Historique
Le projet de construction d’une école, pour remplacer les locaux séparés pour garçons et filles loués par la commune, commence au lendemain de l’Annexion : dans une délibération du 27 mars 1861, la commune expose son désir de faire construire une école et mairie, pour une dépense d'environ 8 000 F, et une église (dépense d'environ 14 300 F) (AC, délibérations). L’année suivante, la commune fait l’acquisition d’un terrain qui lui permet d’implanter sa mairie-école mais aussi de déplacer l’église (située au milieu du cimetière) : il s’agit de la partie orientale d’une parcelle (le n°270 de la mappe) appartenant aux Hospices de Chambéry par legs de François Charvet (délibération du 31 août 1862, AC). La cession est acceptée l’année suivante par la commission administratrice de l'Hôtel-Dieu de Chambéry (délibération du 1er novembre 1863, AC). Entretemps le montant du projet pour l’école a presque doublé : une délibération du 15 novembre 1863 (AC) récapitule le budget des chantiers communaux en cours (en dépenses, 1000 F pour l'acquisition de l'emplacement (frais d'acte inclus), 25 000 F pour l’église, 15 000 F pour la mairie-école ; en ressources, un emprunt de 11 000 F, 1000 F de fonds disponibles, 7 529 F de souscription volontaire, les matériaux de la vieille église évalués à 1 000 F, une subvention de 20 000 F ; la souscription est finalement allouée aux travaux de l’église).
Le projet est signé le 1er mai 1864 (17 300 F ; devis estimatif des travaux, cahier des charges et plans conservés aux AD, 2O : 2657 et AC, Liasse construction de la maison d’école en 1868, n°1) par l’architecte chambérien Hector Duvernay, également chargé du chantier de l’église (dont le projet porte la même date).
Le bâtiment envisagé se compose d’un rez-de-chaussée avec deux salles d’écoles et deux escaliers, d’un 1er étage avec salle de mairie et cabinet du maire ainsi que les logements pour l’instituteur et l’institutrice. Le devis estimatif détaille l’emploi des divers matériaux : pour la maçonnerie, des gros moellons de libage disposés en carreaux et boutisses hourdés en mortier de chaux hydraulique ou des moellons élités, épincés au marteau, disposés par carreaux et boutisses hourdés au mortier de chaux grasse, enduit au frottoir et blanchis à la chaux ; de la pierre de taille en pierre piquée à la pointe des carrières de Saint-Germain ou d’Arith (par exemple pour le socle de porte), ou à la fine marteline, des carrières de Saint-Germain (pour les seuils de portes) ; les angles sont en pierre piquée à la pointe (chainages du rez-de-chaussée) ; de la molasse des carrière du pays, ravalée et profilée, assemblée par crosses et lancys (jambages et couverte de la porte de la mairie, portes, fenêtres…), ou piquée à la pointe pour les angles du 1er étage. Les cloison sont en brique de champ, la fosse d’aisance en béton. Les planchers soupieds, planchers et charpente sont en sapin, la couverture en ardoise. Les menuiseries comprennent des portes extérieures en noyer, à panneaux recouverts et moulures (porte principale, deux portes latérales, porte du petit escalier), six portes palières à cadre en noyer et panneaux en sapin, des portes intérieurs en sapin et des fenêtres en noyer. Les escaliers du rez-de-chaussée sont des « escaliers mi anglais, à quartiers tournants, en sapin, marches en noyer » ; les mêmes escaliers sont prévus pour le 1er étage et le comble, avec main-courante en noyer ; les barreaux des garde-corps sont de fer rond avec astragale et culot en zinc au rez-de-chaussée, à barreaux simples au grenier. Des cheminées sont prévues : une pour la mairie, en molasse compris foyère, chenêts, contre-cœur, avec peinture à l’huile, et quatre cheminées pour les logements (sans doute en molasse), qui disposent chacun d’un évier en bois recouvert de plomb. Enfin le devis prévoit le mobilier scolaire (bancs) et une table à six pieds ainsi qu’une grande armoire pour la mairie (AC, Liasse construction de la maison d’école en 1868, n°1).
Ce projet est amendé sur demande du conseil du bâtiment civil, séance du 30 mai 1865, afin de « supprimer la saillie formée sur la façade postérieure par l’escalier destiné à desservir le logement de l’institutrice en modifiant la distribution intérieure et en continuant les deux escaliers jusqu’au grenier » (délibération du 25 janvier 1866, AD, 2O : 2657). Les plans originaux sont annotés dans ce sens, et montrent également l’ajout d’un sous-sol à l’édifice ; les plans rectifiés sont signés par Duvernay le 9 août 1865.
Lors de l’adjudication des travaux, le 20 décembre 1866, la commune décide de passer un traité de gré à gré avec l’entrepreneur Antoine Chalansonnex, de La Biolle, déjà adjudicataire des travaux de l’église, et qui fait à la commune la proposition de substituer gratuitement de la pierre dure à la molasse prévue au devis pour diverses parties de l’église (jambages, couverte, et seuil de la porte latérale de l’église et de la porte extérieure du clocher, tous les angles du clocher et du beffroi, le premier cordon du clocher, les jambages, arcs et seuils des fenêtres du beffroi), de poser des barreaux en fer forgé à la fenêtre de la sacristie et de racheter les matériaux de l’ancienne église, dont la démolition reste à sa charge, pour 2 000 F (AD, 2O : 2657 et AC, délibération du 20 décembre 1866). Le traité de gré à gré est passé le 4 février 1867. La commune prend le même jour une délibération qui reprécise le budget du chantier : en ressources, une souscription volontaire des habitants, en argent, de 1205 F, un secours de l’Etat de 8000 F (décision ministérielle du 21 octobre 1866), la valeur des matériaux de l’ancienne église estimés 2 000 F, un emprunt voté à la Caisse des dépôts et consignation, de 6 000 F, et 95 F provenant des fonds libres de la commune (total : 17 300 F ; AD, 2O : 2657).
Un procès-verbal de réception provisoire est dressé le 1er décembre 1868. Le décompte général des travaux est signé le 1er juin 1869 (16 538,17 F) avant le procès-verbal de réception définitive, le 10 juin 1869 (qui indique que Chalansonnex a été adjudicataire le 1er décembre 1868 ; AD, 2O : 2657).
Des réparations sont nécessaires en 1882 : un devis de réparations est donné par l’architecte Lubini le 10 août 1886, concernant le mur de soutènement de la cour des garçons sur le bord de la route au sud de la maison, les enduits intérieurs des vestibules et escaliers, le changement d’ardoises (2 200 F ; AD Savoie, 2O : 2658) ; une délibération des 12 et 17 novembre 1882 (AC) mentionne également le plancher détérioré de l’école des filles et les fondations en partie dénudées à cause de la pente du terrain du côté est ; l’Etat doit financer ces travaux à 80 %. Le décompte général de ces travaux, exécutés par le sieur Antoine Pianta, entrepreneur à Albens, est dressé le 18 décembre 1886. En 1892, ce sont des travaux de construction d’un mur de clôture pour la cour de récréation des garçons et l’assainissement des caves qui sont projetés (500 F ; AC, délibération du 7 août 1892).
Divers autres travaux mineurs sont réalisés à la fin du 19e siècle. En 1905, Charvin, agent voyer à Albens, donne les plan et devis de préaux couverts et de toilettes (5250 F ; AC, délibération du 4 juin 1905) mais ce projet reste sans suite, la commune ayant décidé de construire une nouvelle école. La vente de l'ancienne est alors décidée (AD, 2O : 2658, délibération du 4 juin 1911) ; l'acte de vente (3040 F) est passé le 15 mai 1913, au bénéfice de Jean-Pierre Clerc, épicier à Saint-Ours.
Le bâtiment devient une maison d'habitation, avec des parties agricoles situées dans un corps de bâtiment situé à quelques dizaines de mètres à l'est (2015 B3 176, 177, partagé avec la maison 2015 B3 174). Des transformations sont effectuées dans l'ancienne école en 1943 (oral) ; ces travaux correspondent peut-être à la transformation d'une partie de la classe des filles en remise (avec porte double en façade à la place des fenêtres), ajout d'un balcon filant devant le rez-de-chaussée en façade principale, suppression des portes latérales des classes (celle du côté nord est peut-être existante mais masquée par un appentis ajouté). L'exploitation, forte d'un troupeau d'une vingtaine de vaches, cesse son activité en 1993 (oral).
Description
La mairie-école est implantée juste à côté de la nouvelle église, à l'angle de la route du Chef-lieu et du chemin de Chainaz-les-Frasses. L'édifice aligne cinq travées et comprend un sous-sol, un rez-de-chaussée, un étage carré et un comble perdu. Le sous-sol est composé de deux caves, accessibles par une porte en façade (le plan de 1865 prévoit un escalier intérieur). Le rez-de-chaussée comprenait deux classes, celle des filles au nord (actuellement : remise) et celle des garçons au sud (oral ; actuellement recloisonnées), séparées par un vestibule traversant dans lequel se trouve l'escalier. A l'étage se trouvaient les appartements et la salle de mairie (voir plan ; dispositions modifiées). Les façades sont dépourvues d'avant-corps ou de modénature, mais animées par la variété des linteaux : en bâtière pour la porte principale, en arc segmentaire pour les fenêtres du rez-de-chaussée, droits pour les fenêtres de l'étage. Un balcon filant en béton dessert la porte du rez-de-chaussée. Une remise en appentis est adossée du côté nord.
L'édifice est en maçonnerie enduite au ciment, avec des encadrements en molasse. Le toit est à croupes, en ardoise.
Chercheur au service de l'Inventaire Rhône-Alpes puis Auvergne-Rhône-Alpes (1999- )