Dossier d’œuvre architecture IA38000983 | Réalisé par
  • enquête thématique régionale, Patrimoine industriel
centrale et barrage de Livet basse-vallée de la Romanche
Œuvre monographiée
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  • © Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Rhône-Alpes patrimoine industriel
  • Commune Livet-et-Gavet
  • Lieu-dit
  • Adresse route de l'Oisans
  • Dénominations
    centrale hydroélectrique

Sur le cours moyen de la Romanche, devant la nécessité de réhabiliter six centrales actuellement en fonctionnement sur la commune de Livet-et-Gavet (Isère), Electricité de France (EDF) a fait le choix industriel de construire un nouvel aménagement[2] essentiellement souterrain, plus performant à l’échéance de 2018-2020. A terme, la vallée ne comprendra plus qu’une seule centrale, un seul barrage-prise d’eau et une seule galerie d’amenée au lieu des six centrales, des cinq barrages et des quelque 7,5 km de conduites forcées aménagées le long du cours d’eau. Cinq centrales sur six vont certainement être démolies ainsi que cinq barrages et leurs ouvrages annexes. L’annonce d’un tel bouleversement mérite que l’on revienne une nouvelle fois, même rapidement, sur la valeur de cet ensemble unique, avant d’évoquer les perspectives de sa préservation partielle.

Valeur historique et patrimoniale d’un paysage de l’hydroélectricité

Ce paysage au fil de l’eau date pour l’essentiel de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Non que le paysage antérieur soit celui, mythifié, du « Grand Oisans sauvage » : rappelons que le territoire de la Basse-Romanche est anthropisé depuis des siècles, depuis la voie romaine de l’Oisans jusqu’aux multiples installations hydroélectriques[3]. C’est bien toutefois cet ensemble industriel qui retient l’attention par sa forte capacité à faire système dans le réseau hydraulique complexe de la vallée. En 2012, dans son rapport de fin d’étude, Philippe Grandvoinnet[4] soulignait toutes les valeurs historique et patrimoniale des éléments industriels de la vallée de la Romanche qui tiennent autant à leur densité, à leur diversité et à leurs qualités architecturales et techniques, qu’à la cohérence et l’équilibre d’un ensemble exceptionnel. Cette dimension emblématique repose sur différents facteurs : une durée de vie des centrales qui a conduit à la juxtaposition d’outils de production de différentes périodes, une forte concentration d’installations interconnectées par le fil de l’eau, et un gestionnaire unique, EDF depuis la nationalisation de 1946.

Le potentiel hydroélectrique de la Basse-Romanche est en lien direct avec l’évolution des techniques de l’électrolyse et de l’électrothermie, exploitées dès la fin du XIXe siècle et l’implantation d’industries chimiques et électrométallurgiques, tel que l’aluminium en 1891, le carbure de calcium en 1894, la soude caustique, le chlore et le chlorure de chaux en 1897[5]. A partir de la Première Guerre mondiale, ces industries vont glisser vers l’aval, à la confluence du Drac et de la Romanche (Jarrie et le Pont-de-Claix), le sud de Grenoble devenant l’un des grands pôles de la chimie de base française[6], associant la production du chlore et la chloration de divers dérivés du pétrole. En matière d’usage de l’énergie produite, on change d’échelle : aux centrales de Basse-Romanche s’associent d’une part  la ville de Grenoble[7] dont elle fut le pourvoyeur désigné (turbines Neyret-Brenier), d’autre part Firminy dans la Loire, destinataire du courant produit par la Société des forges et aciers lorsque son usine de Rioupéroux ne fonctionnait pas.

[1] http://www.isere-patrimoine.fr/2288-les-centrales-de-la-romanche-en-question.htm#par30488 ; inventaire des centrales de la Romanche réalisé en 2010 par le Service Patrimoine culturel du Conseil général de l’Isère.

[2] Un grand projet pour EDF, un nouveau visage pour la vallée de la Romanche, Brochure EDF, 2013.

[3] Anne Cayol-Gerin, Dominique Chancel, La Romanche, chronique d’une mutation, dans « Les Paysages de l’électricité : perspectives historiques et enjeux contemporains (XIXe-XXIe siècle) », colloque organisé à Bordeaux par la Maison des sciences de l’homme d’Aquitaine et la Fondation EDF Diversiterre, les 18 et 19 novembre 2010, à paraître.

