L’inventaire du patrimoine hydraulique du bassin-versant de l'Isère moyenne s'est déroulé principalement entre 2015 et 2016. Mené sur 14 communes, il a été réalisé en collaboration avec les élus, les associations et les habitants du territoire. Pour la partie nord du secteur, les recherches ont été effectuées en coopération directe avec l'association des Amis du patrimoine de Basse Tarentaise dont l'objectif est de mieux faire connaître le patrimoine des communes de Tours-en-Savoie, La Bâthie, Cevins, Feissons-sur-Isère, Rognaix, Saint-Paul-sur-Isère et Esserts-Blay.
197 fiches d'inventaire ont été rédigées sur l'ensemble du bassin-versant. Celles-ci concernent des sites hydrauliques très variés qui ont utilisé l'eau comme force motrice pour des activités artisanales mais également industrielles. Ce bassin-versant compte aussi un site thermal important.
Sites artisanaux
L'inventaire du bassin-versant de l'Isère moyenne a recensé un très grand nombre de sites qui utilisaient l'énergie des cours d'eau pour des activités artisanales liées à la subsistance alimentaire et à la vie quotidienne des villages. La plupart de ces sites cumulent plusieurs activités dans un même bâtiment.
Beaucoup de ces édifices artisanaux semblent être de construction ancienne même si les sources consultées ne permettent pas de faire remonter leur origine au delà de la fin du XVIIe siècle. Parmi les 197 sites sites recensés, 68 d'entre eux sont déjà en place au début du XVIIIe siècle comme le confirme leur représentation sur les mappes sardes réalisées entre 1728 et 1733.
Les sites artisanaux présents dans le bassin-versant de l'Isère moyenne se répartissent de la manière suivante :
- Les moulins à farine : le bassin versant en a compté jusqu'à 102. Chaque commune traversée par un cours d'eau en possède au moins un mais la plupart en compte beaucoup plus. C'est le cas des Avanchers-Valmorel où 17 moulins ont été recensés ou encore de la commune d'Aigueblanche qui a compté jusqu'à 15 moulins. Beaucoup de ces moulins à farine sont des bâtiments de dimensions modestes construits en pierre qui étaient équipés à l'origine d'une roue horizontale en bois appelée turbet ou turbette. Ils étaient utilisés pour les besoins d'un hameau ou d'une famille. Ces moulins à farine traditionnels périclitent pour la plupart à la fin du XIXe siècle ou au début du XXe siècle. Les derniers cessent de fonctionner après la Seconde Guerre mondiale. Visiblement, aucun d'entre eux n'a été modernisé avec l'installation de machines à cylindre.
Les études menées sur le terrain ont permis de constater que la plupart des moulins du bassin-versant sont actuellement détruits ou à l'état de ruine car ils se trouvent dans des zones accidentées dont les chemins d'accès ont disparu. Néanmoins leur architecture solide en pierre permet très souvent de retrouver des soubassements et dans certains cas des vestiges très significatifs (meule de pierre, engrenages en métal, etc.). Quelques anciens moulins qui se trouvaient dans les villages ont été reconvertis en logement mais dans très peu de cas la restauration rappelle l'activité passée du bâtiment.
En terme de valorisation patrimoniale, aucun moulin à farine du bassin-versant n'est en état de fonctionnement. Trois sites
- Moulin des Avanchers
- Moulin de Celliers
- Moulins de Nâves
- Les scieries : le bassin-versant de l'Isère moyenne compte 75 scieries. Celles-ci présentent pour la plupart les mêmes caractéristiques architecturales que dans les autres bassin-versants : un bâtiment construit dans la pente avec un sousbassement en pierre surmonté par une structure en bois non fermée avec un toit en tôle. A partir de la fin du XIXe siècle, certaines scieries vont remplacer leur roue verticale par une turbine, ce qui leur permet de perdurer jusqu'au milieu du XXe siècle. Après leur abandon, leur construction légère et leur localisation en forêt n'a pas permis de reconversion. Beaucoup ont disparus.
- Les moulins à huile : l'inventaire a permis de recenser 18 pressoir ou moulins à huile. Comme les moulins à farine, il s'agit en général de bâtiments anciens mais la plupart sont aujourd'hui détruits ou en ruine. Lorsque c’est le cas, il arrive parfois de retrouver parmi les vestiges du site la conche de pierre dans laquelle était écrasée les cerneaux de noix. Quelques uns vont fonctionner jusqu'à la fin du XXe siècle en se modernisant. Moulin à huile d'Aigueblanche valorisé.
