriel s'installe également à Notre-Dame-de-Briançon, en rive droite de l'Isère, en amont de l'usine de cyanamide. Elle loue l'énergie électrique à la Société des Carbures Métalliques située en rive gauche de l'Isère. En 1914, le directeur de la Société Le Carbone, M.Sarda Garriga, demande l'autorisation d'utiliser le Grand Nant de Nâves pour construire une petite centrale destinée notamment à l’éclairage de sa villa (FR.AD073, 83S28). Visiblement le projet n'est pas réalisé. En 1924, les bâtiments de la Société Le Carbone sont repris par la Société des Électrodes de Savoie (FR.AD073, 109F24).

REGARDER 83s25

  • Période(s)
    • Principale : 4e quart 19e siècle , daté par source
  • Dates
    • 1886, daté par source

Le complexe industriel de Notre-Dame-de-Briançon est implanté de part et d'autre de l'Isère, au bord de la route nationale n°90 (autrefois la route reliant Chambéry et Aoste). Il se trouve à 1,3 kilomètre de la gare de Notre-Dame-de-Briançon (autrefois la ligne PLM Albertville-Moûtiers).

Les premiers bâtiments d'usine sont installés sur la rive gauche de l'Isère, à proximité immédiate de la centrale hydroélectrique (IA73003662). Par la suite les bâtiments s'étendent aux deux rives et sont reliés une passerelle en béton armé et des voies ferrées du constructeur Decauville.

En rive gauche de l'Isère se trouvaient la centrale hydroélectrique et l'usine de carbure de calcium comportant deux salles de fours de 500 mètres-carré chacune et divers bâtiments (bureaux, magasins, ateliers, broyage, emballage, concassage, laboratoires, etc.) installés sur une surface totale de 3000 mètres-carrés. La Société des Carbures Métalliques avait également fait construire une maison pour le directeur et une cantine pour les ouvriers.

La rive droite de l'Isère était occupée par les bâtiments de fabrication des électrodes, par des maisons ouvrières (16 maisons pour un ménage et deux grandes maisons pouvant accueillir huit ménages) et par un hôtel restaurant. On y trouvait aussi bâtiment abritant la presse hydraulique permettant d'étirer les pièces.

En 1958, l'usine comptait 150 logements pour les familles d'ouvriers et 70 environ pour les célibataires.

Actuellement, un grand nombre de bâtiments de l'usine sont toujours en place.

  • Énergies
    • énergie hydraulique produite sur place
    • énergie électrique produite sur place
  • État de conservation
    bon état
  • Statut de la propriété
    propriété privée
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler

Le site industriel de Notre-Dame-de-Briançon forme un ensemble industriel complexe, résultat d'une longue évolution allant de la fin du XIXe siècle à aujourd'hui. Le fondateur de la Sécurité sociale, Ambroise Croizat (1901-1951) est né dans la cité ouvrière de l'usine où son père était employé.

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Documents d'archives

  • FR.AD073, M918, Fonds la Préfecture (IR1209), Hygiène, santé et installations classées (1860-1970), Dossiers des établissements classés. CEVINS : Tuerie Mencci, plan (1896). CHATELARD (le) : Abattoir communal, plan (1897). FRENEY (le) : Carbure de calcium Soc.Électrométallurgie française plan (1897). FRONTENEX : Tuerie Curtaz, plan (1901). MONTRICHER : Fabrication du carbure de calcium SOC. "L'INEXPLOSIBLE", plan (1898). MOTTE-SERVOLEX (la) : Tuerie Janin, plan (1894). NOTRE-DAME-DE-BRIANCON : Usine de carbure de calcium Planche et Cie - Soc.des Carbures métalliques, plan (1897) ; Soc. Française des produits azotés, cyanamide de calcium, plan (1906-1907). ORELLE : Carbure de calcium Soc. d’Électrochimie, plan (1897). PONT-DE-BEAUVOISIN : Abattoir communal, plan (1903). SALINS-LES-THERMES : Tuerie Bouvier, plan (1902), 1860-1940.

    AD Savoie : M918
  • FR.AD073, 83S25, Service hydraulique. Notre-Dame-de-Briançon. Affaires diverses dont Société du Carbure Métallique, digues, ponts, fontaine (1883-1957). Usines : scieries Juilletti (Glaize, 1860-1864), Léger (Glaize, 1866), Gillio (1876), Niémoz et Carret (Eau Rousse, 1881-1882), usine hydroélectrique Gromier et Planche (Doron de Prolognan, Eau Rousse, 1901-1903) Cie I.Savoie. Acheson, prise d'eau et dérivation (1953), 1860-1957.

    AD Savoie : 83S25
  • FR.AD073, 83S28, Service hydraulique. Petit-Coeur. Affaires diverses (1902-1956). Scierie et moulin Beaupoil (ruisseau de Naves, 1911), usine Société des Carbones (ruisseau de Naves, 1914), scieries Béroud (1861-1866), Sardino (1920), Mollaret (1925-1928), Société Bozel-Maletra (1927-1930), usine coopérative (1921-1922), 1861-1956.

    AD Savoie : 83S28
  • FR.AD073, 107s161, Fonds du service des Mines. Dossiers d'autorisation de captage et de contrôle des eaux thermales et de suivi sur les carrières abandonnées. Courriers et inspections. Commune de Notre Dame de Briancon, 1864-1942.