[4] Philippe Grandvoinnet, Vallée de la Romanche, le patrimoine hydro-industriel dans la dynamique territoriale alpine, projet de fin d’étude, Formation des architectes urbanistes de l’Etat (AUE), juin 2012, p. 13.

[5] Philippe Grandvoinnet, op. cit., p. 11.

[6] Henri Morsel, Jean-François Parent, Les industries de la région Grenobloise, itinéraire historique et géographique, PUG, 1991, p. 127.

[7] Alpes électriques, paysages de la houille blanche, Dire l’entreprise, 2011, p. 149.

La première centrale hydroélectrique construite dans la basse vallée de la Romanche est celle de Livet créée par l’ingénieur

Edouard Lullin et mise en service par la Société Electrochimique de la Romanche pour produire de la soude et du carbure de calcium. Elle est composée de deux

unités, mises en service à deux périodes différentes : en 1898-99 pour Livet I et en 1905 pour Livet II, qui se distinguent par leurs

dimensions et leurs architectures. Par ailleurs, ayant remporté l'appel d'offre pour la fourniture d'électricité destinée à éclairer la ville de Grenoble, la Société

Electrochimique de la Romanche (SER) créa une seconde centrale en 1905, tout en louant une partie de sa production à la société Keller et Leleux qui deviendra

propriétaire de la centrale double en 1906 pour la production de ferroalliages au four électrique.

Livet I se caractérise par une typologie assez classique de centrales de moyenne puissance rencontrée dans les régions alpines : un modèle simple et fonctionnel qui se

caractérise par une longue salle des machines rectangulaire de type halle industrielle entièrement en pierre, définie par le nombre de groupes, à charpente

métallique et lanterneau, surmontée d’un pont roulant. La jonction des deux centrales est réalisée après 1925.

Le bâtiment de Livet II, est le plus remarquable du site. Il se distingue par son toit terrasse et sa façade ouverte de hautes baies en plein-cintre (véritable verrière), en pans de fer vitrés. Il est surmonté d’une chambre de mise en charge, dont « le trop plein » (chute d’eau de 60 m en train de déverser) fait la couverture de « l’Illustration » du 13 juin 1925. La centrale fonctionne avec le barrage de l’Infernet (ou barrage de Livet), localisé en amont de cette dernière. Un vitrail de l’église de Livet réalisée par un peintre verrier de Grenoble « A. F. BERNARD, 1927 » (date portée), représente le village ainsi que l’usine et la centrale.

L’ensemble abrite 6 groupes horizontaux dont 5 sont en fonction aujourd’hui : 4 groupes dans Livet II (G0, G1, G2, G3) et 2 groupes dans Livet I G4 prototype et G5 endommagé, équipés de turbines Francis couplées avec des alternateurs, un poste de transformation et un canal de fuite, d’une puissance totale de 10 MW (débit d’équipement de 28 m3/s, et d’une hauteur de chute de 56 m). A noter, la complémentarité entre les centrales de Livet et des Vernes : la centrale des Vernes réutilise directement l’eau qui vient d’être turbinée par Livet sans repasser par la rivière. Éléments marqueurs du paysage avec les barrages, les conduites forcées, les pylônes, les chambres de mise en charge, la centrale de Livet appartient à ce patrimoine hydroélectrique remarquable de la vallée de la Romanche et fait preuve pour Livet II d’une véritable audace bien avant la construction des Vernes. Cet ensemble mérite à ce titre une protection au titre des monuments historiques en incluant les machines pour que cela garde tout son sens. La disparition de ces éléments contribuerait à effacer un paysage marqué par une identité industrielle très forte, et laisserait la place à un paysage standardisé.

  • Période(s)
    • Principale : 4e quart 19e siècle, 1er quart 20e siècle
  • Dates
    • 1898, daté par source
    • 1905, daté par source

La centrale de Livet se caractérise par deux bâtiments distincts. Livet I se caractérise par une typologie assez classique de centrales de moyenne puissance rencontrée dans les régions alpines : un modèle simple et fonctionnel qui se caractérise par une longue salle des machines rectangulaire de type halle industrielle entièrement en pierre, définie par le nombre de groupes, à charpente métallique et lanterneau, surmontée d’un pont roulant.

