• inventaire topographique
Les croix monumentales du canton de Montbrison
Copyright
  • © Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel

Dossier non géolocalisé

  • Dénominations
    croix monumentale
  • Aires d'études
    Montbrison
  • Adresse
    • Commune : Loire

Introduction

L’enquête s’est attachée à recenser et localiser l’ensemble des croix monumentales du canton de Montbrison :

- les croix existantes en tant qu’édicules ont fait l’objet d’un repérage systématique, avec mention de leur déplacement éventuel (souvent lié à l’élargissement de la voirie) ;

- les croix disparues non localisables mais connues par la documentation, ou les fragments remployés dans la maçonnerie d’édifices voisins de croix disparues ont été signalées dans le dossier de l’édifice en question (s’il a fait l’objet d’une notice) ou de la présentation de la commune concernée (ainsi que dans le présent dossier), mais n’ont pas fait l’objet d’une notice et ne sont pas comptabilisées dans le corpus.

Les nombreux fragments de croix (une quinzaine) vus lors de l’enquête laissent deviner l’importance des disparitions, même si une nouvelle croix a sans doute souvent remplacé l’ancienne. T. Rochigneux (Bibl. Diana) a recensé et dessiné dans le 1er quart du 20e siècle quelques croix du coteau et de la montagne du canton de Montbrison (communes de Montbrison, Bard, Ecotay-l’Olme, Lézigneux, Lérigneux, Essertines-en-Châtelneuf, Verrières-en-Forez) ; certaines n’ont pas pu être reliées à une croix repérée lors de l’enquête d’inventaire, il peut s’agir d’erreurs de localisation, ou d’édicules disparus :

- croix à Celle, commune de Bard, datée 1748 ; il s’agirait d’une croix située vers C 421 aurait été détruite vers 1960, renseignement oral

- croix à Curtieux, commune de Montbrison, datée 1797, non vue

- croix à Vinol, commune de Bard, en fer avec extrémités en fleurs de lys, cassée

- « croix des argnats » à Bard.

Louis Bernard (Les croix monumentales du Forez) cite également des croix qui n’ont pas été retrouvées lors de l’enquête de terrain :

- croisillon portant saint Pierre et un autre saint à Pléney (Verrières-en-Forez), avec une tablette qui a été vue lors de l’enquête

- socle de croix à la Guillanche (Montbrison ou Essertines-en-Châtelneuf), de la fin du 18e siècle, avec l’inscription BIEN HEUREUX CEUX / QUI AURONT RECOUR / S A DIEU / JACQUES DUCHE.

Enfin, l’abbé Valendru signale avoir trouvé dans l’ancien cimetière de Chalain-le-Comtal, près de l’église, les débris de deux croix du 16e siècle, dont peut-être un croisillon « écoté » (voir plus loin), qui aurait ensuite été déposé à la mairie (non vu lors de l’enquête).

Le nombre total de croix repérées s’élève à 279 (dont 54 sélectionnées, soit 19% du corpus).

Répartition géographique

La répartition du corpus par commune se fait comme suit :

- de 0 à 10 :

Grézieux-le-Fromental, 2

Saint-Paul-d’Uzore, 3

Chalain-d’Uzore, 4

L’Hôpital-le-Grand, 6

Moingt, 8

Magneux-Haute-Rive, 9

Montbrison, 9

Mornand, 9

- de 10 à 20 :

Précieux, 10

Saint-Thomas-la-Garde, 10

Savigneux, 10

Champdieu, 12

Ecotay-l’Olme, 13

Chalain-le-Comtal, 15

Lérigneux, 17

- de 20 à 30 :

Lézigneux, 23

Essertines en Châtelneuf, 25

Bard, 26

Roche, 29

- plus de 30 :

Verrières-en-Forez, 39

Près de la moitié du corpus (48,7%) se trouve dans la partie sud-ouest du canton, zone montagneuse qui représente un peu moins du tiers de sa superficie totale, dont de vastes étendues de landes inhabitées : en effet les cinq communes de moyenne montagne (Bard, Essertines-en-Châtelneuf, Lérigneux, Roche, Verrières-en-Forez) comptabilisent 136 croix (dont 39 pour la seule commune de Verrières, sans compter de nombreux fragments non repérés). Les raisons de ce déséquilibre sont sans doute multiples : les monts du Forez étaient jusqu’au début du 20e siècle plus peuplés que la plaine, avec un habitat dispersé qui a pu favoriser l’implantation de croix de chemin et de hameaux ; la montagne est aussi moins accessible et exposée aux aléas de l’Histoire (guerres de Religion, Révolution) comme aux changements de la vie moderne (requalification des routes). Les croix, sculptées dans le granite local, semblent aussi s'y être mieux conservées que dans la plaine, où l'on a pu utiliser du grès houiller ou un granite à grain plus fin, plus fragile.

