TEXTE COMPLEMENTAIRE
I. HISTORIQUE
En 1821, l´ingénieur des mines Louis Beaunier et plusieurs propriétaires de mines de Saint-Etienne (Loire) crée une association pour établir un chemin de fer desservant le territoire houiller de Saint-Etienne. La concession est accordée par le roi le 26 février 1823 ; les 3 et 4 juin 1824, la société anonyme Compagnie du Chemin de fer de Saint-Etienne à la Loire est constituée avec Beaunier comme directeur général. La ligne Saint-Etienne - Andrézieux, d´une longueur de 21 km 286 et d'un écartement de 1 m 44, est ouverte le 1er octobre 1828 : c´est un chemin de fer à une seule voie, avec rail en fonte reposant sur des coussinets de fonte fixés à leur extrémité sur des dés de pierre ; les chevaux tirent des convois de 3 wagons portant 30 hectolitres de charbon, soit un tonnage de 120 000 tonnes.
Dans le même temps, les frères Camille, Paul, Charles, Marc et Jules Seguin, d´Annonay, et l´académicien Edouard Biot, demandent l´autorisation de construire un chemin de fer de Saint-Etienne à Lyon. La concession, accordée à Seguin frères, E. Biot et Cie le 7 février 1826, est approuvée par le roi le 7 juin. Les concessionnaires souscrivent un traité avec le maire de Lyon qui le présente au conseil municipal le 2 juin 1826 : la Ville de Lyon leur cèderait dans la presqu´île de Perrache une masse de terrain d´environ 283 000 mètres carrés avec plusieurs obligations, dont celle de faire venir, à l´extrémité méridionale de la chaussée Perrache, le chemin de fer qu´ils sont chargés d´établir de Saint-Etienne à Lyon, en suivant le cours Rambaud jusqu´à la gare, et de cette gare jusqu´à l´endroit de la ville qui sera indiqué à cet effet par la direction générale des Ponts et Chaussées.
Le 6 mars 1827, la nouvelle compagnie dépose ses statuts : la direction et la conduite des travaux est assurée par Marc et Jules Seguin, et Edouard Biot.
L´ordonnance royale du 4 juillet 1827 fixe le tracé du chemin de fer depuis Saint-Etienne jusqu´à la jonction du Rhône et de la Saône, mais ajourne le choix de la direction à donner à ce chemin à travers la presqu´île Perrache, jusqu´à ce que les concessionnaires aient présenté, pour cette direction, un projet spécial (Ville de Lyon. Conseil municipal. Procès-verbaux des séances, t. 7, p. 268 ; AD Rhône : S 859).
A la séance du conseil municipal du 12 mai 1828, Jullien, au nom de la commission des objets d´intérêt public sur la direction à donner au chemin de fer, présente son rapport : le maire avait soumis à la commission deux projets partant de l´extrémité méridionale de la presqu´île, depuis le pont sur le Rhône que la Compagnie Seguin et Edouard Biot devaient construire, et arrivant "au cours transversal limitant au nord la nouvelle place Charles X" (rue Marc-Antoine-Petit). La commission adopte le second projet qui ne nécessite pas d´expropriation car le chemin de fer n´emprunte que des voies publiques, ou des terrains appartenant à la Compagnie. La commission s´est également interrogée sur la prolongation de la voie ferrée jusqu´à l´ancienne gare de voitures dans le quartier neuf de Perrache [au nord-ouest du cours de Verdun, actuelle place Gensoul]. Le conseil considérant que ce prolongement entraînerait d´une part la destruction d´une partie de la promenade du cours du Midi (cours de Verdun actuel) et la rupture de son tracé du Rhône à la Saône, et d´autre part l´interruption du chemin de halage le long du cours Rambaud, décide que la gare sera fixée au nord de la gare d´eau : c´est l´embarcadère de Saint-Etienne qui est ouvert en 1829 (fig. 1).
