C’est grâce à la création de ce boulevard que des projets d’aménagement et d’urbanisation sur les bords de lac deviennent envisageables. Auparavant marécageux, régulièrement inondés par les variations de niveau du lac, les terrains étaient peu propices à la déambulation comme à l’implantation de constructions. L’inhospitalité de ces lieux se traduit par leur quasi-absence dans les représentations iconographiques tout comme dans les guides touristiques, lesquels recommandent un itinéraire passant à l’intérieur des terres pour relier le Grand Port au Petit Port. Les représentations de cette partie des bords de lac, entre Tillet et Sierroz, ainsi que leur mention comme lieu de promenade dans les guides, n’apparaissent qu’après 1930. Qualifié de boulevard, cet ouvrage implanté dans le lac est avant tout une digue permettant de structurer et de protéger les rives. Son achèvement, et le remblaiement progressif des terrains situés à l’est, terminé en 1951 (Délibération du conseil municipal, 5 janvier 1951), permettent dès lors de bâtir dans ce secteur, conformément à ce que la municipalité avait envisagé dès le début de l’opération.
En effet, dès 1906, la Ville projetait, par-delà la création d’une promenade, de mettre en valeur les terrains communaux situés le long du rivage. La revente de ces derniers, après l’achèvement de l’opération, devait financer une grande partie des travaux engagés. Cette volonté initiale explique les nombreuses hésitations ultérieures concernant l’affectation de ces terrains, tantôt lotis, tantôt inoccupés. En 1924, alors que le chantier de construction du boulevard est en cour, la Ville envisage à nouveau différents scénarios de construction (voir Image Scénarios de profils : largeurs de 20m, 30m, 40m) ainsi que de prendre un arrêté réglementant les constructions en bordure de lac, qui impose un recul de 20 mètres par rapport au boulevard pour ménager des jardins, des clôtures identiques et continues, une limitation de hauteur et une orientation des constructions (AD Savoie. 2 O 320. Règlement particulier portant contrôle des constructions en bordure du boulevard du Lac. Projet d’arrêté. 1924) (voir Projet de réglementation des constructions). Face aux difficultés financières et administratives que peut occasionner l’établissement d’une zone de servitude, la municipalité abandonne ce projet et forme, en 1928, de nouveaux desseins pour l’affectation de ces terrains. Elle envisage d’abord la création d’un parc (Délibération du conseil municipal, 17 août 1928), puis d’un parc bordé de villas de luxe (Délibération du conseil municipal, 9 novembre 1928), nécessitant l’acquisition de terrains supplémentaires à l’est (Délibération du conseil municipal, 12 août 1929). A cette fin, mais aussi pour prolonger le boulevard du Lac jusqu’à la route du Viviers et pour aménager la Plage municipale, la Ville obtient une déclaration d’utilité publique, signée le 18 avril 1931 (Délibération du conseil municipal, 14 septembre 1932). A partir de cette date, elle acquiert progressivement les parcelles privées situées en bordure du rivage, entre le Tillet et le Sierroz (voir les plans parcellaires de 1906, 1910, 1920 et 1930). Idéalement placés et immédiatement disponibles pour une opération d’aménagement, ces terrains communaux, font l’objet d’une grande attention dans les projets urbains de la seconde moitié du XXe siècle. A la fin des années 1960, l’affectation de ces terrains à l’espace public et l’interdiction de la circulation automobile sur le boulevard du Lac, transférée sur le boulevard Barrier, consacrent cette partie des rivages comme lieu de promenade.