Répartition chronologique

Les datations des croix repérées donnent la répartition par siècle suivante :

- 14e siècle : 3

- 15e siècle, limite 15e siècle 16e siècle : 10

- 16e siècle, limite 16e siècle 17e siècle : 50

- 17e siècle : 18

- 18e siècle : 29

- 19e siècle : 199 (dont 134 n’incluant pas de vestiges antérieurs)

- 20e siècle : 61 (dont 49 n’incluant pas de vestiges antérieurs ; dont 10 avec base 19e)

NB : une même croix, composée par exemple d’une base du 17e siècle et d’un croisillon du 19e siècle, peut être décomptée dans ces deux périodes (ce qui explique un total général de 370, supérieur à celui du corpus).

En l’absence de date portée antérieure au 16e siècle, la datation des croix précédant cette période reste à l’état d’hypothèses. Louis Bernard, auteur de la principale monographie sur les croix du Forez, fait remonter certains édicules au 14e siècle, en les mettant en relation avec la Peste Noire de 1348 : il date ainsi de cette époque les croix portant l’appellation (assez répandue) de « croix Noire » (voir IA42001708, Croix du Montel ou Croix noire à Bard), et surtout les croix ornées d’argnats, sortes de billettes sensées symboliser les bubons de peste (deux exemples en place dans le canton, et des vestiges ; voir Répartition par type et matériau). Nous avons également placé dans cette fourchette chronologique la croix des Banchets à Lézigneux (IA42001319), qui échappe à toute typologie.

Quelques croix sont datées du 15e siècle, sans grande certitude en l’absence d’indicateur stylistique discriminant et de corpus daté (on trouve des exemples de style proche datés du 16e et du 17e siècle).

Malgré l’abondance des chronogrammes à partir du 16e siècle (voir liste plus bas), la datation des croix monumentales reste complexe à l’Époque moderne. En effet, à côté de séries bien délimitées dans le temps (par exemple la série des croix ornées de couronnements de la Vierge du milieu du 16e siècle, identifiée par Louis Bernard), on constate une grande permanence de certains modèles, que l’on continue à exécuter sur deux ou trois siècles avec des variations subtiles de proportion (par exemples les croix de section octogonales), avec même des croix sans doute volontairement archaïsantes, hommages aux croix historiées du 16e et de la 1ère moitié du 17e siècle (voir par exemple IA42002613, croix de la Plaine à Verrières-en-Forez).

Le 16e siècle marque un premier âge d’or des croix dans le Forez : il représente 18 % du corpus avec 50 croix ayant au moins une partie significative du 16e siècle, plus que les deux siècles suivants réunis (37 croix, 16,8 %). Près de la moitié se trouvent dans les communes de montagne (23, sans compter les fragments à Verrières-en-Forez). Cependant c’est bien sûr du 19e siècle que l’on conserve le plus de croix, avec 199 édicules recensés (71,3 % du corpus). Les constructions sont constantes pendant tout le siècle, leur nombre suit une courbe légèrement ascendante dans les trois premiers quarts (autour de 25 puis de 30 croix par quart de siècle), avec un pic dans le dernier quart (35 croix). Les reconstructions de croix après la Révolution, en particulier sous la Restauration, puis les croix de missions dans la 2e moitié du siècle, s’ajoutent aux nombreuses croix privées exprimant la dévotion de donateurs dont les noms sont soigneusement gravés sur le piédestal.