C´est à Perrache que Marc Seguin fait ses premiers essais de locomotive. En 1825, il avait rapporté d´Angleterre deux locomotives avec roues en bois cerclées de fonte malléable, qu´il avait achetées à Stephenson. Il s´en inspire pour mettre au point une chaudière tubulaire à tirage forcé par injection de vapeur. Le 7 novembre 1829, Marc Seguin lance sa première locomotive dans un des chantiers de Perrache, sur un chemin de fer d´essai de 140 m de long : la machine remorque quatre wagons chargés de 15 tonnes de fonte de fer, sur une pente de 14 mm et une courbe de 500 m de rayon. Les maquettes de la locomotive de Marc Seguin et de son tender sont conservées au Musée des Arts et Métiers, à Paris.
La ligne Saint-Etienne - Lyon est réalisée par section : la section Rive-de-Gier - Givors est achevée le 28 juin 1830, Givors - Lyon Perrache le 3 avril 1832, Saint-Etienne - Rive-de-Gier le 1er octobre ; la voie est complètement terminée le 15 décembre 1832 : les rails en fonte ont été remplacés par des rails en fer, et des traverses en bois ont été substituées aux dés de pierre. Le devis établi le 27 octobre 1828 prévoyait un coût de 8 894 777 F. ; la dépense au 31 décembre 1835 était de 15 350 000 F., le dépassement étant principalement dû à l'indemnisation des propriétaires. La voie, d´une longueur de 59,5 km, suit une déclivité de 14 mm/m. Le chemin de fer, d´abord affecté au seul transport de marchandises, est utilisé par les voyageurs, dès 1831 : c´est d´abord un transport populaire sur le même type de wagons que pour les marchandises. La traction des wagons reste assurée par des chevaux jusqu´en 1838 entre Rive-de-Gier et Lyon. A partir de 1844, les locomotives assurent seules la traction entre Saint-Etienne et Lyon. A cette date, le trajet Saint-Etienne - Lyon s´effectue en 2 h 35 minutes. Le nombre de voyageurs passe de 171 468 en 1834 à 756 189 en 1852 (annexe 1).
La voie n´est pas à l´abri des inondations : la crue de 1840 ensable l´embarcadère de Saint-Etienne et emporte le pont de la Mulatière.
Les frères Seguin entreprennent de concentrer en une seule compagnie l´ensemble des chemins de fer entre Loire et Rhône. Avec le concours du duc de Mouchy, sénateur, du banquier Benoît Fould, de G. des Arts, administrateur du Chemin de fer de Saint-Gervais, de G. Delahante, administrateur des Mines de la Loire, les frères Seguin réunissent, en 1852, les lignes de Saint-Etienne à Lyon, de Saint-Etienne à la Loire, d´Andrézieux à Roanne et de Saint-Etienne à Montrambert, en une seule compagnie, la Compagnie des chemins de fer de jonction du Rhône à la Loire, qui obtient une concession d´exploitation de 99 ans. Quelques mois plus tard (1853), elle fusionne avec la Compagnie du Grand central que venait de fonder le duc de Morny, et devient en 1855 la Compagnie du Bourbonnais. Les principaux actionnaires en sont le duc de Galliéra, Emile et Isaac Péreire, Paulin Talabot, Ch. Mallet et les frères Seguin.
Une nouvelle gare, la gare du Bourbonnais, est édifiée en 1845, sur le quai Perrache (cf dossier gare du Bourbonnais).
A partir de 1842, la construction du chemin de fer devient un projet national. A cette date, la France ne dispose que de 566 km de voies ferrées. Le ministre des Travaux publics, Teste, dépose, le 7 avril 1842, un projet de loi sur la construction du chemin de fer. La loi, votée le 13 mai, est rendue exécutable le 30 juin. Le 16 juillet 1845, l´Etat confie la réalisation de la ligne Paris - Méditerranée à deux compagnies : le tronçon Paris - Lyon à la Compagnie Paris à Lyon, comprennant, entre autres, Charles Seguin, Isaac Péreire, le duc de Galliéra, et le tronçon Lyon - Avignon à la compagnie Lyon - Méditerranée, de Paulin Talabot. Cette dernière, dissoute le 11 octobre 1847, est rachetée par l´Etat en 1848. Les deux compagnies fusionnent, le 11 avril 1857, dans la Compagnie Lyon - Paris - Méditerranée (Cie PLM), dirigée par Paulin Talabot.