- Les battoirs et les foulons : une vingtaine de sites de ce type ont été recensés dans le bassin-versant mais il est certain qu'il y en a eu beaucoup plus car ils sont plus difficiles à localiser en raison de leur taille modeste. Les battoirs sont destinés à défibrer le chanvre, à écraser des fruits ou des céréales pour faire du gruau grâce à une petite meule tournant dans une conche de pierre. Les battoirs peuvent être installés dans le même bâtiment que les moulins à farine ou faire l’objet d’un édifice indépendant. Dans ce cas, celui-ci prend la forme d’une petite structure ouverte surmontée par une toiture légère. Il ne reste aucun vestige de ce type de bâtiment dans tout le bassin-versant.
- Les tanneries : une seule tannerie (Aigueblanche). Les tanneries utilisaient la force hydraulique pour extraire le tan des écorces de châtaigner qui servait à la préparation des peaux. Il n’en reste aucune trace aujourd’hui.
- Les sites hydrauliques liés à l'extraction minière et à la métallurgie : ce bassin-versant compte une trentaine de sites hydrauliques en lien avec l'extraction minière et la métallurgie (martinet, forge). 1 fonderie de cuivre à Doucy, une à ND de Briançon, Nâves, Tours. Activité à arbine
Le potentiel hydroélectrique de l'Isère
Rapport de l'ingénieur en chef des Ponts et chaussées du 1er février 1899 : "Par dépêche en date du 24 octobre 1898, le Ministre des travaux Publics a prescrit de faire un relevé des forces hydrauliques qui pourraient être empruntées aux rivières navigables et flottables. Les seules rivières ainsi classées sont à considérer dans le département de la Savoie sont l'Isère en aval du pont d'Aigueblanche et l'Arc en aval du pont de la Magdeleine. Il est à remarquer que l'utilisation industrielle d'une rivière torrentielle comme l'Isère ou l'Arc ne peut être réellement avantageuse que dans la partie de son cours où les pentes du lit sont trés fortes, c'est à dire, dans la partie qui n'est pas flottable. Ainsi toutes les usines projetées ou en construction dans les vallées de l'Isère et l'Arc, le sont-elles dans la partie non flottable, ou sur des cours d'eau non flottables. Toutefois, à mesure que l'emploi des forces motrices naturelles se développera, toutes les fortes pentes et les grandes chutes se trouvant utilisées, on pourra être amené à se servir des chutes plus faibles. C'est dans cet ordre d'idée que nous désignons sur l'Isère, la partie comprise entre le Feissonet (commune de Feissons-sous-Briançon) et la Roche (commune de Cevins) comme pouvant être utilisées industriellement, et sur l'Arc, la section entre le Pont de la Magdeleine et Aiguebelle, où plusieurs chutes pourraient être créées. [...] Ainsi, l'on pourrait établir sur ces deux cours d'eau plusieurs usines d'une puissance minimum de 27000 chevaux, puissance qui pourrait être au moins doublée, pendant la moitié de l'année lors des eaux moyennes (FR.AD073, s1364).
Rapport de l’ingénieur ordinaire du 28 décembre 1898 : "Par dépêche en date du 24 octobre 1898, le Ministre des travaux Publics a prescrit de faire un relevé des forces hydrauliques qui pourraient être empruntées aux rivières navigables et flottables. La seule rivière ainsi classée dans l’arrondissement de Moûtiers est l’Isère, en aval du pont d’Aigueblanche. Il est à remarquer que l’utilisation industrielle d’une rivière torrentielle comme l’Isère ne peut être réellement avantageuse que dans la partie de son cours où les pentes du lit sont très fortes, c'est-à-dire dans la partie qui n’est pas flottable. La création d’usines importantes sur des sections de rivière à pente faible entrainerait une dépense considérable ; elle ne parait pas dans l’état actuel des sciences hydrauliques et mécaniques, devoir être poursuivi à brève échéance. Ainsi toutes les usines projetées ou en construction sur l’Isère, dans l’arrondissement de Moûtiers le sont dans la partie non flottable. Il n’existe même pas de petits moulins sur la partie flottable. […] (FR.AD073, s1364).
Contrairement à d'autre BV, beaucoup de tractations d'industriels pour acheter des chutes. Alexis Perrin, Aubry à Arbine, etc.