Liste des chronogrammes (entre parenthèses : nombres d’occurrences d’un même chronogramme) :

- 16e siècle (total : 7) : 1525 ; 1533 (3) ; 1540 ; 1543 ; 1550

- 17e siècle (total : 7) : 1612 ; 1628 ; 1648 ; 1660 ; 1679 ; 1696 ; 1699

- 18e siècle (total : 7) : 1711 ; 1766 ; 1766 ; 1781 ; 1782 ; 1795 ; 1798

- 19e siècle (total : 68) : 1802 ; 1807 ; 1808 ; 1810 (2) ; 1814 (2) ; 1818 (4) ; 1819 ; 1821 ; 1823 ; 1826 ; 1827 (2) ; 1828 ; 1829 ; 1835 ; 1837 ; 1838 ; 1843 ; 1844 ; 1845 ;1849 ; 1855 ; 1856 (3) ; 1859 ; 1861 (2) ; 1862 ; 1863 ; 1866 (2) ; 1867 (2) ; 1869 ; 1871 (4) ; 1873 (2) ; 1874 (3) ; 1875 ; 1880 ; 1883 ; 1885 ; 1886 (2) ; 1887 (2) ; 1888 ; 1890 (2) ; 1891 ; 1892 ; 1895 ; 1896 (4) ; 1897 ; 1898

- 20e siècle (total : 26) : 1902 ; 1906 ; 1908 ; 1910 ; 1924 (2) ; 1925 ; 1930 ; 1933 ; 1937 ; 1939 ; 1942 ; 1948 ; 1949 ; 1951 ; 1951 ; 1953 ; 1954 ; 1955 ; 1956 ; 1956 ; 1963 ; 1993 ; 1995 ; 1997 (2)

Répartition par type et matériau

Matériaux

L’ensemble des croix monumentales de l’aire d’étude est étudié dans ce dossier : en effet, sur une même croix, nature (croix monumentale, croix de chemin, croix de cimetière), fonction (bornage, commémoration, protection, dévotion, mission) et typologie se croisent, et parfois se succèdent.

Les croix monumentales rassemblent sous une même entrée les croix de chemin, les croix de cimetière, les croix de hameaux et les croix de mission.

Les croix de chemin sont les plus nombreuses ; placées aux carrefours, aux cols, aux entrées de villages ou de hameaux, aux limites de seigneurie, juridiction, paroisse ou châtellenie, elles couvrent tout le champ chronologique et sont aussi les plus polymorphes. 14 croix présentent encore un bloc reposoir ou « pierre des morts », grosse pierre plate posée devant le piédestal et utilisée pour poser les cercueils le temps d’un repos lors de leur transport vers l’église ou le cimetière (exemples : croix du Faux au Montet, à Roche, IA42002358, ou croix d’Azieux, à Précieux, IA42001524).

Les croix de chemin se confondent parfois avec les croix monumentales plantées au centre des villages ou des hameaux (croix de hameaux), souvent un peu plus grandes et plus ornées (exemples : croix de saint Martin au bourg de Roche, IA42002284, croix au bourg de Bard, IA42001723). Certaines sont d’anciennes croix de cimetière, qui n’ont pas été déplacées en même temps que le cimetière (transporté hors des bourgs généralement dans le 4e quart du 19e siècle ou le 1er quart du 20e) et ornent donc la nouvelle place publique aménagée à l’emplacement libéré (par exemple à Lérigneux, IA42002009 ou à Bard, IA42001718).

Peu de croix ont été transportées dans le nouveau cimetière (sauf peut-être à Chalain-d’Uzore, IA42002994 ?), en général doté d’une croix neuve ; les raisons de ce choix ne sont jamais explicité dans les archives : les anciennes croix étaient-elles considérées comme vétustes, passées de mode, et leur déplacement jugé plus coûteux qu’une construction neuve ? Ou au contraire souhaitait-on les conserver au coeur du village par attachement à leur ancienneté ou à leur valeur esthétique ?

Les 12 croix de mission repérées dans le canton sont toutes de la 2e moitié du 19e siècle ou du 1er quart du 20e siècle (et jusqu’à 1933 pour la dernière, à Verrières-en-Forez) ; elles sont toutes datées. On peut leur adjoindre la croix du Jubilée, à Verrières-en-Forez (IA42002600), qui fait figure de précurseur (elle est datée de 1827). Le métal, qui permet une iconographie riche, évoquant souvent les instruments de la Passion (croix d’Essertines-en-Châtelneuf, IA42002941, ou Lérigneux, IA42002014) en est leur matériau de prédilection (9 cas).

