Le plan d´aménagement de la presqu´île d´Antoine-Michel Perrache (fig. 5) détermine deux grands axes permanents du système de voirie : une voie nord-sud le long du Rhône (chaussée, puis quai Perrache, fig. 26 ; cf. dossier IA69000477) et un axe perpendiculaire (cours Bertin, puis cours du Midi, actuellement cours de Verdun, fig. 69 ; cf. dossier IA69000809).
Au début du XIXe siècle, les préoccupations s´orientent vers le tracé de la voie longeant la Saône, d´abord chemin de halage, puis quai (futur quai Rambaud).
C´est le plan de distribution de 1826 qui fixe le plan orthogonal du réseau viaire (fig. 6). Dès le 13 juillet 1825, le conseil municipal arrête les dispositions principales de ce réseau, déterminant la largeur des axes déjà tracés (32 m pour les deux quais) et fixant l´orientation et la largeur des rues à ouvrir : une voie centrale nord - sud de 20 m de large (futur cours Charlemagne, fig. 18, 29), avec de part et d´autre deux voies secondaires parallèles de 13 m de large (futures rues Delandine, fig. 44-46, et d´Alger, puis Claudius-Collonge), et deux autres voies transversales (futurs rue Dugas-Montbel, fig. 15, 36-40, et cours Suchet, fig. 13, 21, 22), également prévus à 13 m de largeur. Ces huit rues dessinent des masses de terrains à bâtir de dimensions égales (annexe 1). Dans la mise en place du réseau, seule la largeur des voies va évoluer : élargissement des cours Charlemagne et Suchet à 33 m par l´ordonnance royale du 7 mars 1827 (annexe 2), puis nouvel élargissement en novembre 1828 (annexe 3). En revanche, le plan est beaucoup plus hésitant quant aux places (fig. 6-8) : si le dessin de la place Louis XVIII (actuelle place Carnot), repris du plan d´A.-M. Perrache, est arrêté dès l´origine, celui des places de la presqu´île évolue : une place trapézoïdale est d´abord prévue le long de la Saône, à l´ouest de la prison Saint-Joseph, avant que l´emplacement définitif de la prison ne soit arrêté à la chaussée Perrache (annexe 1) ; une place demi-circulaire aurait occupé le centre de la presqu´île et une autre le débouché du pont de la Mulatière (annexe 4 ; fig. 7). Après la signature de la convention avec la Compagnie Seguin et la décision de la construction de la gare d´eau, seule subsiste la place Charles X bientôt affectée à l´Hippodrome (annexe 5 ; fig. 10).
Ce plan doit cependant tenir compte des constructions antérieures, principalement au nord de la presqu´île : les propriétaires d´édifices construits sur le tracé des nouvelles rues sont rapidement indemnisés ou voient leurs maisons reconstruites (annexe 6 ; Séance du conseil municipal du 6 avril 1827, t. 7, p. 53) ; l´alignement le long de la chaussée Perrache sera plus difficile à obtenir : en 1891 encore des immeubles forment saillie le long de la chaussée (AC Lyon : 925 WP 038). La régularisation des masses le long du cours du Midi entraîne la suppression d´anciennes rues intégrées aux constructions : rue du Taureau ou rue du Zodiaque dont le tracé se voit encore dans les cours des immeubles de la Compagnie des wagons-lits ou de l´hôtel Victoria, 3 rue Delandine (fig. 9, 34 et 35).
Les édiles s´occupent également des plantations le long des rues : le long du cours du Midi dès 1825 (annexe 1), puis à partir de 1844, le long des autres voies, en particulier le long de la chaussée Perrache où les peupliers plantés à la fin du XVIIIe siècle n´ont pas résisté aux émanations de l´usine d´acide sulfurique Perret (AC Lyon : 1420 WP 007) ; plusieurs devis sont établis par l´architecte voyer Dardel pour 84 platanes sur le cours Charlemagne (24 juillet 1850), 127 platanes sur le cours Suchet (25 juillet), 137 platanes sur le cours Bayard, 524 sur le cours Rambaud et 474 sur la chaussée Perrache (26 juillet). Les plantations sont adjugées au jardinier Pierre Hamon, 12 côte des Carmélites, le 13 novembre 1850.