Pendant ce temps, les discussions ont été vives à Lyon sur le choix de l´itinéraire des voies et de l´implantation de la gare. Le choix de la construction de la gare à Perrache est arrêtée le 12 novembre 1845, mais plusieurs trajets sont envisagés (fig. 4, 7-11). Le 28 décembre 1849, l´administration décide de ne construire qu´une seule gare pour les deux lignes (Paris - Lyon et Lyon - Avignon). La ville vend les terrains nécessaires à la Compagnie du chemin de fer le 1er juin 1853 ; les travaux sont dirigés par l´ingénieur en chef, Jullien, et par l´architecte Alexis Cendrier. Le chemin de fer de Paris arrive à Vaise le 10 juillet 1854. La percée du tunnel de Saint-Irénée, sous la colline de Fourvière, nécessite plus de deux ans : l´ouvrage, entièrement maçonné, s´étire sur 2108 m de long et 8 m de large ; la hauteur sous voûte atteint 5 m 70 ; 5 puits d´aérage en garantissent la ventilation. Les travaux sont menés par les entrepreneurs Mangini et Devos, sous la conduite de l´ingénieur Chaperon (fig. 28, 32). Le pont de la Quarantaine (cf dossier pont) assure le franchissement de la Saône. Le 16 avril 1855, la voie du sud arrive à Perrache. La jonction avec la voie du nord se fait le 10 novembre 1856, grâce à une plate-forme, également construite par Mangini et Devos, surélevée de 6 m. sur trois voûtes (fig. 17, 18), qui permet le franchissement du cours Charlemagne et la mise à niveau des deux sections de voies. La gare de voyageurs est construite au-dessus de cette plate-forme ; elle est inaugurée le 1er juin 1857 (cf. dossier gare de Perrache ; fig. 16).
La ligne Paris - Lyon - Marseille, dite "ligne impériale" est à double voie dès l´origine. D´une longueur totale de 862 km 125, elle suit une déclivité de 5 mm/m.
La gare de marchandises dite Perrache 2 se développe au sud (cf dossier).
Avec l´intensification du trafic, il devient rapidement nécessaire de construire de nouvelles voies : en 1890, le bâtiment sud de la gare est détruit et remplacé par 3 voies supplémentaires et un quai, couverts d´une 2e halle. A la veille de la Première Guerre mondiale, le trafic est de 262 trains par jour ; 558 016 tonnes de marchandises sont traitées au cours de l´année 1913 (3e rang pour les gares lyonnaises ; fig. 44).
A partir de 1926, un encorbellement au-dessus de la rue Dugas-Montbel permet d´aménager 3 nouvelles voies et un cinquième quai (fig. 20, 27, 61-63) .
La gare de marchandises, Perrache 2, est réaménagée en 1928 (cf. dossier gare de marchandises Perrache 2).
Les travaux d´électrification des lignes commencent en 1949, entraînant la construction de sous-stations électriques, et d´un 2e poste d´aiguillage, Perrache 2, en 1951-1953 (cf. dossier AIGUILLAGE Perrache 2). La section Châlon-sur-Saône - Lyon Perrache - Guillotière est électrifiée le 26 mai 1952, le tronçon Lyon Guillotière - Chasse-sur-Rhône le 13 mai 1954.
Dans la seconde moitié du XXe siècle, plusieurs travaux d´aménagement se succèdent : construction de nouveaux quais, côté Saône et Rhône, sous abris parapluie (fig. 32, 33) ; modification de la liaison gare-ville avec la construction du Centre d´échanges en 1975 (cf. dossier gare routière ; centre commercial ; parc de stationnement ; jardin public, dits Centre d 'échanges de Lyon- Perrache), ce qui entraîne la modification du parvis de la gare ; la ligne A du métro utilise la voûte centrale comme tiroir de manoeuvre.
En 1981, la gare s´adapte à la circulation des TGV : la passerelle du Centre d´échanges traverse la gare, passe au-dessus des voies et débouche sur le cours Charlemagne par un escalier mécanique.
Les nouveaux quais TER, dits quais Saint-Etienne, sont inaugurés le 22 mars 1999 : installés perpendiculairement au faisceau des voies principales, ils sont couverts d´abris traités en métal et bois. Ils évitent désormais le rebroussement des trains sur le pont de Saône (fig. 40).
En 2000, la voûte orientale est utilisée comme voie de tramway.