Le matériau employé de façon la plus répandue depuis le 15e siècle est le granite : il concerne 252 éléments du corpus (90 %), dont 118 croix exclusivement réalisées en granite. Le granite est le matériau privilégié des croix des 15e et 16e siècles. On trouve au 16e siècle des exemples de croix monolithes (du dé au sommet du croisillon), exercice de virtuosité prisé à l’époque (une douzaine de cas dans le corpus). La croix la plus haute est sans doute celle du bourg de Roche (croix de Saint-Martin, IA42002284, H=417, comparable aux plus beaux exemples du canton de Boën comme la croix du bourg de Leigneux, IA42000674, H=460). Il est souvent difficile de différencier un granite à grain fin d’un grès, l’aspect de surface du matériau étant en général corrompu par l’érosion et la présence de mousses ou lichens. Le métal est utilisé pour réaliser des croix ou des croisillons, donc le socle reste en granite, à partir du 19e siècle seulement (contrairement au canton voisin de Boën-sur-Lignon, où des exemples de croix en fer forgé des 17e et 18e siècles ont été étudiés : voir par exemple IA42000719, à Pralong, ou IA42000973, à Sainte-Agathe-la-Bouteresse, datée 1759). Cette alternance de matériau peut être voulue (exemples à Saint-Paul-d'Uzore, les Bichets, IA42003006, ou à Chalain-d'Uzore, les Bornes, IA42002996), mais dans de très nombreux cas un croisillon métallique est scellé sur une base en granite (piédestal, base de fût) pour remplacer le croisillon d’origine disparu (exemples à Montbrison, Curtieux, IA42003537, ou Précieux, la Croix des Rapeaux, IA42001525...). Le corpus compte ainsi 53 croix avec un croisillon en fer forgé, et 49 croix en fonte.

Les autres matériaux sont plus anecdotiques : le bois (sept croix) a peut-être été utilisé avant la fin du 19e siècle, mais la fragilité du matériau a empêché la conservation des éventuels exemples ; la pierre de Volvic (11 exemples) a été utilisée de façon marginale pour des croix de cimetière (deux cas) ou des croix privées.

Typologie

La typologie des croix du canton de Montbrison comprend sept familles principales, dont certaines sont divisées en sous-groupes ; nous avons repris les mêmes catégories que celles retenues pour le canton voisin de Boën-sur-Lignon, afin de permettre une appréhension globale du corpus.

Le type A rassemble les croix en granite (ou en grès) des 15e et 16e siècles. Il se subdivise en trois sous-types :

- type A0 : croix en granite de section octogonale, fin 15e siècle (?), 16e ou début 17e siècle (?)

- type A1 : croix en granite (ou en grès) du 16e siècle, dont le croisillon est orné du Christ en croix et du couronnement de la Vierge

- type A2 : croix en granite (ou en grès) du 16e siècle, dont le croisillon est orné du Christ en croix et le croisillon ou le fût d’un autre personnage ou scène

Le type B comprend les croix en granite (ou en grès) des 17e, 18e ou 19e siècles

Le type C rassemble les croix en fer forgé et découpé des 17e, 18e ou 1ère moitié 19e siècles. Il se subdivise en deux sous-types :

- type C1 : croix en fer forgé et découpé des 17e, 18e ou 1ère moitié 19e siècle, avec extrémités en fleurs de lys découpées

- type C2 : croix en fer forgé et découpé des 17e, 18e ou 1ère moitié 19e siècles, avec extrémités en fleurs de lys forgées ajourées

Le type D rassemble les croix en fer forgé du 19e siècle. Il se subdivise en deux sous-types :

- le type D1 : croix en fer forgé, 19e siècle, à losanges et cercles

- le type D2 : croix en fer forgé, 19e siècle, à volutes

Le type E comprend les croix en fonte

Le type F, les croix en pierre de Volvic

Le type G sert à signaler les croix ne rentrant dans aucune catégorie.

Répartition du corpus par type :

Type A, total : 58 (19 %)

Type A : 23

Type A0 : 15

Type A1 : 15

Type A2 : 5

Type B : 91 (29 %)

Type C, total : 17 (5,6 %)

Type C : 6

Type C1 : 8 (dont 4 à Lérigneux)

Type C2 : 3 (toutes à Chalain-le-Comtal)

Type D, total : 36 (12 %)

Type D : 15

Type D1 : 3

Type D2 : 18

Type E : 49 (16 %)

Type F : 11 (3,6 %)

Type G : 43 (14,1 %)

NB : une même croix, composée par exemple d’une base en granite du 16e siècle et d’un croisillon en fer forgé du 19e siècle issu d’une restauration, peut être décomptée dans deux typologie (22 cas ; ce qui explique un total général de 305, supérieur à celui du corpus).