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, le réseau viaire va évoluer par suite de la construction de la nouvelle gare de Perrache et du prolongement des voies ferrées vers le nord (fig. 11 et 12). Les passages voûtés sous la gare de voyageurs vont désormais relier le quartier au reste de la ville (fig. 18, 19, 41-44). Dès 1858, l´emprise de la place de l´Hippodrome est restreinte à sa taille actuelle (fig. 12). Les transformations affectent ensuite la partie ouest de la presqu´île où l´on tente d´équilibrer constructions de logements et constructions industrielles. En 1874, une nouvelle rue nord-sud, la rue Seguin, est ouverte au milieu des masses à bâtir entre le cours Suchet et la rue Casimir-Perier (AC Lyon : 0321 WP 202 ; fig. 58-59). A l´ouest une partie de la rue d´Alger avait été expropriée par l´Etat pour la construction de l´arsenal ; sa partie sud qui ne dessert plus que des établissements industriels est cédée à la Compagnie du gaz en 1879 (AC Lyon : 925 WP 038). En 1881, un nouvel échange de terrain a lieu entre cette même compagnie et la Ville : la Ville cède une partie de la rue des Moulins à vapeur en échange de terrains destinés à ouvrir une nouvelle rue, le chemin du Goulet (actuelle rue Montrochet) (AC Lyon : 925 WP 038).
En 1882-1883, la rue Delandine est prolongée vers le sud (AC Lyon : 937 WP 094).
En décembre 1891, le conseil municipal adopte le tracé de la rue Quivogne, à percer parallèlement aux rues Smith et Delandine, entre le cours Suchet et la rue Casimir-Perier (annexe 7) ; le 10 mai 1894, un arrêté préfectoral approuve les alignements ; l´enquête d´utilité publique pour la partie cours Suchet - rue Marc-Antoine-Petit est publiée le 26 mai 1896 ; son percement durera jusqu´en 1928 (AC Lyon : 923 WP 020 ; fig. 49, 60-66).
Dans le même temps, sur la pression de la Compagnie PLM, le conseil municipal vote dès 1890 la suppression de la gare d´eau et le prolongement du cours Charlemagne (AC Lyon : 923 WP 020). La chambre de commerce, au nom des mariniers, tente vainement de s´y opposer. Un tracé rectiligne entre le croisement avec la rue Casimir-Perier et le pont de la Mulatière est arrêté et les travaux de prolongation commencent par le sud en décembre 1907 (fig. 17). Stoppés par la guerre, ils reprennent avec un tracé formant la courbe actuelle vers l´ouest (fig. 2).
Dans la deuxième moitié du XXe siècle, l´une des préoccupations de la municipalité va être de supprimer la coupure entre le sud et le nord de la presqu´île. La construction du centre d´échanges de Perrache et l´ouverture du mail à travers la gare débouchant sur le cours Charlemagne par un escalier mécanique tente d´y remédier (fig. 27). Mais le débouché de l´autoroute A6 par le tunnel de Fourvière vers le quai Perrache accentue au contraire l´importance donnée à la circulation automobile (fig. 24, 25).
Le réseau viaire de la presqu´île a conservé des dispositions héritées de l´aménagement de 1826 : les rues construites au nord diffèrent toujours des voies desservant des établissements industriels au sud. Au nord, les voies principales, bordées de larges trottoirs plantés d´arbres, concentrent les commerces (fig. 22, 29, 50) ; elles alternent avec les voies secondaires plus étroites, consacrées autrefois aux ateliers d´artisans (fig. 20) et aujourd´hui aux immeubles contemporains avec parking et espaces verts (fig. 49, 61). Les masses à bâtir trop profondes du plan de distribution d´origine ont été divisées par le percement des rues Seguin et Quivogne ; dans les autres cas, on trouve soit des cours allongées en cœur d´îlot (fig. 71-73), soit des passages piétons spontanés, témoins des différences de niveau causées par les remblais (dess. 4).
Au sud, les rues desservent principalement des édifices industriels ou de grand commerce (marché gare, port), espacés les uns des autres (fig. 70).
Chercheur au service régional de l'Inventaire Rhône-Alpes jusqu'en 2006.