En 1915, malgré l'opposition générale du Conseil Municipal, l’atelier de chargement de Vénissieux - Saint-Fons est construit pour les besoins en munitions de la Première Guerre mondiale. L'Arsenal est situé sur une parcelle qui abritait déjà une poudrerie, à proximité des voies ferrées ce qui lui permet d'être relié par les rails à d'autres industries. Ces entreprises métallurgiques fabriquent des fûts d’obus, fournis en partie par les usines Berliet, et les usines de Saint-Fons qui produisent des substances chimiques explosives (Mélinite), notamment la poudrerie Picard, spécialisée dans ce domaine. La S.O.M.U.A., adossée au mur d'enceinte militaire, fabrique également du matériel de guerre.
Dans les ateliers de l'Arsenal, les femmes remplacent les hommes partis à la guerre. Environ 80 000 obus sont produits quotidiennement, à des cadences infernales, afin d’alimenter le front. Des soldats et des civils issus des colonies (Maroc, Tunisie, Sénégal, Côte d'Ivoire, Indochine) sont également mobilisés pour renforcer la main d’œuvre. Ils sont logés dans des cantonnements installés de part et d’autre de la Rue de la République, et jusqu’à la limite de Saint-Fons. Ces constructions longilignes accueillent chacune 200 personnes dans de vastes dortoirs meublés de lits individuels et de malles alignés.
L’Arsenal employait jusqu'à 6000 personnes à la fin des années 1918.
Le 15 octobre 1918, une explosion a lieu dans un bâtiment d'encartouchage de l'Arsenal. Les bâtiments sont soufflés par quinze tonnes d'explosifs et les alentours détruits par l'équivalent de 40 000 obus. La déflagration est ressentie jusqu’à Genève et provoque de nombreux dégâts matériels. A Bourgoin-Jallieu ou à Genas, les vitraux des églises ont volé en éclat. Des éclats d’obus sont encore retrouvés lors des récents travaux dans le quartier des Minguettes. (Source : "L'Arsenal de Vénissieux - Saint-Fons", Vinicia'Com, Association Viniciacum, juin 2018)
Dans les années 1920, les cantonnements sont occupés par les ouvriers coloniaux, des manœuvres nord-africains et des travailleurs indochinois. Puis, entre 1939 et 1942, des familles y seront internées sur ordre du gouvernement de Vichy, notamment lors de la rafle des juifs étrangers dans la région de Lyon, le 26 août 1942. La chaîne de solidarité organisée par l'association l'Amitié chrétienne permettra de les exfiltrer du camp et de les sauver de la déportation dans la nuit du 28 au 29 août 1942. (Source : Valérie Portheret, Vous n'aurez pas les enfants, Editons Xo, juin 2020).
En mai 1981, le maire de Vénissieux Marcel Houël inaugure la nouvelle Zone d'activités industrielles et artisanales créée sur ce site après le démembrement de l'ancien arsenal militaire à la fin des années 1960.
Aujourd'hui, le seul édifice de l'Arsenal qui subsiste est un bâtiment industriel remarquable par ses cinq halles successives, dont la structure et la couverture sont en voiles de béton, rythmées par des voûtes en arcs surbaissés.
Sources :
Belmont Alain , «Terre d’Afrique à l’arsenal » Expression-Vénissieux, 29 novembre 2016.
Corbel Maurice, Vénissieux, du village à la cité industrielle, Paris : Messidor-Temps actuels, 1983.
Dessinateur-cartographe au service de l'Inventaire général du patrimoine culturel d'Auvergne-Rhône-Alpes depuis 2021