Iconographie

Un peu plus de 60 % du corpus présente un décor assez significatif pour avoir été repéré (les bagues, tores et moulures n’ont pas été comptabilisées), mais cette proportion pouvait être plus importante, certaines des croix repérées ayant perdu leur croisillon. En effet, le décor se concentre sur cette partie de la croix, et beaucoup plus rarement sur le dé ou le piédestal (ils sont en général réservés aux inscriptions, avec parfois des écussons armoriés ou non). Les croix en fonte, où la distinction entre fût et croisillon n’est plus pertinente, dont souvent ornées sur toute leur surface.

Mis à part quelques rares exemples exceptionnels, où le croisillon est chargé de plusieurs personnages ou groupes sculptés (IA42001718, croix de l’ancien cimetière de Bard, IA42001317, croix de l’ancien cimetière de Lézigneux, et croisillon déposé au musée de la Diana), le décor figuré le plus fréquent est le Christ en croix (89 cas, soit près d’un tiers du corpus), parfois accompagné d’une Vierge à l’Enfant (19 cas ; association caractéristique des croix du 16e siècle, voir groupe des croix à couronnement de la Vierge, type A1 ; la Vierge est représentée sans le Christ dans un seul cas) ou d’une Vierge dolente (cinq cas), ou simplement debout, parfois bras ouverts (cinq cas). Les autres figurations du Christ sont rares : deux Saintes Faces et un buste en Ecce Homo, sur des croix en fonte.

La représentation de saints personnages est rare : le corpus contient comme précédemment un exemple exceptionnel (IA42002531, Croix de chemin, dite croix d'Estiallet), mais moins de dix croix présentent un saint ou une sainte dans leur décor (voir groupe des croix à personnages sur le fût ou le dé). Les anges sont plus fréquemment représentés (31 cas) : couronnant la Vierge, agenouillés, sonnant de la trompe ou simplement sous forme de tête sur une paire d’ailes.

L’apparition des croix en métal a favorisé l’apparition de nouveaux types de décor. Les croix en fer forgé présentent des extrémités en forme de fleurs de lys (en particulier autour des années 1830 et du renouveau monarchique ; 16 cas), ou un décor ajouré de volutes ou cercles (type D1, cercles et losanges : 3 cas ; type D2, volutes : 18 cas). Les décors symboliques se développent avec les croix en fonte ; les thèmes privilégiés sont, à côté des motifs végétaux (décoratifs ou symboliques, plus ou moins stylisés : feuilles, lierre, blé, raisin, fleurs, roses...), la représentation des instruments de la Passion (17 cas, allant de la simple figuration de la couronne d’épines à la croisée à une énumération plus complète : voir par exemple les croix de missions aux bourgs de Lérigneux, IA42002014, datée 1851, ou d’ Essertines-en-Châtelneuf, IA42002941), et moins fréquemment le monogramme IHS (que l’on trouve avant le 19e siècle plutôt dans le registre des inscriptions ; 13 cas) ou le Sacré Cœur (5 cas).

Quelques séries remarquables

Le groupe des croix de section octogonale (type A0) ; le groupe des croix aux argnats (variante du type A0)

15 croix de section octogonales ont été recensées dans le canton ; elles se trouvent toutes dans la zone montagneuse ou sur le coteau qui la précède (communes de Bard, Lérigneux, Roche, Verrières-en-Forez, Essertines-en-Châtelneuf, Ecotay-l'Olme, Montbrison). On les date en général du 15e siècle, mais l’absence de mouluration, de décor ou d’inscription ne permet pas de datation assurée, et certaines sont sans doute plus récentes (16e ou 17e siècles). Il s’agit souvent de croix de petites dimensions, scellées sur un muret en bordure de chemin (Écotay-l'Olme, l'Olme, IA42002836, ou Essertines-en-Châtelneuf, les Gouttes-basses, IA42002144) ; cependant certaines de ces croix ont un développement plus important et forment des édicules isolés : les exemples les plus accomplis sont la croix du Montel ou « croix noire », à Bard (Flavellière, IA42001708), qui présente un décor exceptionnel pour ce type de croix qui en est en général dépourvu (réseau trilobé entre les bras du croisillon, décor en relief sur les deux faces : un soleil à la croisée et aux extrémités latérales, une lune à l'extrémité supérieure), mais a perdu son piédestal, ou la croix du Taillou à Ecotay-l’Olme (IA42002482), qui l’a conservé.