Le bâtiment de Livet II, est le plus remarquable du site. Il se distingue par son toit terrasse et sa façade ouverte de hautes baies en plein-cintre (véritable verrière), en pans de fer vitrés. Il est surmonté d’une chambre de mise en charge, dont « le trop plein » (chute d’eau en train de déverser) fait la couverture de « l’Illustration » du 13 juin 1925. La centrale fonctionne avec le barrage de l’Infernet (ou barrage de Livet), localisé en amont de cette dernière.

  • Toits
    verre en couverture
  • Escaliers
    • escalier dans-oeuvre : escalier en vis
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Précisions sur la protection

    Cette centrale est passée devant la commission régionale de protection des sites en 2015, en attente d'un projet de reconversion.

la centrale de Livet appartient à ce patrimoine hydroélectrique remarquable de la vallée de la Romanche et fait preuve pour Livet II d’une véritable audace esthétique bien avant la construction des Vernes. A la demande d'EDF et dans le cadre de "vigipirate" les photographies des intérieurs de la centrale ne sont pas diffusables.

L'ensemble des six centrales et barrages de la vallée de la basse-Romanche est menacé de démolition par EDF. Un programme de construction d'une nouvelle centrale à Vizille va entraîner la démolition de 5 centrales et barrages de la vallée de la Romanche qui entraînera à terme la disparition d'un paysage d'une très grande qualité.

Pour citer cette étude : Nadine Halitim-Dubois, la centrale hydroélectrique de Livet, 2015. URL : https://patrimoine.auvergnerhonealpes.fr/recherche/globale?texte=centrales+romanche&type=Dossiers

Bibliographie

  • Olivier Zimmy, Réflexions sur la conservation et la mise en valeur du patrimoine

    hydroélectrique de la moyenne Romanche, musée EDF Hydrelec, 2007.

  • Philippe Grandvoinnet, Vallée de la Romanche, le patrimoine hydro-industriel dans la dynamique

    territoriale alpine, projet de fin d’étude, Formation des architectes

    urbanistes de l’Etat (AUE), juin 2012, p. 13.

  • Henri Morsel, Jean-François Parent, Les industries de la région Grenobloise,

    itinéraire historique et géographique, PUG, 1991

    Région Auvergne-Rhône-Alpes, SRI, site de Lyon
  • Jean-François Lyon-Caen, Jean-Claude Ménégoz, Cathédrales électriques, architecture des centrales hydrauliques du Dauphiné, musée Dauphinois, 1989, 155, 156.

    p. 111-115, 155, 156
  • Alpes électriques, paysages de la houille blanche, Dire l’entreprise, 2011

  • Nadine Halitim-Dubois, Centrales hydroélectriques de la Basse-Romanche: une disparition annoncée en 2018-2020, L’archéologie Industrielle en France - AIF n° 64, juin 2014

    p. 13, 14, 15, 16
  • Jean-François Belhoste Fer, fonte, acier. Rhône-Alpes, XVe-début XXe siècle, Image du

    patrimoine n° 85, 1992, p. 97

    p. 97
  • Geneviève Dufresne et Beranrd André, « Du

    papier à l’hydroélectricité. Autour de Grenoble. Week-end du Cilac, 16 et 17

    juin 2006), dans l’Archéologie

    industrielle en France, n° 48.

    p. 38-43

Périodiques

  • Centrales & Barrages de Moyenne Romanche, 01/09/2008-14/26 (documentation EdF),

  • Un grand projet pour EDF, un nouveau visage pour la vallée de la

    Romanche, Brochure EDF, 2013 (archives EDF)

Documents multimédia

  • http://www.isere-patrimoine.fr/2288-les-centrales-de-la-romanche-en-question.htm#par30488 ;

    inventaire des centrales de la Romanche réalisé en 2010 par le Service

    Patrimoine culturel du Conseil général de l’Isère.

Date(s) d'enquête : 2014; Date(s) de rédaction : 2014
© Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel