L’arrêté ministériel du 4 juillet 1967 annule et remplace l’arrêté du 5 janvier 1967 portant agrément de M. Calder, sculpteur, pour la réalisation de la décoration au titre du 1 du lycée technique Jean Bart à Grenoble : M. Calder, sculpteur, demeurant à Saché (Indre-et-Loire) est agréé pour exécuter un stable en tôle noire découpée, de 8 m de hauteur environ, qui sera placé entre le stade et le plateau d’éducation physique.

À l’occasion d’une exposition internationale sur l’œuvre du sculpteur américain (source : A ARA 513W14) : ‘Les Monuments de Calder’, présentée d’abord sur le parvis de la Défense en 1992, puis par la Kunst und Austellungshalle de Bonn, du 2 avril au 30 septembre 1993, la sculpture créée pour le lycée Jean-Bart / André Argouges est demandée en prêt. Le contrat de prêt est signé le 25 mars 1993, pour une valeur assurée de 3 millions de francs, pour la seule manifestation à Bonn. Le prêt favorise la restauration de l’œuvre, trouvée alors en mauvais état. À l’issue de la manifestation, l’œuvre n’est pas encore retournée à sa place initiale, à l’entrée du lycée. En effet, dès décembre 1992, il est envisagé de la présenter sur le parvis du nouveau musée de Grenoble (courrier de Alain Carignon à Guy Poirieux, vice-président du conseil régional, du 11 décembre 1992), ce qui apparaît « comme la solution qui contribuerait le plus favorablement à la mise en valeur et au rayonnement de cette œuvre, la rendant également accessible à tous ». Guy Poirieux répond « qu’il est souhaitable que les œuvres d’art restent au sein des établissements et contribuent ainsi par leur présence à l’éducation artistique des jeunes lycéens » (courrier du 18 janvier 1993). Le président du conseil régional, Charles Millon ajoute, dans son courrier du 15 janvier 1993 adressé à Alain Carignon, que « La Région a en charge la conservation et la valorisation de l’ensemble du patrimoine des établissements scolaires dont cette œuvre fait partie intégrante. Vous comprendrez donc qu’il ne m’est pas possible de donner une suite favorable à votre demande de transfert au Musée de Grenoble. De plus, la présence d’œuvres d’art dans des lieux de vie tels que les établissements scolaires me paraît un élément important d’amélioration du cadre de vie et contribue à éveiller en chaque jeune le goût des arts. Les œuvres artistiques doivent en effet faire partie de leur quotidien et ne pas se trouver concentrées uniquement dans des lieux conçus à cet usage ».

L’affaire ne s’arrête pas là. Le député de l’Isère, Philippe Langenieux-Vilard, souligne dans son courrier adressé à Charles Millon en date du 27 septembre 1993, que cette décision « constituait un soulagement pour la famille Calder, et en même temps, une preuve formidable de l’investissement régional dans le musée de Grenoble ». D’autres transactions semblent avoir lieu, dont les archives ne se font pas totalement l’écho pour l’instant. Car le 11 janvier 1994, le maire de Grenoble Alain Carignon remercie chaleureusement Charles Millon d’avoir accepté le dépôt de l’œuvre de Calder au musée de Grenoble, en échange d’une autre œuvre. Monsieur Loyal avait souffert des transports de Grenoble à Paris, de Paris à Bonn, de Bonn à son lieu de stockage provisoire à Chalon-sur-Saône. Une restauration est à nouveau nécessaire avant son implantation devant le musée de Grenoble.

Qu’est-ce qui a conduit Charles Million à changer d’avis ? La transaction ne se cantonne pas au changement de place de la sculpture : il s’agit d’obtenir une contre partie : il s’agira d’un prêt, avec retour de l’œuvre sur son lieu d’origine à l’issue de la durée déterminée. Le lycée André-Argouges donne son accord de principe du prêt de l’œuvre au musée de Grenoble dans sa délibération du 29 novembre 1993, moyennant les conditions suivantes : une durée de prêt limitée à un an ; la mention du prêteur toute la durée de l’exposition ; le prêt d’une œuvre d’intérêt artistique et patrimonial comparable simultanément au lycée ; la mise en œuvre d’un partenariat pédagogique ; la réinstallation du stabile dans le lycée, sans coût financier pour l’établissement. Il est souhaité également que soit impliquée dans la réflexion du retour de l’œuvre l’Union des Habitants du Quartier, qui manifestent leur intérêt certain pour l’œuvre de Calder. La réponse de Alain Carignon est sans équivoque : la sculpture d’Alexander Calder ne sera pas « l’otage innocent d’un discours dont les fondements pourraient se trouver sur d’autres terrains que ceux de l’art et de la culture. [Il] formule le vœu que pour les grenoblois, le nom de Alexandre Calder soit associé au rassemblement et au partage et non à la dissension… [il] ne saurait l’imaginer et préférerait abandonner tout soutien à la demande du musée plutôt que de donner le sentiment de vouloir soustraire un objet d’éducation à un établissement scolaire et un quartier. [… Il] souhaite que l’œuvre de Alexandre Calder soit le moteur de découvertes et de rencontres. Existe-t-il un endroit plus propice qu’un musée pour illustrer la multiplicité des histoires nationales et des cultures, des identités et des races, des civilisations et des croyances ? » (Courrier de Alain Carignon, maire de Grenoble, au président de l’Union des Habitants du Quartier Abbaye Jouhaux, 29 novembre 1993).

L’œuvre est installée devant le musée de Grenoble fin 1993, le musée est inauguré en 1994. Mais l’institution fournit au lycée André Argouges une œuvre de remplacement seulement en 1999 : un vide juridique perdure alors, que les nouveaux protagonistes s’emploient à combler (source : A ARA 1520 W 16). Le musée de Grenoble (Daniele Bal, conservateur) propose l’œuvre des artistes suisses Albert Siegenthaler (1938-1984) et Willy Müller-Brittnau (né 1938), Le Grand Cadre, acquise en 1970 par le musée de Grenoble (IM38001088). Il s’agit d’une œuvre en acier, peint de couleurs vives, de 600 x 400 cm, signé et daté sur la base : SIEGENTHALER MÛLLER-BRITTNAU U. SCH 1970. En 1999, le lycée André-Argouges est en cours de réhabilitation, et les abords sont à repenser. Une réflexion est engagée sur l’installation du Grand Cadre, en replacement de Monsieur Loyal. Conçue pour l’extérieur, Grand Cadre devrait être implanté sur le parvis du lycée. Les partenaires sont sollicités, sous l’égide de la Ville de Grenoble : la Région Rhône-Alpes, l’architecte, le proviseur du lycée, l’éducation nationale, la DRAC, l’association Vie des Quartiers.

Actuellement, l’œuvre Grand Cadre est installée dans la cour intérieure du lycée, face au kiosque de Ibai Hernandorena installé en 2012.

La recherche devra être poursuivie dans les archives, tant du musée de Grenoble et de la ville de Grenoble que la Région, pour retrouver les documents de partenariat conclus à partir de 1999.