Le groupe des croix aux argnats constitue une variante du type A0, qui compte deux représentants dans le canton : à Essertines-en-Châtelneuf, au bord du chemin qui descend depuis le hameau de Faury vers la vallée du Vizézy et rejoint le château d'Essertines-basses (IA42002532), et à Roche, au bourg (IA42002287).

Ces croix sont ornées de boules en relief, appelées localement argnats, généralement identifiées comme des représentations symboliques de bubons de peste. Selon Louis Bernard, ces croix auraient été édifiées pendant la guerre de Cent Ans (il les date de la fin du 14e siècle, après la peste Noire, ou du début du 15e). Les deux exemples étudiés sont très similaires, avec un socle de plan circulaire à arête chanfreinée orné de dix argnats, et un croisillon de petites dimensions (h=150), avec quatre argnats à chaque extrémité et un grand Christ en croix (cloué avec les pieds juxtaposés, sans titulus) sur la face principale (pas de décor au revers). Un fragment de croisillon portant des argnats a été photographié aux Poizats, à Verrières-en-Forez, et une « croix des argnats » (disparue ?) est signalée par Thomas Rochigneux (Bibl. Diana) à Bard. On peut encore rapprocher de ce groupe la croix du Taillou à Ecotay-l'Olme (IA42002482), qui présente un décor de billettes à la base du fût, et surtout celle de Marcilly-le-Châtel (canton de Boën, IA42000672).

Le groupe des croisillons écotés (variante du type A)

Cinq croix du canton portent des croisillons de type « écoté » (simulant une branche d’arbre avec des départs de branches). Il s’agit d’un type de décor en vogue pour les croix de procession dès le 15e siècle (voir, dans le canton de Boën, les croix de procession des églises paroissiales de L'Hôpital-sous-Rochefort, IM42001400, Saint-Laurent-Rochefort, IM42001285 ou Ailleux, IM42000908), que l’on retrouve ensuite sur les croix de chemin : l’exemple daté le plus ancien est la croix de l’ancien cimetière de Bard (IA42001718), datée de 1550, dont le croisillon a cependant été refait en 1990 (semble-t-il à l’identique). On peut le rapprocher du croisillon de la croix de l’ancien cimetière de Lézigneux (IA42001317, disparu), qui devait dater du 16e siècle et portait également un décor sculpté important : en effet, au Christ en croix et à la Vierge à l'Enfant reposant sur un culot, qui occupent les faces, s’ajoutent un saint évêque et saint Jean l’Évangéliste à Bard, ou deux anges recueillant dans des coupes le sang coulant des mains du Christ à Lézigneux. La croix de l’ancien cimetière au bourg de Saint-Laurent-Rochefort (canton de Boën, IA42000978), fait partie du même groupe.

Le croisillon de la croix de la Chana, à Champdieu (IA42003133), a été refait à l’identique mais l’original est conservé. Il daterait du 17e siècle (on peut le comparer à celui d’une croix à Saint-Sixte, canton de Boën, IA42000982), et aurait été accompagné d’un personnage sur le fût.

Les deux derniers exemples remontent quant à eux au 1er quart du 19e siècle (les deux croix portent la date 1818) et ornent deux croix de la commune de Verrières-en-Forez, à la Plaine (IA42002613) et aux Champs (IA42002620) : Louis Bernard date ce dernier croisillon de la 2e moitié du 17e siècle, mais comme à la Plaine il peut s’agir d’une création plus récente d’inspiration archaïque.

Enfin, l’abbé Valendru cite au cimetière de l’église paroissiale de Chalain-le-Comtal un fragment de croix du 16e siècle portant des « nodosités », que l’on peut identifier à des écots (à moins que ce ne soient des argnats ?), qui n’a pas été retrouvé (voir Présentation de la commune, IA42001493).

Le groupe des croix à couronnement de la Vierge (type A1)

Cette série a été identifiée par Louis Bernard : il s’agit de croix monolithes érigées vers 1540 en Forez et portant une représentation du couronnement de la Vierge à l’Enfant par un ange placé verticalement sur le bras supérieur ; une vingtaine de croix ont été recensées par Louis Bernard, dont plusieurs se trouvent dans le canton de Montbrison, ce qui l’a amené à former l’hypothèse d’un atelier montbrisonnais pour leur réalisation. Il s’agit en général de croix monolithes, sans démarcation entre le fût et le croisillon à extrémités feuillagées.