    AD Savoie : 107s161
  • FR.AD073, 49SPC10, Ponts et chaussées, service hydraulique, Notre-Dame-de-Briançon : scieries Juilletti, Léger (Glaise, 1864-1870) ; scierie et moulin Niemaz et Carret (Eau Rousse, 1881) ; scierie Carret (Eau Rousse, 1886) ; usine hydro-électrique pour la fabrication du carbure de calcium (demande Planche, Eau Rousse, 1896-1901), 1864-1901.

    AD Savoie : 49SPC10
  • FR.AD073, 49SPC11, Ponts et chaussées, service hydraulique, Petit-Coeur : scieries Béroud (1865-1870) ; usine hydro-électrique Société Anonyme le Carbone (torrent de Naves, 1914-1916) ; scierie Sardino (1920) ; usine hydro-électrique société d'Intérêt Collectif de Petit-Coeur et Grand-Coeur (Naves, 1921-1922) ; scierie et moulin Beaupoil (Naves, 1911, 1927) ; scierie Mollaret (Naves, 1928).

    AD Savoie : 49SPC11
  • FR.AD073, 1375w90, Cabinet du Préfet - Seconde Guerre mondiale - Service de la défense passive, Plan de protection des entreprises, dossiers détaillés : Établissements de 1ère catégorie (1), Usine Fontanet à Albertville (2), Usine Barnier à Albertville (3), Société d'électrochimie à La Bâthie (4), Société d'électrochimie de Venthon (5), Société Bozel-Malétra, Le Villard (6), Usine de la Rozière à Bozel (7), Centrale de Vignotan à Brides-les-Bains (8), Société des électrodes de la Savoie à Notre-Dame-de-Briançon (9), Société d'électrochimie à Notre-Dame-de-Briançon (10), 1932-1943.

    AD Savoie : 1375w90
  • FR.AD073, 109F24, Recherches et documentation. Documentation concernant l'usine de Notre-Dame-de-Briançon : Société des électrodes et réfractaires "Savoie" : Les usines de Notre-Dame-de-Briançon, origine, histoire (2 décembre 1958) ; Rédaction du chapitre du mémorial.

    AD Savoie : 109F24

Bibliographie

  • Le Courrier des Alpes, 20 février 1897.

  • Le Courrier des Alpes, 24 juillet 1897.

  • Le Courrier des Alpes, 24 juillet 1897.

  • Le Courrier des Alpes, 18 décembre 1897.

  • Société philomathique (Bordeaux), Revue philomathique de Bordeaux et du Sud-Ouest, 3e année, 1er janvier 1900.

    p.302-313
  • Congrès international de l'acétylène. Troisième congrès international de l'acétylène tenu à Paris du 22 au 28 septembre 1900 sous la présidence de Monsieur le Général Sebert. Rapports, discussions, travaux et résolutions du congrès publiées sous la direction de M. R. Guilbert. Exposition universelle internationale de 1900, 1900.

  • Congrès de la Houille Blanche, Grenoble, Annecy, Chamonix, 7-13 septembre 1902. Compte-rendu des travaux du Congrès, des visites industrielles et des excursions, Grenoble, 1902.

  • Le Courrier des Alpes, 13 septembre 1902.

  • Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, Moniteur des comices, des propriétaires et des fermiers, 72e année, 1908, 2e semestre, Tome 16, Librairie agricole de la maison rustique, Paris, 1908.

    p.298-303.
  • J. Escard, La fabrication électrochimique de l'acide nitrique des composés nitrés à l'aide des éléments de l'air, Dunod et Pinat, Paris, 1909.

    p.83-85.
  • Archives commerciales de la France : journal bi-hebdomadaire paraissant le mercredi et le samedi, 37e année, n°9, samedi 29 janvier 1910.

    p.191.
  • Organe de l'Union des syndicats de l'électricité, Revue générale de l'électricité, Tome. XIII, 6 janvier 1923-30 juin 1923.

  • Association française pour l'avancement des sciences, Compte-rendu de la 57e session, Chambéry, Paris, 1933.

    p.149-150.
  • CHABERT, Louis. "L'industrie en Maurienne et en Tarentaise. Les fabrications disparues ou en difficulté", Revue de géographie alpine, Volume 60, n°1, 1972.

    p. 75-100.
  • L.Lebécel, Des moulins et des hommes. Traces du passé pré-industriel en vallées de Celliers, de Nâves, de Montaimont et des Avanchers, Mémoire de formation pour l'obtention du Brevet d’État d’accompagnateur en moyenne montagne, Tome 2, présentation du massif d'exercice et sujet d'approfondissement, avril 2011.

    AD Savoie

Annexes

  • Le Courrier des Alpes, 20 février 1897.
  • Le Courrier des Alpes, 24 juillet 1897.
  • Le Courrier des Alpes, 18 décembre 1897.
  • Extrait de la Revue philomathique de Bordeaux et du Sud-Ouest, janvier 1900, p.302-313.
  • Le Courrier des Alpes, 13 septembre 1902.
  • Association française pour l'avancement des sciences, Compte-rendu de la 57e session, 1933, p.149-150.
Date(s) d'enquête : 2015; Date(s) de rédaction : 2016, 2017
© Région Auvergne-Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel
© Assemblée des Pays de Savoie