HISTORIQUE
Depuis le lancement, à l'époque médiévale, d'un pont en charpente de bois sur le Rhône à Seyssel les reconstructions ont été fréquentes et onéreuses. Le dernier pont en bois datant de 1822 est emporté par les eaux en 1834. Une traille est de nouveau mise en place pour s'y substituer et assurer la traversée du fleuve. Dès lors, il semble que les ingénieurs pensent à établir un ouvrage plus solide afin de résister aux crues du Rhône. L'idée d'un pont suspendu, type alors en vogue, émerge rapidement (FENOUILLET, p. 211).
L'ouvrage, dont la construction est projetée en 1837 (AD Haute-Savoie, 10 FS 8), est édifié entre 1838 à 1840 pour remplacer l'ancien pont de charpente et faciliter le passage sur le fleuve (BROCARD, p. 85 ; DUFOURNET, 1993, p. 29). Dans les publications antérieures, on trouve aussi les dates de 1842 (KIRCHNER, p. 8) et 1840 à 1842 dans Fenouillet (p. 211) et Avezou (p. 63), suivis par Dufournet (rééd. 1980, p. 71).
Ces derniers précisent que l'ouvrage, bâti par l'Etat français avec le concours du département de l'Ain, a été construit sur les dessins d'un ingénieur de Lyon ; sa dépense s'élève à 50 000 F (FENOUILLET, p. 211-212 ; DUFOURNET, rééd. 1980, p. 71).
Selon Dufournet, les Seysselans doivent le nouveau pont à l' "influence active" de M. Montanier, conseiller-maître à la Cour des Comptes, à qui ils doivent également les quais en pierre de taille aménagés à Seyssel de 1844 à 1848 (DUFOURNET, rééd. 1980, p. 72).
L'ouvrage édifié, de type suspendu à pile unique, présente au-dessus de la pile un pylône en forme d'arc monumental.
Les câbles de suspension viennent, depuis les angles de ce pylône, "s'enfoncer en terre dans des puits" situés aux extrémités du pont. Cette disposition présente l'avantage que si un accident se produit à l'un des câbles, un des côtés du pont seulement serait endommagé, les deux parties de pont étant indépendantes l'une de l'autre (FENOUILLET, p. 212).
En 1856, les villageois font ériger sur le pylône une grande statue de la Vierge, en pierre, pour perpétuer le souvenir de l'ancienne statue de Notre-Dame du Rhône - une Vierge noire - qui était abritée dans la chapelle établie sur la pile de l'ancien pont, puis mise en place dans l'église de Seyssel-Ain après la Révolution (FENOUILLET, p. 212 ; DUFOURNET, rééd. 1980, p. 76 ; BROCARD, p. 85 ; DUFOURNET, 1993, p. 28).
Cette statue, dont la dépense totale s'élève à 4 ou 5 000 F, a été sculptée en pierre blanche de Saint-Just, par MM. Roche et Vaganay, sculpteurs à Lyon (FENOUILLET, p. 212 ; DUFOURNET, rééd. 1980, p. 76). Le piédestal sur lequel elle repose a été dessiné par M. Bernard, ingénieur à Belley, et exécuté par Victor Nogé, tailleur de pierre (DUFOURNET, rééd. 1980, p. 76).
Elle est inaugurée le 29 juin 1856, par les évêques de Belley et d'Annecy (FENOUILLET, p. 212-213 ; DUFOURNET, rééd. 1980, p. 76-77).
On possède une soumission en date du 6 août 1891, signée par Ferdinand Arnodin, qui fait état d'une réparation au pont suspendu de Seyssel (AD Ain, 2S 98).
Un marché est passé avec le même ingénieur-constructeur le 3 mars 1893 pour la "réfection des amarrages aux culées du pont". Ce projet comporte notamment le remplacement des poutrelles en bois par des poutrelles en acier, le changement des extrémités des câbles à la base de la pile, l´isolement des nouveaux câbles d´avec la maçonnerie de la pile et enfin, le relèvement de l´amarrage au-dessus des crues du Rhône. Les travaux, exécutés en 1892, sont reçus le 10 janvier 1894, les épreuves par poids mort et par poids roulant ayant donné d´ "excellents résultats" (idem).
Au début du siècle suivant, le même Arnodin se voit chargé des travaux de substitution d'un garde-corps métallique au garde-corps en bois. La réception définitive de ces travaux est faite le 18 janvier 1903 (idem).
En mai 1909, l´ingénieur de Belley donne son avis sur la charge roulante que peut supporter le pont suspendu : "On peut admettre, comme charge limite, le passage de véhicules pesant ensemble 12 tonnes, y compris tracteur en ordre de marche et remorque chargée" (AD Haute-Savoie, 2S 294).
En 1939, des travaux sont prévus pour reconstituer le massif d´enrochements de la pile centrale, qui s'est érodé (AD Rhône, 3959W 1744)
Le pont suspendu de Seyssel, comme de nombreux autres ponts sur le Rhône, est détruit par le Génie français en juin 1940, pour freiner l'armée allemande (AD Rhône, 3959W 1744 ; KIRCHNER, p. 11).
L'ouvrage est rapidement rebâti (KIRCHNER, p. 11).
Mais, assez vite sans doute, il commence à devenir insuffisant pour répondre à l'accroissement du trafic routier ; la nécessité d'édifier un nouveau pont se fait jour dans les années 1960 (AD Rhône, 3959W 1744).
En 1970, alors que des études sont en cours dans ce but, un pont provisoire de type Bailey est lancé sur le fleuve pour soulager l'ouvrage ancien (AD Rhône, 3959W 1744 ; BROCARD, p. 85). Pendant cette période, ce dernier subissait des travaux de renforcement (AD Rhône, idem) ; on sait que sa charge est, au début des années 1990, limitée à 3,5 tonnes (BROCARD, p. 85).
Le nouveau pont de Seyssel (pont à haubans), en aval du pont suspendu, ouvre à la circulation à l'été 1987.