L’enquête de terrain a permis d’étudier 14 croix de cette série : six sont localisées dans la commune de Roche, dont trois au bourg (l’une de celles-ci n’est connue que par la documentation), quatre à Essertines-en-Châtelneuf, une à Bard, une à Champdieu, une à Montbrison (Curtieux) et une à Lézigneux (croix de l’ancien cimetière, dont le croisillon, également écoté, a disparu). Dans 12 cas, la Vierge à l’Enfant est couronnée par un ange placé verticalement sur le bras supérieur ; au Vernay (Roche, IA42002331), l’ange est sculpté horizontalement. Dans les deux cas restants, la position de l’ange n’est pas identifiable avec certitude, le croisillon ayant totalement (Roche, croix du cimetière, IA42002286, et Lézigneux, croix du cimetière, IA42001317) ou en partie disparu (Champdieu, croix de Barge, IA42003042).

On peut enfin signaler que huit croix de cette série ont été étudiées dans le canton de Boën.

Le groupe des croix à personnages sur le fût ou le dé (variante des types A et B)

Quelques croix en granite des 16e ou 17e siècle présentent un décor comprenant des personnages en pied sculptés en haut-relief sur le fût de la croix. Ce décor intervient sur plusieurs séries de croix déjà commentées, en particulier les croisillons écotés et les croix à couronnement de la Vierge.

L’exemple le plus fourni est le fût de la croix d’Estiallet (Montbrison, IA42002531), datée de 1628, sculpté sur la face principale de six personnages en demi-reliefs (polychromes), disposés en trois registres, représentant de haut en bas : saint Jean Baptiste et saint Laurent avec un grill, mais cet attribut a peut-être été restitué ; sainte Catherine et sainte Barbe (tour) ; sainte Madeleine et saint Pierre (clefs). La croix de l’ancien cimetière de Bard (IA42001718) présentait un décor de quatre statuettes en haut-relief à la base du fût, dont saint Laurent (avec un grill ?), saint Antoine avec un bâton (et vestiges de l'emplacement de deux autres personnages non identifiables). Cependant, la plupart des croix n’ont qu’un personnage sculpté : saint Martin à Roche (croix de Saint-Martin, IA42002284) et Champdieu (croix de la Chana, IA42003133, mais la sculpture actuelle est une réfection sans doute éloignée du modèle original, qui représentait peut-être saint Martin en évêque, comme à Roche), saint Roch aux Clavelloux, Verrières-en-Forez (IA42002618), une sainte non identifiée à Conol, Verrières-en-Forez (IA42002593). Enfin, le fût de la croix de la Plaine, à Verrières-en-Forez (IA42002613), porte deux personnages sculptés malgré sa date tardive (1818) : une femme mains jointes (Marie-Madeleine ?) à la base, un personnage drapé et tenant un bâton (saint Jean-Baptiste ou saint Roch) dans la moitié supérieure.

Ce décor concerne ainsi sept croix dans le canton de Montbrison, contre 15 dans le canton de Boën.

Le groupe des croix en fer forgé torsadé de Lérigneux

Ce petit groupe de croix peut être mies en relief comme un exemple de série de croix sans doute réalisées par le même forgeron et à la même époque dans une aire géographique restreinte ; il concerne en effet trois croix implantées dans la commune de Lérigneux, formées de fers carrés torsadés (torsions inversées), à extrémités en fleurs de lys découpées, dont une est datée de 1821 (IA42002012, IA42002013 et IA42002016).

Le groupe des croix à chapiteau et inscription sur cartouche lobé, du 1er quart du 19e siècle

Un dernier petit groupe repérable dans les croix du 19e siècle est constitué de huit croix, situées sur les communes de montagne et à Montbrison ou Écotay-l'Olme, qui présentent des caractères similaires : un piédestal portant une inscription nommant les commanditaires gravée dans un rectangle lobé, un dé à faces rectangulaires verticales, qui porte parfois une inscription (GLOIRE A DIEU ou GLOIRE A DIEU SEUL, O CRUX AVE ou O CRUX AVE SPES), solidaire d’un fût élancé, avec des tores à ses deux extrémités, un petit chapiteau supportant le croisillon, de section circulaire avec des extrémités baguées et orné du Christ et de la Vierge à l’Enfant. Ces croix sont toutes datées, entre 1810 ou 1818 (incertitude de lecture) et 1836 (seule la croix d’Estiallet-le-Haut, à Montbrison, ne porte pas de date, mais celle-ci a peut-être été masquée par un relèvement du niveau de la chaussée), dont trois (ou quatre) en 1818 ; elle témoignent du renouveau de la construction des croix à cette époque, et de la tendance historiciste qui prévaut alors dans leur édification.

Croix concernées : IA42002358, croix du Faux à Roche, le Montet, 1823 ; IA42001717 croix à Bard, le Pic, 1819 et 1836 ; IA42002934, croix du Chevallard à Essertines-en-Châtelneuf, 1826 ; IA42002613 croix de la Plaine à Verrières-en-Forez, 1818 ; IA42003531 croix d’Estiallet-le-Haut à Montbrison ; IA42002620, croix à Verrières-en-Forez, les Champs, 1818 ; IA42003533, croix à Montbrison, le Martel, 1810 ou 1818 ; IA42002861, croix de saint Etienne à Écotay-l'Olme, le Suc du Pin, 1818.

  • Période(s)
    • Principale : 16e siècle
    • Principale : 17e siècle
    • Principale : 18e siècle
    • Principale : 19e siècle
    • Principale : 20e siècle

Typologie :

Type A : croix en granite (ou en grès), 16e siècle

Type A0 : croix en granite, de section octogonale, fin 15e siècle (?), 16e ou début 17e siècle (?)

Type A1 : croix en granite (ou en grès), 16e siècle, croisillon avec le Christ en croix et le couronnement de la Vierge

Type A2 : croix en granite (ou en grès), 16e siècle, croisillon avec le Christ en croix et un autre personnage ou scène

Type B : croix en granite (ou en grès), 17e, 18e ou 19e siècle

Type C : croix en fer forgé et découpé, 17e, 18e ou 1ère moitié 19e

siècle

Type C1 : croix en fer forgé et découpé, 17e, 18e ou 1ère moitié 19e siècle, extrémités en fleurs de lys découpées

Type C2 : croix en fer forgéet découpé, 17e, 18e ou 1ère moitié 19e siècle, extrémités en fleurs de lys forgées ajourées

Type D : croix en fer forgé, 19e siècle

Type D1 : croix en fer forgé, 19e siècle, à losanges et cercles

Type D2 : croix en fer forgé, 19e siècle, à volutes

Type E : croix en fonte

Type F : croix en pierre de Volvic

Type G : autre type

  • Toits
  • Murs
    • granite
    • lave
    • fer
    • fonte
    • grès
  • Décompte des œuvres
    • repérés 279
    • étudiés 54

Documents d'archives

  • Bibl. Diana. Fonds Rochigneux, 17 F 12 : "Croix du Forez". [Croix disparues ou non identifiées]. 25 fiches cartonnées, 16x12,4 cm ; 1er quart 20e siècle. Annotations manuscrites de deux fiches : - Bard, Celle / Magnificat mal profilée / Christ / cerclé 2 cercles / monolithe / [inscription dé] BRV // NE // 1748 - [recto] Curtieux / granit / bâti grossier pierres bruts / [inscription sur fût] 1797. [verso] Lérigneux 26 août 1912 [dessin base moulurée de croix]

    B Diana Montbrison : 17 F 12

Bibliographie

  • BERNARD, Louis. Les croix monumentales du Forez. Saint-Etienne : Conseil Général de la Loire, 1971

  • MONNET, Thierry. Les croix monumentales du Forez (Loire), par l'exemple.

    Les carnets de l'Inventaire : études sur le patrimoine – Région

    Rhône-Alpes [en ligne], 5 juin 2012 [consulté le 12 mars 2014]. URL : <http://inventaire-rra.hypotheses.org/862>

Documents figurés

  • [Vue de la croix de Verte Epine (non repérée)]. / Justin Dusser (photographe). 1 photogr. pos. : plaque de verre, 4e quart 19e siècle. Coll. Part. G. Fougerouse.

    Collection particulière
    [Lézigneux. Vue de la croix de Verte Epine (non repérée)].
  • Plans de la croix de Pierre à Chaux / Brassart Ludovic (architecte). 2 dess. : tirages de plan sur papier. Ech. 1:10 (plan) et 1:5 (détail du croisillon). 2e moitié 20e siècle (Bibl. Diana. 1F 42 : 160, sans numéro).

    B Diana Montbrison : 1F 42 : 160, sans numéro
Date(s) d'enquête : 2005; Date(s) de rédaction : 2008
© Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel
© Conseil général de la Loire
Guibaud Caroline
Guibaud Caroline

Chercheur au service de l'Inventaire Rhône-Alpes puis Auvergne-Rhône-Alpes (1999- )

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